Attention quand on touche à Rimbaud, quelque chose de viscéral se manifeste et la tension monte à la vitesse grand V. Souvenez-vous de ce poème inédit retrouvé en mais 2008, intitulé Le rêve de Bismark, et que le poète aurait écrit alors qu'il n'était vraiment pas très vieux. Le texte fut publié dans le journal Progrès des Ardennes, le 25 novembre 1870.
Eh bien peut après, un certain Raphaël Zacharie de Izarra en revendiquait la paternité, jurant qu'il s'agissait d'un authentique faux qu'il avait construit de toutes pièces. Depuis, plus vraiment de nouvelles...
Alors quand sort une photo de Rimbaud adulte, soudain, on se gratte le menton... Il se tient assis, sur le perron du Grand Hôtel de l'Univers, lors de son séjour à Aden, en Abyssinie. Il a quitté la plume et le vers autant que la prose, et revêtu ses habits de trafiquant d'or, de diamants, d'armes, qu'importe...
Deux libraires en vadrouille, Alban Caussé et Jacques Desse, farfouillaient des stocks de photos anciennes dans une brocante dont le nom restera secret. Secret tout autant le montant de l'achat de cette photo. Et pourquoi l'avoir achetée ? Parce qu'elle était frappée de ces mots Hôtel de l'Univers. Et que Rimbaud a vécu à Aden. Si les éléments chronologiques semblent aller en leur sens, il faut encore confronter, vérifier, traquer la vérité...
Et c'est évidemment vers Jean-Jacques Lefrères qu'ils se tournent pour vérifier que leur pressentiment n'est pas irrationnel. « Si, en tenant compte de l’évolution de l’enfance et de l’adolescence à l’âge adulte, on compare le visage de ce personnage avec celui de Rimbaud sur la photographie que Georges Izambard, son professeur de rhétorique, trouvait la plus ressemblante — c’est-à-dire le moins connu des deux clichés portant la marque de Carjat —, l’identité des traits est troublante, pour ne pas dire flagrante. »
Mais ce n'est pas tout, Rimbaud s'était installé quelque temps dans cet établissement, où tous les Européens venaient séjourner. Cela fait beaucoup.
Et de conclure avec Jacques Desse :
Comme dans Coin de table de Fantin-Latour, où il figure à côté de Verlaine, Rimbaud apparaît ici parmi des « assis » d’Aden. Contrastant avec les trois autoportraits du solitaire de Harar, qui s’est mis lui-même en scène, debout et dans une attitude digne et fière, les deux portraits d’Aden le montrent en société, mal à l’aise, infiniment plus seul que quand il est solitaire. Sur l’image du perron de l’Hôtel de l’Univers, il est assis mais semble sur le point de se lever. Tout son être paraît protester contre son intégration à ce rituel bourgeois de la séance du portrait de groupe, auquel, pourtant, il n’échappe pas. Il ne considère que le spectateur, comme en une muette interpellation, qui n’attend pas de réponse. Il nous regarde, il n’a rien à nous dire.
On pourra retrouver le récit de cette aventure sur Histoires littéraires.
LES COMMENTAIRES (1)
posté le 21 avril à 15:12
Le divin Arthur n'a pas fini de faire fantasmer dans les chaumières.
Au delà des images et du mythe, j'en garde ses pages incandescentes et son héritage que quelques uns ont su maîtriser: Pierre Michon, Léo Ferré ou encore Benjamin Flao et Christophe Dabitch en BD.
On n'a pas tout dit sur Rimbaud.