Bonne question ! Comme la poser c’est y répondre, voici ce qu’écrit Richard Dawkins dans son passionnant ouvrage intitulé « Il était une fois nos ancêtres » :
Sans les rongeurs, le monde serait complètement différent. On a moins de chances de
voir un monde sans rongeurs qu’un monde dominé par les rongeurs et sans êtres humains. Si une guerre nucléaire détruit l’humanité et la plus grande partie du reste de la vie, il y a fort à parier que ce qui survivra à court terme, et qui aura une descendance évolutive à long terme, ce sont les rats. J’entrevois comment sera le monde au lendemain de cette apocalypse. Avec tous les autres gros animaux, nous aurons disparu. L’ère des humains ayant pris fin, les rongeurs apparaîtront en suprêmes charognards. En grignotant, ils se frayeront un chemin vers New York, Londres et Tokyo, dévorant le contenu des garde-manger éventrés et des supermarchés fantômes ainsi que les cadavres humains qu’ils transformeront en nouvelles générations de rats et de souris, dont les populations rivales exploseront en dehors des villes et jusque dans les campagnes. Quand tous les restes de la surconsommation humaine auront été engloutis, les populations s’affronteront à nouveau et les rongeurs se retourneront les uns contre les autres, et contre les blattes qui se repaîtront avec eux.
Dans le cadre d’une féroce compétition, le processus de l’évolution s’accélérera avec le rapide renouvellement des générations, la radioactivité renforçant peut être les taux de mutation. Avec la disparition des bateaux et des avions des humains, les îles redeviendront des îles, avec des populations isolées à part d’occasionnels phénomènes de dérive en radeau : les conditions idéales pour une divergence évolutive. En l’espace de 5 millions d’années, une gamme complète de nouvelles espèces aura remplacé celles que nous connaissons. Des troupeaux géants de rats herbivores seront traqués par des rats prédateurs à dents de sabre.
Avec suffisamment de temps, une espèce de rats intelligents et cultivés finira-t-elle par apparaître ? Est-ce que des historiens et scientifiques rongeurs vont en fin de compte organiser des fouilles archéologiques méthodiques (par grignotage) à travers les strates de nos villes compactées depuis longtemps, pour reconstituer les circonstances particulières et temporairement tragiques qui ont fourni une chance exceptionnelle à la gent des rats ?