Retraites, environnement, ou sécurité: la débandade sarkozyste

Publié le 21 avril 2010 par Letombe
Sarkozy était misérable en parlant sécurité, mardi à Bobigny. Tout comme Eric Woerth sur la seconde phase de concertation sur la réforme des retraites, Chantal Jouanno sur l'abandon de la taxe poids lourds, ou Claude Guéant, excessivement discret devant la Haute Cour de Justice au procès de Charles Pasqua.


Sarko radote sur la sécurité
Nicolas Sarkozy s’est rendu à Bobigny pour parler … sécurité. Il « installait » le nouveau préfet de Seine-Saint-Denis (
le septième en dix ans !), l’ancien patron du RAID et proche du président français. Sur place, le Monarque a réitéré sa funeste proposition de supprimer les allocations familiales aux parents d’élèves trop souvent absents à l’école. Un projet de loi sera présenté la semaine prochaine. Toujours dans un rôle, désormais peu crédible, de « père fouettard », Sarkozy a également annoncé la création, à la rentrée prochaine, d’internats pour élèves difficiles, des établissements spécialisés pour accueillir les élèves de moins de 16 ans «qui rendent la vie impossible» au sein de leur établissement. Et si les parents refusent de scolariser leurs enfants, ils seront trainés en justice !

Les propos du président n’ont pas surpris. Sarkozy ressort toujours la même rengaine sécuritaire (« fermeté absolue », « action en profondeur »), sans plus d’effet que les précédentes. L'insécurité violente contre les personnes progresse, les moyens de la police et de la gendarmerie régressent. Sarkozy n'a de sécuritaire que le discours, pas les actes. Il n’y avait qu’un représentant CGT des chauffeurs des transports publics locaux pour se déclarer satisfait de ces « nouvelles » promesses. Il faut avouer que Sarkozy l'avait caressé dans le sens du poil en déclarant : « vous avez décidé d'exercer votre droit de retrait, je peux le comprendre». Il ne manquerait plus qu'il ne comprenne pas ... Sarkozy s'est même permis d'annoncer des mesures... déjà en place. Ainsi la radiolocalisation des bus, déjà effective sur 2 100 bus depuis 2007, et prochainement sur 1 932 supplémentaires, sur un total de 4 000 en Ile-de-France.
Nicolas Sarkozy n’use pas de la même sévérité, ne serait-ce que verbale, à l’encontre de la délinquance financière ou fiscale. Rappelons-nous que le gouvernement a laissé près d’une année de clémence aux exilés fiscaux pour qu’ils régularisent leur situation auprès du fisc français avant le 31 décembre. Rappelons-nous aussi la réduction des délais de prescription initialement prévue dans l’avant-projet gouvernemental de réforme de la procédure pénale concernant les abus de biens sociaux (sur ce sujet, Michèle Alliot-Marie a finalement reculé
ce mardi). Deux poids, deux mesures, deux justices. A Bobigny, Sarkozy a joué de sa grosse voix :  «Tous les jours, il y aura des actions de police contre les trafics et les trafiquants. Vos lignes de bus seront sécurisées», «Aucun quartier de Seine-Saint-Denis n'échappera à l'autorité de la loi». «Je tiens à ce que les forces de police interviennent sans restriction, aussi souvent que nécessaire et marquent leur autorité dans les halls d'immeuble des cités touchées par la délinquance».
Et si les Français tenaient à ce que les forces de police disposent de moyens décents, et que les banlieues disposent de véritables programmes de réhabilitation urbaine ? Fadela Amara pointe aux abonnées absentes. Son grand plan Espoir Banlieue est mort-né.
En 2007, Sarkozy s'écriait : «Je conduirai un plan d'urgence pour l'éducation qui divisera par deux le nombre d'élèves des établissements les plus en difficulté. Services publics, transports en commun, commerces de proximité seront réinstallés dans les quartiers. Je permettrai aux habitants du parc HLM de racheter leur logement afin de se réapproprier la vie de leur quartier. Si je suis élu je mettrai en œuvre un grand plan Marshall de la formation pour tous les jeunes de nos quartiers, pour qu’aucun ne soit laissé de côté, pour que chacun puisse tenter sa chance, pour que chacun ait un emploi.» Trois ans plus tard, où sont les résultats ?
Guéant se minimise dans l'affaire Pasqua
A Paris, le secrétaire général de l’Elysée passait au tribunal. Claude Guéant était appelé à témoigner au procès de Charles Pasqua devant la Haute Cour de Justice. A l’époque des faits reprochés à Pasqua – l’attribution de casinos à des proches de l’ancien ministre de l’intérieur- Claude Guéant était directeur adjoint au cabinet de Pasqua. Le « Vice-président de Sarkofrance » n’est resté que 15 minutes devant la Cour. Ses réponses furent laconiques, et jamais contestées ni les questions relancées : en signant l’agrément du casino d’Annemasse contre l'avis de la commission des jeux, il n’a fait qu’obéir aux ordres ; et non, ce n’est pas normal si les fiches de renseignements des RG sur les propriétaires du futur casino ont disparu.
Le même jour, un autre témoin, un commandant de police, s'est exclamé: «On sentait bien que ce dossier était téléguidé, qu'il devait passer. Je n'ai jamais vu ça en 15 ans aux jeux».  Claude Guéant n'avait rien à dire sur cette célérité. Et personne n'a insisté.
L'UMP se masque dans la réforme des retraites
Eric Woerth, ministre du Travail, a débuté la seconde phase de la "concertation" sur la réforme des retraites. Sur les retraites, les syndicats sont pessimistes. L’UMP donne des gages. Après la publication d'un rapport alarmiste et fantaisiste du Conseil d'Orientation des Retraites, Eric Woerth a écrit à tous les partis politiques (sauf le NPA) pour leur demander leur avis et positions. Aucune étude sur la répartition des prélèvements n'a été commandée. Le sujet n'est toujours pas sur la table. Le ministre a d'ailleurs rappelé
dimanche la position gouvernementale : «Nous aurons probablement des actions ciblées d'augmentation à un moment donné (des prélèvements NDLR) de tel ou tel revenu, tel ou tel revenu du capital ou tel ou tel salarié, etc., (et une) suppression de niches fiscales»...  Mais il a écarté toute hausse des impôts ou augmentation générale des cotisations retraite.
Les conclusions du COR est été largement instrumentalisées par la droite. Comme le rappelle le
rédacteur en chef d'Alternatives Economiques, le COR a d’abord précisé que la crise économique a aggravé de 20 milliards d’euros les comptes de l’assurance vieillesse. Seconde conclusion, à l’exacte opposé de la position du camp UMPiste, le rétablissement des comptes ne pourra pas être obtenu par un simple ajustement des trois variables habituelles (montant des pensions, âge de départ et durée de cotisations). Une hausse des prélèvements est inévitable.

