Congratulations
Columbia
États-Unis
Note : 6.5/10
Après la réussite précoce d’un premier disque, certains artistes et musiciens souffrent d’un syndrome mal connu, l’Alpha Asia. Cette psychose a été découverte en 1983 lorsque le groupe rock Asia a délivré son deuxième opus, un album minable intitulé Alpha, qui faisait suite à un disque éponyme vendu à 400 millions d’exemplaires. Les musicologues l’ont constaté, l’Alpha Asia est visible chez les artistes incapables de reproduire le succès de leur premier disque. L’une des majeures conséquences du syndrome est la conception d’albums médiocres qui déçoivent et dégoûtent les auditeurs.
Quelques groupes affectés par l’Alpha Asia ont tout de même réussi à survivre au syndrome. Par exemple, Room on Fire des Strokes et dernièrement, Contra de Vampire Weekend ont été des suites intéressantes aux premiers opus de ces musiciens.
Qu’en est-il de MGMT? Le groupe a été graduellement propulsé au succès à la suite de son premier disque, Oracular Spectacular. Sacré par le Rolling Stone Magazine comme le 18e meilleur album de la décennie et le meilleur disque de 2008 selon NME, le duo de Brooklyn revient avec plein de promesses en 2010 avec Congratulations. L’équipe de Feu à volonté a écouté le dernier disque des chanteurs de Kids en primeur le mois dernier, lors d’une promenade automobile sur le Mont-Royal avec les relationnistes de Sony. À cette première écoute, notre équipe s’est montrée divisée sur la question de la qualité des pièces. Un mois plus tard, les opinions n’ont toujours pas changé. Congratulations n’est pas un album qui fait l’unanimité, il ne reprend pas la formule qui a fait le succès d’Oracular Spectacular et ses neuf morceaux qui le composent ne prennent jamais de direction particulière, sauf si ce n’est qu’ils vont partout à la fois.
Le premier morceau, It’s Working, est une suite idéale aux paroles de la pièce The Handshake qui figurait sur le premier disque du groupe. Le chanteur Andrew VanWyngarden chante et élabore sur les effets de la drogue dans une ambiance psychédélique. On peut même entendre quelques passages qui rappellent l’innocence qui parcourait Oracular Spectacular. Les comparaisons avec le premier album s’arrêtent pourtant là, puisque la suite du disque s’engouffre dans une orgie de textures musicales qui s’enchaînent l’une par-dessus l’autre sans jamais se simplifier. Ce n’est pas compliqué, à défaut de n’avoir fait que neuf pièces, MGMT a synthétisé quinze chansons dans chacune de ses pistes. Le premier simple Flash Delirium souffre de cette hétérogénéité. Le morceau pourrait pourtant être excellent, si ce n’était qu’il ne s’arrête jamais pour développer ses meilleurs passages.
La pièce avec le titre le plus loufoque, Lady Dada’s Nightmare, est un morceau instrumental de quatre minutes qui laisse toute la place au délire ingénieux du groupe. Mélangeant une trame de piano mélancolique à des cris humains dans une progression dramatique, cette pièce représente probablement le moment le plus « étrangement bien » du disque.
Le duo de Brooklyn dit ne s’être donné aucune pression lors de l’enregistrement de Congratulations, mais on sent bien que le syndrome d’Alpha Asia a été présent lors de l’enregistrement. Non pas dans l’esprit du groupe, mais bien évidemment dans l’esprit des auditeurs qui s’attendent à un produit semblable à Oracular Spectacular. MGMT ne répond donc pas aux attentes, mais il ne déçoit pas non plus puisqu’il prépare la table pour les prochains disques. En espérant que ces derniers mélangeront la complexité et la recherche de Congratulations à l’homogénéité d’Oracular Spectacular.