Initialement, le collectif et label 'A Song A Place', se donnant pour but la promotion
d'un folk intimiste de qualité , avait prévu The Black Atlantic et My North Eye au programme de ce Sunday Folk Club,
organisé un dimanche par mois au Sazz'n Jazz, écrin précieux qui doit
sublimer les performances d'artistes s'ébattant dans des climats kammerspiel.
Las , les effets volcaniques islandais ont mis fin au projet! The Black Atlantic se voit obligé de demeurer de l'autre côté de l'Atlantique.
Ne perdant pas le Nord, Dan Miller et Ann Arbor trouvent un digne substitute en la personne de l'énigmatique
Noria!
My North Eye
A l'origine, My North Eye, est considéré comme un projet alternatif de Yann, leader du combo postrock 'Dirge'.(My North Eye est d'ailleurs le titre d'une des compositions du groupe) Très vite,
après avoir débuté solo, il s'associe à Mathias pour devenir un 'vrai' groupe.La scène étant leur terre de prédilection, ils sortent un CD -live(8 titres).
Le groupe fait partie du 'Collectif Europ &Co' regroupant d'autres bands de la scène rouennaise, tels Maarten ou My Sidekicks...
'A cigarette and a song' ouvre le bal.
Sombre, hanté, proche de l'univers de David Eugene Edwards, la voix est caverneuse, la guitare agressive, le violon arrondissant les angles.
Il ne te faut pas 2', en fermant les yeux, pour t'immiscer dans cet univers plus imprégné de grands espaces américains que de senteurs marines normandes.
'Södermalm' direction Stockholm pour ce titre lancinant et plaintif...I was so afraid... when we took a plane but you held my hand... Aviophobie, Yann?
'Nothing for Nothing' un menuet classique proche du ton Nick Cave.
'Border Town' une histoire de crime, écrite à l'occasion du festival du film policier au Havre.
Violon déchirant, guitare lyrique, un drame hitchcockien.
'Anthem ?' un hymne négatif susurre le barbu.
...there are songs to sing , elles sont bien meilleures que celle-ci... mais non, Monsieur, cette valse oppressante est magique!
'Gospel' un gospel à la philosophie punk ...there's no time... no tomorrow... finissant par un cri d'espoir.... I believe in a song which we can sing along...
'Like a Hurricane' de Neil Young, formidable version d'une lenteur littéraire et bourrée d'effets fuzzy, ajoutés au phrasé prédicateur de Yann, l'illuminé.
...I want to love you but
I'm getting blown away....qu'il gueule de toutes ses tripes et ça secoue les tiennes, le violon agressant, insidieusement, tes neurones.
Magistral!
'Love song 2' une chanson d'amour (sic) ...I might sound like Nick Cave (on te l'avait dit) murdering all his babes... Le coupable avoue !
La dernière, apocalyptique: 'The road that never ends' , voix de velours, violon en arpèges pour cette ballade sur chemins (poussiéreux) de traverse.
Visions de Jack Kerouac et de son baluchon, la route sera longue!
Profondeur et sincérité,deux écorchés vifs en scène pour 45' bouleversantes .
Noria
Un petit temps déjà que tu n'avais plus vu Olivier Piette en action. Il a, depuis, sorti le CD ' Seasons of the Song'( chez Matamore) tout en continuant à présenter son univers introspectif
atypique sur les scènes les plus intimistes de nos riantes contrées.
Pas de guests ( Catherine Graindorge par ex.) pour l'assister en ce début de soirée: 2 acoustiques ou une douze cordes, un pupitre avec ses feuillets de textes (ne parlons pas de chansons) qu'il
psalmodie d'une voix, à la fois fragile et travaillée, au gré de ses improvisations.
Noria, tel Jeff Buckley, utilise ses cordes vocales comme un instrument de musique à part entière: vibrations, silences,
Le Sazz' n Jazz , transformé en prieuré austère et silencieux, se recueillera au son de huit compositions aux titres absents pour la plupart.
Un timide bonsoir, quelques accords de guitare hispaniques ciselés , le contrôleur a bien poinçonné ton ticket devant t'emmener vers une planète blanche sur laquelle vivent Jeff Buckley, déjà
mentionné, Antony & the Johnsons, Devendra Banhart et autres mystiques, héritiers de Syd Barrett.
...let's dance with your shade.... esthétique vestimentaire hippie de rigueur!
Un second titre sera introduit par de longs méandres instrumentaux. Tu laisses ton embarcation, sans capitaine, suivre le bon vouloir d' un cours d'eau paresseux et d'un filet de voix murmuré
.
Une nouvelle, longue plage introduite par une guitare d'inspiration andalouse te ramène à l'art poétique dépressif d'un Federico Garcia Lorca.
En nous remerciant pour notre écoute attentive, Noria se saisit de la 12-strings et amorce une ballade spirituelle ésotérique... the death may not conquer our soul.... une communion avec les
instances divines.
Cette mélodie contemplative permet à ton esprit de confectionner ses propres clichés impressionnistes allant de paysages hivernaux figés aux fresques maniéristes torturées d'un El Greco
ténébreux.
Nous sommes les damnés à la merci d'un poète maudit.
Arrivant en fin de set , un haut-parleur récalcitrant s'est mis en tête de saboter le récital.
Pas grave, nous explique Olivier, jouer unplugged me convient mieux, la résonance de ma voix et de la guitare est ainsi optimisée, et il vient s'asseoir parmi nous et nous interprète deux titres
du Cd: 'Ripples and Falling Leaves' au ton apaisé, et chantant l'universalité...we are everyone else...et en guise de bis ' The Meeting' en version improvisée ...and the moon is still shining....
nuit étoilée, quelque part en Arizona.
Robert Mitchum en Roméo faisant la cour à Marilyn Monroe...
Do not disturb, please!
Dernière perle introspective, Noria, le réservé, nous remercie pour la communion oecuménique et s'en va rejoindre le commun des mortels et l' obscénité de leur monde matériel.
Le mois prochain, A song A place programme Niels Dueffhues!