Le gouvernement kiffe les jeunes sur Skyblog

Publié le 21 avril 2010 par H16

Si le ridicule était une friandise acidulée, le gouvernement français serait maintenant une multinationale du bonbon puissante et prospère. C’est partagé entre la joie de faire profiter d’une telle sucrerie et la douleur de constater l’abêtissement toujours plus profond de nos « élites » que je suis tombé sur cet article du Monde, qui nous fait découvrir la dernière lubie des politiciens en matière de communication festive et citoyenne.

En gros, il s’agit – pfff soupir – d’une nième – pfff gros soupir – tentative à un million d’euro – pfff gros gros soupir – de la part des politiciens pour endoctriner capter l’attention des futurs électeurs et tenter de décrypter ce qui se passe dans leurs têtes.

Tout est , et ce tout est à la fois vaste par son abrutissante bêtise, et maigre par son intérêt réel.

Comme on peut le constater, c’est un véritable festival d’idées lumineuses, de dépenses goulues et d’innovations communicationnelles vibrantes et éclairées.

Au milieu des sondages époustouflants d’intérêt pour pouvoir, ensuite, établir une ligne directrice pour cette République qui (comme je le remarquais dernièrement) va creuser très profond sans reculer d’un millimètre, on trouve comme on pouvait s’y attendre

  • de l’écologie pudiquement rebaptisée « Planète » pour ne pas faire trop baba cool,
  • de l’Europe et de l’international, parce que tous ensemble, tous ensemble toussssenssemble yeah !
  • des activités, de l’argent de la famille,
  • de la sécurité, hein, parce que c’est important m’ame Julie la sécurité
  • et bien sûr, du VIVRE ENSEMBLE qui est au site internet institutionnel ce que le papier collant est à la mouche.

Surprise, il n’y a pas d’espace « Poncifs ». Ils auraient dû, il aurait été plein.

Au passage, il y a mêmes des petites photos pimpantes, présentant les cautions habituelles pour éviter les foudres des minovités risibles. Mais bon, c’est de bonne guerre, on ne va pas faire un joli site aux couleurs fraîches et – comme les friandises de l’intro – acidulées sans y coller de bêtes images d’un Jean-Edouard en blazer et d’un Kevin encapuchonné histoire de balayer tout le spectre des possibles…

Gouverner c’est prévoir, c’est à dire voir au loin.

Ici, en fait de « voir au loin », on regarde des « jeunes » au microscope, et on se rend compte assez vite que l’échantillon frétillant qui vient s’épancher sur le site n’est pas spécialement doué pour se projeter dans le futur, a une mémoire de poisson rouge et une culture générale proche de zéro, le tout dans un langage qui confine aux premiers moments de la rencontre de Tarzan avec Jane.

Si l’on y ajoute une finesse d’analyse et une capacité de raisonnements logiques médiocres – mais pas anormale compte-tenu de la tranche d’âge visée – on comprend que le million d’euros dépensé par le gouvernement dans cette « étude » est encore une fois un paquet d’argent dépensé en pure perte : si nos élites gouvernent un jour en tenant compte du babil rigolo mais stérile qui s’élève de cette tentative, on doit s’attendre à de cruelles déconvenues.

De toute façon, on ne devrait même pas gouverner un pays en prenant l’avis de gamins. Et c’est ce qui agace le plus, cette démarche employée et assumée (dixit Claire Bevierre, du Service d’Information du Gouvernement) qui consiste à parler comme un gamin au jeune qui vient sur le site. En retour, l’internaute répond aussi façon Minimum de Bande Passante Intellectuelle, et un dialogue kikoolol entre deux adolescents s’instaure alors, oscillant entre un SMS Pnibl a déchifRé et du l337 $p34k qµ4$1 h1ér09l¥ph1qµ3.

Le souci évident de la manœuvre est que l’un des deux pré-pubères dispose de la bombe atomique, du pouvoir de lever des impôts et faire pleuvoir la misère sur le peuple, et que l’autre deviendra un jour électeur du premier en n’ayant jamais vraiment eu de conversation sérieuse et argumentée, en Français structuré, construit et compréhensible, depuis l’école (ou le procédé d’infantilisation du discours est déjà en marche depuis longtemps) jusqu’à son premier emploi (de plus en plus tard et de plus en plus rare).

Il est bien loin le temps où, dans les administrations et l’Education Nationale, le ton naturel était au vouvoiement dès les premières velléités d’obtenir une carte d’identité ou n’importe quel papier administratif officiel lorsque le jeune commençait à s’inscrire dans la société des adultes.

À ce rythme, le diplôme du bac, sur lequel on pourra lire « Trop Génial le keum : t’as ton bac, t’es un cador, et maintenant tu peux tenter Paul Employ« , sera distribué sous blister flashy avec un autocollant orange fluo « Vu À La Télé ».