Il y a quelques temps je parlais de Bedlam: London and its mad de Catharine Armold. J’avais été tout particulièrement marquée par le chapitre sur les folles dans la littérature victorienne (et si vous me suivez depuis quelques temps vous devez connaître ma prédilection pour les romans ayant pour thème la santé).
C’est donc avec grand intérêt que j’ai découvert la participation de cette auteure à ‘Madwomen in the attic’ (Les folles dans le grenier), une émission de Radio 4 consacrée aux héroïnes de la littérature qui ont influencé et influencent toujours notre vision de la folie au féminin.
Le personnage de Madame Rochester dans ‘Jane Eyre’ est analysé en détails et on y apprend notamment qu’il a sans doute été inspiré par le frère de Charlotte Brontë, Branwell, lui-même fou et toxicomane, enfermé dans le grenier de la maison familiale à Haworth dans le Yorkshire par ‘humanisme’.
Anne Catharick dans‘The woman in white’ de Wilkie Collins est, elle, enfermée dans un asile parce que gênante. C’était à l’époque victorienne le sort de beaucoup de femmes dont le comportement ne correspondait pas aux normes sociales - qui désobéissaient à leur mari ou se lâchaient complètement et demandaient le droit de vote, comme les Suffragettes.
Madame Bovary est un autre exemple de la folie au XIXe siècle. Elle est décrite par les intervenants comme une douce rêveuse, accro au shopping et enfermée à l’intérieur d’elle-même. Flaubert, inspiré par le grand neurologue Charcot et ses théories sur l’hystérie (qui seront à la base des réflexions de Freud), créa un personnage bercé d’illusions qui frise le cas d’école et donnera plus tard naissance au “Bovarysme“, terme aujourd‘hui encore utilisé en psychiatrie.
Les psychiatres de l’ère victorienne sont présentés dans ‘Madwomen in the attic’ comme des romanciers ratés - ce qui m’a plutôt fait sourire. Sans ironie aucune, Vivienne Parry, la présentatrice demande à deux psychiatres britanniques de diagnostiquer Mrs Rochester, Anne Catharick et Emma Bovary.
D’après eux, la première, victime d’un traumatisme due à un déracinement culturel, était très certainement folle. Il lui aurait suffit d'un psy et de quelques séances de parlotte et le tour était joué ! Anne Catharick souffrait seulement à l‘origine, selon nos spécialistes, de difficultés d’apprentissage et l’asile l’a sans doute rendue folle. Quant à Emma Bovary, ils la soupçonnent d’avoir été atteinte de troubles bipolaires ou d’avoir été tout simplement malheureuse. Ils conseillent un passage au confessionnal (vénérable ancêtre de la psychothérapie) qu’elle avait pourtant tenté sans succès auprès du curé Bournisien.
Une émission passionnante dont vous pouvez retrouver les détails ici et l’article de la BBC là.
Source de l'image: Evelyn Nesbit, (1903), photographie de Gertrude Käsebier.