Made Flesh reprend la même formule cronenbergienne que son prédécesseur, à savoir de longues frises bruitistes et des vocalises moyenâgeuses – croisement improbable entre Gentle Giant et This Heat. La grande différence est qu'aujourd'hui il n'y a plus d'effet de surprise, plus de dictature de l'originalité, et que le choc initial est remplacé par un plaisir plus identifiable, plus humain en définitive. Extra Life ne cède rien sur sa singularité mais orne ses compositions de manière plus abordable : plus grande variété des instruments (synthés glaciaux, cordes, cuivres), des structures, des registres vocaux, Made Flesh est un disque qui a plus de souffle, qui respire mieux. Et qui s'écoute donc d'une traite avec un plaisir sans cesse renouvelé – ce qui au départ n'a rien de gagné. En fait, malgré son anomalie de structure, quasi génétique, Made Flesh se construit sans repli autistique. Il se déplie avec une réelle envie de partage et de communion. Oh nous n'allons tout de même pas parler de pédagogie, mais enfin, il n'y a pas d'élitisme et cela ne passe même pas par le ressort de la vulgarisation. Peut-être que, tout simplement, Extra Life est en train de devenir un groupe majeur, à l'identité folle et aux capacités de rassemblement des plus grands. Car après tout, quel est l'intérêt de la plus pointue des avant-gardes si elle ne peut pas faire trace, et si elle ne s'adresse qu'à un cercle de savants des plus faméliques ?
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