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Ils m'énervent avec l'anglais !

Publié le 23 avril 2010 par Lheretique

Dans la catégorie des lieux communs insupportables, il y a l'idée reçue que l'anglais doit être enseigné dès la maternelle. Mon Dieu : mais quelle idée conne, mais conne, putain, c'est pas possible ! Ce qui m'exaspère, c'est de considérer le choeur de bêlements qui prélude à cette propositions d'autant plus idiote qu'elle prend les atours de l'évidence. Et voilà le Crapaud, qui s'y met en coassant de travers. Mieux, ce visionnaire nous propose l'étude du mandarin dès l'école primaire. Ça sert à rien. A rien du tout. Contrairement à ce qu'il écrit, la meilleure manière d'apprendre l'anglais, ce n'est pas d'écouter les conneries en anglais, et de faire de "l'oral" (idée débile et commune s'il en est), mais tout au contraire, d'étudier Shakespeare et de s'imprégner de l'essence de la culture anglaise. Ce qui compte, quand on veut apprendre une langue, ce n'est pas d'aller faire le guignol à l'étranger, mais d'abord d'en connaître le vocabulaire, la structure grammaticale, et la culture. Toutes choses que l'on peut apprendre à l'école, mais que les professeurs d'anglais se gardent bien d'enseigner à leurs élèves (souvent par manque de culture, au demeurant). Non, c'est mieux de leur faire écouter des cassettes à la noix, bien sûr : on appelle ce morceau indigeste un labo de langue. En réalité, même si une absorption d'une langue par imprégnation demeure possible (mais elle n'a rien d'automatique contrairement à ce que s'imaginent nos psycho-linguistes en herbe), apprendre massivement du vocabulaire et des expressions en anglais, par coeur, si nécessaire, est le plus sûr moyen de pouvoir profiter pleinement d'un séjour à l'étranger. Seulement, apprendre des listes et des listes de vocabulaire, puis lire des livres ou écouter des émissions, c'est fatigant ; et puis les cours doivent être ludiques...

Pour apprendre une langue, il faut être capable de produire des équivalences correctes avec sa propre langue et de maîtriser les catégories logiques de la langue de toutes les langues, la grammaire. Donc, l'anglais en primaire, ça ne marche pas, ça n'apporte rien du tout, c'est du flan, et ça va encore bouffer du temps sur l'enseignement de notre langue maternelle, déjà si mal maîtrisée.

Le nec plus ultra, c'est le mandarin : il m'a fait rigoler, le Crapaud. En dehors de la sphère d'influence chinoise, où le mandarin est-il parlé ? le chinois est-il une langue internationale ? Bref, c'est intéressant d'étudier le mandarin, mais pas pour les raisons utilitaristes qu'évoque le Crapaud, qui se plante dans les grandes profondeurs ; pour le compte, les Chinois auront appris à parler en anglais bien avant qu'il ait seulement fait le tour des idéogrammes chinois...

De toutes façons, comme les petits crapouillots n'auront pas étudié la géographie, il essaieront sans doute de parler mandarin aux Inuits, et donc, cela ne leur servira de rien d'avoir étudié cette langue.

En fait, une bonne raison d'étudier le Mandarin, c'est de nous confronter à une culture qui nous est fondamentalement exogène. Or, la culture, c'est exactement ce que le crapouillot écarte pour rationaliser les coûts et son effort. On est là bien dans la doxa ambiante, l'antienne mille fois répétées de cette gauche réformiste et de cette droite moderniste que je rêve de botter des centres de décision qui touchent culture et éducation à grands coups de pied dans le c.. Pas de chance, ils ont pignon sur rue...

Hélas, les quatre autres propositions du Crapaud ne vont pas dans le sens du vent : la gauche libertaire convertie au marché et dont la droite moderniste est l'alliée objective ne laissera jamais ne serait-ce que prononcer la vilain mot sélection tout en plaçant sa progéniture au bon endroit, par ailleurs.

Mais puisque le Crapaud veut une élite (ce en quoi il a raison) qu'il sache qu'il n'y a pas d'élite sans excellence et d'excellence sans culture. La culture est même la marque de l'excellence et le signe d'une société capable de s'élever vers le sublime. Tiens, il me rappelle le Beckford du Chatterton d'Alfred de Vigny, tentant de convaincre le jeune poète de renoncer à la poésie et d'accepter un emploi de valet :

- Ah ! c'est vous qui êtes Thomas Chatterton ? Vous vous amusez à faire des vers, mon petit ami ; c'est bon pour une fois, mais il ne faut pas continuer. [...]

- je ne donnais aux Muses que le temps perdu. Je savais bien ce qu'en dit Ben Johnson : que la plus belle Muse au monde ne peut suffire à nourrir son homme, et qu'il faut avoir ces demoiselles-là pour maîtresses, mais jamais pour femmes.


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