Dans 80 minutes, les supporters Français qui ont acheté des places pour la finale de HCup sauront s'ils assisteront à la délocalisation d'une rencontre de la ligue celte, à une finale de top14 une semaine avant la "vraie", ou, plus classiquement, s'ils auront la joie de goûter à une énième confrontation Franco - Irlandaise au Stade de France. En espérant qu'elle se termine aussi bien que celle de février dernier.
Le programme des demi-finales de H Cup mettra donc aux prises les représentants des deux meilleurs rugbys du vieux continent. On a coûtume de dire que le championnat Français est le plus relevé au monde. Sa capacité à accueillir les meilleurs rugbymen de la planète (enfin, ceux que leurs fédérations laissent partir...) lui permet de présenter des effectifs talentueux et pratiquant un rugby efficace, à défaut d'être toujours spectaculaire. L'équipe de France a quant à elle impressionné lors du dernier Tournoi, dominant notamment l'équipe d'Irlande de fort belle manière.
L'Irlande n'a pas, elle, le meilleur championnat du monde, ni les mêmes moyens financiers que son adversaire du jour. Sans parler d'un viviers de joueurs beaucoup moins large qu'en France. Mais les dirigeants de la verte Erin ont mis en place un système leur permettant de tirer le rugby Irlandais vers le haut, en partageant le rugby professionnel entre les quatre provinces du Leinster, du Munster, de l'Ulster et du Connacht. Les deux premières ont remporté les éditions 2008 et 2009 de la H Cup, et se retrouvent en demi-finales.
Une chose est sûre : les deux derniers représentants du rugby tricolore devront employer les grands moyens pour écarter ces deux puissants rivaux de la course au titre européen.
On remarquera que le sort a réservé une double revanche, celle de 2006 qui avait vu le Leinster l'emporter à Toulouse en quart et le Munster souffler le titre à Birritz. C'est également une double opposition marquée par la coïncidence des styles de jeux : l'appétit Biarrot pour la conquête, le jeu au près et le défis physique sera confronté à ce qui se fait de mieux en Europe dans ce domaine depuis plusieurs années. Et le rugby Toulousain, modèle de jeu d'attaque, aura face à lui un Leinster lui-même animé par une ligne de trois quarts et une troisième ligne qui n'hésitent pas à écarter le ballon. Certes, il ne faut pas schématiser, les hommes de Limericks sont capables d'éjecter vers les ailes et les coéquipiers de Brian O'Driscoll n'hésitent pas à aller "à la mine" quand il le faut.
Quelles sont les chances des équipes Françaises ?
On s'interroge, forcément, sur ce Stade Toulousain qu'on veut croire solide mais qui n'a pas la flamboyance de ses années fastes. On est dubitatif pour un Biarritz qui a perdu son joueur Protée, Damien Traille, qui peut évoluer à l'ouverture, au centre et à l'arrière avec un égal bonheur, dont le coup de chausson est aussi efficace pour dégager son camp que pour inscrire des drops, mais dont l'avant-bras est le talon d'Achille (allez comprendre...).
Pourtant, on veut y croire : les Français joueront à domicile et savent recevoir. Même si Anoeta sera sans doute envahi par la "Red army" des supporters du Munster, les coéquipiers de Ronan O'Gara seront sur une terre hostile. D'autant qu'eux-mêmes ne sont pas certains de disposer de l'ensemble de leur arsenal (O'Connell, Flannery et Jean DeVilliers sont incertains). Le nez d'Imanol Harinordoquy a finalement tenu : il jouera dimanche. Et comme Cléopatre, ce nez pourrait bien changer sinon la face du monde, du moins celle de cette HCup riche en rebondissements.
Samedi, le Stadium de Toulouse résonnera des encouragements des supporters rouge-et-noirs, qui auront sans doute à l'esprit le calamiteux quart de 2006. Cette fois, pas question de remettre le Leinster dans la partie : si les coéquipiers de Jean-Baptiste Elissalde le peuvent, ils devront maintenir une grosse pression sur leur adversaire. Et en particulier sur le pack Irlandais, dont il faudra surveiller la troisième ligne comme le lait sur le feu. Elle ne compte plus le redoutable Rocky Elsom dans ses rangs. Mais un Jamie Heaslip n'a pas à rougir de la comparaison. Aussi, prudence. Il faudra également imposer la même pression à la paire O'Driscoll / D'Arcy, qui n'aime pas trop cela (souvenez-vous du comportement de la paire d'Erin face à un duo Jauzon-Bastareaud offensif même en défense lors du dernier Tournoi).
Sur le papier, le Munster et Toulouse sont sans doute favoris de leurs demies respectives. Mais on devrait assister à des rencontres serrées, pour ne pas dire étouffantes. La clé du succès reposera sur quelques détails.
Et même si cela ne réjouirait pas forcément les amateurs de confrontations "traditionnelles" entre équipes de nations différentes, on avouera qu'à peine plus d'un mois après un grand Chelem dans le Tournoi, une finale Franco-française au Stade de France résonnerait comme un bel épilogue pour cette saison internationale 2009-2010.
On compte donc sur les joueurs de Biarritz et du Stade Toulousain pour jouer avec détemination et, surtout, avec une constance retrouvée. Cela ne sera pas de trop pour éviter une double désillusion, et empêcher l'excès de Celtes au festin Parisien du 22 mai prochain.