La somme des connaissances mises aujourd'hui à notre disposition d'un simple clic est infinie. Elle dépasse de beaucoup nos capacités d'assimilation, même pour un domaine technique relativement restreint. C'est une bibliothèque labyrinthique et tentaculaire qui se déploie, jour après jour. Un vertige borgésien.
Cette somme, à la fois disponible et insondable, est une représentation du savoir inédite – l'homme du XXIeme siècle aura eu la primeur de ce défi qu'il inflige à sa propre intelligence. La situation fait songer à ces contes dans lesquels un homme se trouve doté par une divinité facétieuse du pouvoir d'exaucer trois vœux. Ceux-ci sont tellement mal choisis, qu'ils s'annulent, ramenant le héros malheureux à sa situation initiale. Le rêve d'une bibliothèque absolue a trouvé forme dans le réel avec Internet. Et cependant il s'agit aussi d'une vaine tentation puisque aussi bien ce savoir nous échappe et nous confronte simplement à nos limites.
Une révérence peut nous saisir devant ce puits sans fond, supposé contenir toutes les vérités répertoriées. A quoi bon inventer, à quoi bon réfléchir, en soi, pour soi, dès lors que la démonstration est faite que tout a déjà été fait, écrit, pensé, publié. A quoi bon prétendre apporter sa pierre à un tel édifice?