Jour 10
‘Apporte les croissants. P’tit déj à 9h.’
La boulangerie FEUILLETE est à une centaine de mètres avant la maison. En arrivant un peu avant 9h, le personnel, sapé comme des pingouins, prépare sandwichs et viennoiseries sur fond jazzy. Dave Brubeck. Take Five.
‘Je laisserai le portail ouvert. Tu pourras mettre ta moto dans l’allée du garage.’
Pause hors du temps chez Reen-K. Lulu et Boulette émergent à peine. En slip Mickey pour l’un, en grenouillère pour l’autre.
Lulu: petit voyou de deux ans doux comme un agneau. Boulette: petite patate rondouillarde d’un an, sœur de Lulu.
Vibraphone en bois, tambour en plastique, trottinette aux couleurs d’une coccinelle. Les deux sauvages sont méchamment équipés.
Dans leur monde, l’herbe et les cailloux sont comestibles, les dinosaures font même pas peur, les navions roulent lentement et sont plus petits que les zoziaux. Et les motards mettent des tasques sur la tête.
Les deux microbes donnent le rythme de la journée. Énergique mais lent. Bruyant mais tranquille.
Matinée Miyazaki. Déjeuner épicé-parfumé. Sieste trop courte. Goûter: crouton de pain comme terrain de jeu pour les six dents de Boulette; tartine de Nutella qui tombe du mauvais côté pour Lulu. Après-midi champêtre et gazouillis dans le jardin.
Fin de journée. Avant le dîner, la douche et Petit Ours Brun. Lulu veut essayer tasque et moto - juste s’asseoir - mais n’ose pas demander. Deux papouilles plus tard, il minaude devant le miroir, l’intégral parachuté sur sa tête. Chuhotements et papouilles nécessaires pour approcher la moto. Ventousage de sa carrure de crevette sur la selle conducteur. Contact, démarreur, coup de gaz. Dans la seconde qui suit, les yeux de Lulu sont ronds comme deux pleines lunes; une odeur de coopérative agricole s’échappe du loufiat. Grosse frayeur dans sa petite vie. Au titre de l’équité fraternelle, Boulette a droit à sa pose de rider sur la selle.
Un réservoir de bécane n’est finalement qu’un gros tambour.
Trip partiel cumulé: stand by.