Le même jour, Xavier Bertrand (UMP) répétait les mêmes messages, tentant de jouer l'ouverture : «nous ne voulons pas être rigides». L'UMP a prévu une conférence sur le thème des retraites dans ... un mois. Le parti présidentiel a choisi de faire du recul de l'âge légal de départ à la retraite son cheval de bataille : «Puisqu’on vit beaucoup plus longtemps, il faut accepter de travailler un peu plus longtemps, en tenant compte, par exemple, de la situation des mères de famille et de la pénibilité de certains métiers.» Tiens ? L'UMP est prête à prendre en compte la pénibilité des carrières... Non, rassurez-vous. Pour Xavier Bertrand, «il faudra prendre en compte la pénibilité de certains métiers sans pour autant créer de nouveaux régimes spéciaux». Jean-Pierre Raffarin a aussi précisé que la pénibilité était un « point clé ». Mais comme son confrère Xavier Bertrand, il récuse les pistes d’élargissement de l’assiette de cotisations prôné par l’opposition et les syndicats : « quand vous cherchez 70 milliards, vous voyez bien que la décision n'est pas à la hauteur ». Il ne souhaite pas non plus que « ce ne soit pas des métiers tout entiers » qui soient concernés. L’UMP tente d’individualiser au maximum la question de la pénibilité des carrières. Elle promeut l’anecdote contre la généralité, pour mieux botter en touche. On attendra avec impatience la proposition miraculeuse qui prévoira, sans le dire, un régime spécial pour les carrières pénibles.
Borloo recule sur la taxe poids-lourds
Autre déception pour les partisans du Grenelle de l’Environnement,
le report de la taxe spéciale sur les transports en poids lourd. Le gouvernement s’abrite derrière une complexité technique. La voici reportée à 2012… année électorale. Elle devait concerner les camions à partir de 3,5 tonnes, pour un montant compris entre 0,025 et 0,20 euro par kilomètre. Les collectivités locales devaient ainsi récupérer 1,3 milliards d’euros de recettes fiscales.
Crise volcanique oblique, Chantal Jouanno a dû s'exprimer, comme son ministre de tutelle. Il est toujours curieux d'entendre une secrétaire d'Etat à l'Ecologie venir défendre le transport aérien. Elle voulait rassurer,
sur France Inter, les passagers bloqués par ce fichu nuage de cendres islandais. Sur le report de la taxe poids lourds, Mme Jouanno a dû jongler.
Ami sarkozyste, où es-tu ?
Sarkofrance