On parle au on, c'est mieux quand le je bégaye. On reçoit domicile des fax à en-tête « cabinet neuro-psychiatrique mon cul » qui disent « rappelez-nous c'est urgent » mais
1) la hotline elle déborde
2) c'est faux numéro
3) y a pas de téléphone
Alors on parle au on, c'est mieux que le ils, ça fait moins faux. On fabrique des photos inédites. Des portraits de Rimbaud jamais vus. Quand il marche c'est à l'envers sur les voies ferrées désamorcées. Les cratères déforment le rail. Les gravats charcutent les plots. Il fuse intacte, trace impeccable dans les champs de mine. On essaye de suivre sa trace mais
1) l'envers est pas prenable
2) le sens de lecture c'est autre chose
3) l'ombre de l'ombre elle coule trop loin
Alors on stagne. Alors on fuit. Paraît que certaines zones de la ville sont propices au genre d'exploration qu'on souhaite. La chasse au corps c'est populaire. On traque le mâle. On traque le jeune. Pour fabriquer aussi le Rimbaud qui nous échappe. Une bombe humaine prête à péter. Les corps aussi sont juste des corps à apprêter. Les modèles ils prennent tout. Après on coupe. Après on colle. Charcute. Redresse les épaules. Écarte le torse. Bois la lumière. Faut pas bouger pendant qu'on te peint le ventre. Dedans ficher les bouts de Semtex chinois reçu la veille au port. Le signal déclencheur c'est ton portable. Le mot de passe c'est genre un code. Le code une autre connerie en prose. Et fais ce qu'on te dit. Et tiens-toi droit. Et force dehors droit vers la ville pour qu'on te voit bien. Entre autres, là-bas, tirs de roquette, quelques appels au meurtre. Mais toi comme t'es, beau comme tout avec ton masque qu'on t'a craché, ils te butteront pas. On parle au tu pour t'impliquer, que tu comprennes mieux comment là-bas ça va tracer mais
1) oublie pas que le déguisement c'est temporaire
2) fais juste comme si t'étais pas toi et
3) on réserve la traduction