a tête au carré, célèbre émission de vulgarisation scientifique sur France Inter, avait lieu vendredi dernier (23 avril 2010) avait lieu au Futuroscope de Poitiers, qui héberge actuellement une exposition Science et Art. Chacun qui lit mon blog habituellement, sait mon aversion pour ce genre de thématique, cette acculturation scientifique par la proximité avec d’autres disciplines, ici l’Art. Chaque scientifique stimule bien évidemment son imaginaire par sa socialité, ses autres contacts avec le monde extérieur, ses goûts. Et il est tout aussi évident que les artistes peuvent voir dans les représentations scientifiques des pistes de création. Ce rapprochement entre l’Art et la Science a tout d’une pratique artificielle, et ne rend compte que de lieux communs et d’approximations. Bref, passons !!
Par contre, une prise de parole m’a attiré l’oreille bien plus que toutes ces comparaisons de représentations scientifiques avec des images d’art. Un des invités, Lionel Simonneau, à la fois chercheur en neurosciences et en didactique des sciences, nous offre une vision étonnante du dogme scientifique : ce dernier est très puissant, mais il empêche le chercheur d’avancer, dès lors que de nouvelles découvertes se produisent. Les controverses se produisent donc forcément contre ces dogmes.
Autrement dit, le dogme se trompe, et comme toutes les sciences évoluent forcément, parfois dans le sang (voire dans la révolution voir Kuhn pour plus de réflexions), le dogme est forcément faux, puisque c’est contre lui que de nouvelles interprétations apparaissent.
Tiens tiens … Un gars en didactique des sciences dit cela. Mais à quoi peut-bien servir ce dogme ? A précisément permettre de travailler contre lui ? Pourquoi pas, mais le dogme est quelque chose de quasi religieux. Lionel Simonneau cite en exemple dans cette interview pas très bien menée le dogme du capital fixe et définitif des cellules nerveuses à l’âge adulte, dogme qui est battu en brèche actuellement (depuis un bon nombre d’années en fait, il faut bien le dire), notamment par la découverte de cellules souches somatiques dans certaines zones du cerveau.Et, de fait, j’ai appris durant mes années de physiologie humaine ce dogme. Cette fixité religieuse qui permet à une vérité scientifique de s’imposer dans un programme d’apprentissage.
Et peut être le rôle du dogme est il précisément de pouvoir affirmer aux yeux du jeune apprenti, écolier, étudiant, que la réalité scientifique est vraie, qu’elle ne supporte aucune contradiction : les programmes scolaires dénient aux disciplines enseignées le droit de pouvoir être des représentations qui doivent pouvoir évoluer, et que c’est le rôle des scientifiques de le faire évoluer, transformer, parfois dans le sang. Un scientifique qui aura grandi, changé, et se sera débarrassé des dogmes, lui aussi …
Une petite remarque : cette photo de cellules souches somatiques n’est pas venue ici par hasard !! Bien au contraire : c’est parce une ou plusieurs personnes recherchaient ces cellules, une représentation différente de la plasticité et de la vie du cerveau, que ces images ont pu être produites. Elles n’étaient pas là par hasard, mais avaient pour but (c’est à dire pour les scientifiques qui les ont produit) de créer la polémique.
Et encore une dernière remarque pour la route : rien de tel de LA photo la plus parlante possible pour « dire » ce fait, l’exposer aux yeux de tous, lui donner l’existence d’une nouvelle vérité : le capital nerveux du cerveau n’est pas immuable. Il s’agit de trouver le support de médiation le plus fort possible. Pour qui savait lire l’image, le monde changeait : une arme redoutable. C’est là que les chercheurs voient dans leur métier des liens avec le travail artistique : changer la représentation du monde. Pour qui croit que c’est également la fonction de l’Art, pourquoi pas … Mais ce n’est pas mon cas.
La tête au carré - 23 avril 2010