Elle regardait sa vie, ou plutôt ne la regardait pas, de crainte de la voir. N'osait plus après avoir n'osé pas.
Elle vivait avec la permanente sensation de garder les mains sur un couvercle, dés fois que ça saute. Ses doigts en tremblaient, parfois.
Elle imaginait aussi le sifflement que pourrait produire la vapeur, disons cette vapeur là. En était curieuse, aurait bien essayé, pour voir.
Elle songeait également à son crâne, à ce qu'il s'y passait à l'intérieur, éventuellement. A ce qu'il devait s'y passer et pas plus, n'osait.
Elle avait fini par consommer l'idée consumée qu'il est des pensées sur lesquelles il n'est point souhaitable de mettre des mots. Que ça serait comme se brûler. Sitôt venus, ceux-ci s'émoussaient comme émiettés, broyés serait un terme convaincant, elle balayait le visage nettoyant le rivage, d'un revers de main, à la manière dont on chasse un mèche rebelle ou une mouche trop curieuse.
A défaut, ça faisait de l'air. Ca fend la bise. Elle respirait mieux, c'était indéniable.
Et c'est ainsi, et c'est comme ça, qu'elle avançait au fil des jours, ne reculant pas, maintenant la cocotte tant bien que mal, partant courageusement à l'assaut de chaque minute sans se douter une seule seconde qu'au fond, il en fallait du courage pour se coltiner ses cols et ses lacets qui n'en finissaient jamais. Oui, il en fallait du courage.
Elle comparait souvent les femmes à ces vagues qui se tirent et s'étirent le long de la plage, humectant le sable ou s'y jetant avec férocité. Elle se rêvait vent puisqu'elle ne cessait de déclarer et de clamer en silence comme tout cela lui pesait. Tout aussi fort elle estimait cependant que pour rien au monde elle ne changerait de vie. Ne le pourrait pas. Et c'était ainsi. Et c'était sa vie.