Je suis en train de lire le remarquable livre d'Elisabeth Hardouin-Fugier, paru il y a quelques temps déjà, Histoire de la corrida en Europe du XVIIIème au XXIème siècle.
Son érudition impressionnante donne à cet ouvrage une crédibilité inattaquable.
Cherchant comment te faire partager mon goût pour cette lecture, j'ai déniché sur le site de Bellaciao un article épatant, lui-même extrait du site de la FLAC me semble-t-il.
Tout est dit, sur la pulsion sadique centrale qui anime ceux qui vont assister, en payant, au supplice d'un animal préparé pour. Comme est souligné le piment que tout spectacle sanglant apporte à la tension et à la jouissance sexuelles.
Et le rapprochement effectué entre le spectacle d'une exécution publique et la corrida est pertinent à plus d'un titre. Les similitudes sont frappantes.
Voici pourquoi :
"Au moment où est publiée la première codification de la corrida (1796), signée par le matador Pepe Hillo, un secrétaire d’ambassade français, amoureux de l’Espagne, Jean- François Bourgoing, unit dans une même dénonciation la corrida et les exécutions de l’Inquisition "toutes deux tiennent à la barbarie... une vertu chrétienne sert à l’une et à l’autre de motif et d’excuse : par l’une (Inquisition), la foi s’arme de rigueurs contre l’incrédulité ; par le produit de l’autre, (corrida) la charité vient au secours des malheureux : ...est-il nécessaire de dire que l’une est l’Inquisition et l’autre, le combat de taureaux? Sur la foi de cette déclaration et d’autres témoignages, mais aussi grâce à d’excellentes études actuelles sur les exécutions publiques, (R. Bertrand) l’auteur (EHF) montre que la corrida suit exactement le schéma d’une exécution publique.
Les supplices constituent une "valeur ajoutée" à un acte de justice pour l’homme, à une denrée, la viande, pour l’animal.
Les deux "spectacles" déplacent des foules immenses (100 000 à Londres, XVIIIe s.).Chaque étape de l’exécution de justice se retrouve dans la corrida, depuis la préparation cachée (supplices : question/sciage des cornes ; drogues) des condamnés jusqu’à leur mise à mort. On relève : l’isolement des victimes, (en chapelle/en toril), la castration symbolique (cheveux/cornes ), le déguisement (varié pour le condamné, couleur de l’éleveur pour le toro), les "supplices additionnels" en cas de rébellion, (brûlures/ banderilles de châtiment), le retournement du public en faveur du condamné, si le bourreau rate la mise à mort, la clameur de la foule en délire devant les trophées brandies, (tête/ oreilles et queue), la liesse populaire "on boit de la bière de potence".
Rien ne manque à la similitude des violences et des réactions de la foule. Les voyageurs du XVIIIe siècle, allemands, anglais et italiens expriment unanimement leur horreur de la corrida."