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Les présidentiables pour ou contre Abu Dhabi

Publié le 04 mai 2007 par Marc Lenot

La culture n’a pas vraiment été au centre des débats dans la campagne pour les élections présidentielles. Rien de neuf. Mais hier le journal Métro a interrogé les quatre principaux candidats (plus Madame Buffet) et leur a en particulier posé la question suivante : “Le Musée du Louvre ouvrira une antenne à Abou Dhabi d’ici la fin 2012. Comment jugez-vous ce système de franchise pour un musée national ? La démarche vous choque-t-elle ?”

Marie-George Buffet répond à côté, posant la question plus large du financement des musées et de la création artistique, que Sarkozy soulève aussi. Sur la forme, Le Pen et Ségo sont choqués par la démarche et par le secret qui a entouré cette décision, ce qui ne semble préoccuper ni Bayrou, ni Sarko.

Par contre, sur le fond, seul Jean-Marie Le Pen se retrouve sur le terrain des opposants au projet en se déclarant lui aussi choqué par cet “appauvrissement du patrimoine artistique français” et en utilisant comme eux le qualificatif “mercantile”. François Bayrou, lui, répond en gestionnaire, appellant à la “vigilance” seulement quant au nombre d’oeuvres prêtées, mais ne critiquant pas l’essence du projet. Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal soutiennent clairement le projet, mettant en avant sa dimension culturelle internationale et le rôle que la France doit jouer.

Pas très étonnant. Cela influera-t-il sur votre vote ? (Le Monde, dans son article d’aujourd’hui sur le programme culturel des candidats, n’aborde pas spécifiquement ce sujet).

Texte intégral des réponses :

Le Pen : Cette démarche me choque pour deux raisons : les conservateurs du musée du Louvre n´ont même pas été informés de cet accord, et elle représente un appauvrissement du patrimoine artistique français, puisque nos œuvres sont laissées en dépôt à Abou Dhabi. Cette opération mercantile illustre la faillite des finances publiques incapables d´assurer la pérennité de nos grands musées. 

Bayrou : Ce qui m’inquiète, c’est évidemment le nombre d’œuvres qui seront concernées puisque contrairement à une idée reçue, les réserves du Louvre ne sont pas si importantes que cela.   Face à la force de frappe financière d’Abou Dhabi, le Louvre saura-t-il résister à des prêts d’œuvres considérées comme essentielles ? Il faudra donc être très vigilant sur ce dossier.

Royal : Le projet du Louvre à Abou Dhabi s’inscrit dans un mouvement plus large d’internationalisation des musées dans lequel la France doit tenir son rang. Mais la décision de vendre la marque Louvre a été prise dans le plus grand secret, avec précipitation et sans concertation avec la communauté des professionnels et des scientifiques. 

Sarkozy : Il y a deux aspects dans cette question. Avec l’antenne d’Abou Dhabi, notre pays participe à un projet collectif qui valorise notre expertise et notre savoir-faire, uniques au monde, dans le domaine des musées. Je suis donc favorable à ce projet. En revanche, ce projet ne doit pas nous interdire de voir que la culture manque de moyens. Que nos grands musées diversifient leurs ressources, c’est très bien. Qu’ils soient à court de financements, c’est regrettable.

Buffet : La solidarité pour l’achat des œuvres des musées est cassée avec l’autonomisation des grands musées nationaux. Les petits musées qui bénéficiaient du succès des grands sont mis en danger. Et cela se fait sans consultation des usagers, des salariés et des conservateurs, très attachés au service public. Il me paraît important de réaffirmer que l’Etat ne peut pas fuir ses responsabilités en matière de soutien à la création culturelle. 


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