Tout le monde aime Luc Besson. D’une manière ou d’une autre, sa filmographie iconoclaste (du premier film en noir et blanc aux films sous marins, dans l’espace ou en pleine guerre de religion…), son sens des affaires et de la production, sa société de production/distribution… L’homme est le matador du cinéma français, toujours en avance et redoutable d’efficacité. Bref, Luc Besson est le premier dans le hit parade du cinéma français, et son seul tort est d’avoir proclamé qu’il ne ferait que dix films. Voici son 12e.
Et pour le coup, monsieur Besson se lance dans l’adaptation d’Adele Blanc Sec. Car non content d’avoir signé avec Glénat pour de futures adaptations de leur catalogue, le réalisateur décide donc de se retrousser les manches pour raconter les aventures de l’héroïne de Tardi. Ou celles d’une jeune journaliste intrépide, mix entre Indiana Jones et Rouletabille, qui s’enfonçe dans les problèmes et les mystères au gré des années 1910… Epoque oblige, la reconstitution est dantesque. Plus parisien qu’autre chose, le film tourne autour de ces figures connues (Tour Eiffel, Champs Elysées, Louvre…) à la poursuite d’un ptérodactyle ou d’une momie en fugue. Les amateurs du genre et d’histoire seront ravis, on rassemble plusieurs influences (l’égypte, les dinosaures, le Paris du début du XXe siècle) dans un fratras de sciences et de magie pour mieux dynamiser l’histoire, servi par une Louise Bourgoin qui ne démérite pas pour son premier vrai rôle.
Et pourtant, on aurait aimé en voir davantage. Si Besson tisse un canevas relativement fidèle des aventures d’Adele Blanc-Sec, c’est sans s’autoriser trop de facéties, laissant le récit flirter avec de vrais risques. Dans tout ça, l’accumulation de dialogues ou de voix off alourdit le récit, entremêler d’un amoncellement de personnages à la Amélie Poulain qui tentent tous d’exister à part égale sans vraiment y arriver. Mention spéciale à Mathieu Amalric peu présent (mais semble t-il présent dans les suites, donc il peut s’agir d’une simple introduction), d’un Gilles Lellouche peu utilisé, d’un Rouve de passage… Seule Bourgoin a donc un vrai rôle, comme le fait à chaque fois Besson pour son actrice principale. Il n’est d’ailleurs pas étonnant de le voir filmer les aventures d’une femme en avance sur son temps, et de caractère. Hormis quelques effets spéciaux de mauvaise facture (oui, bon, le ptérodactyle chevauché par Blanc Sec…), le film se montre relativement fiable sans pour autant briller. Filmant surtout ces personnages, ce blockbuster à la française reste un objet hybride, adaptation d’une bande dessinée tentant de tout recaser, sans prendre la distance par rapport à son matériel d’origine pour en faire une vraie épopée féminine. Car c’est un peu ça aussi le passage sur grand écran dans ces cas là, c’est réinventer à sa sauce les scènes, tout en conservant l’esprit du créateur d’origine. A ce petit jeu, Luc Besson n’est pas maladroit, mais évite les à côtés trop dangereux. On commence malheureusement à s’habituer à ce manque de risque.