Je vous avais parlé des éditions Dédicaces il y a quelques temps dans ce billet, car j’avais envie de donner un peu la parole à un éditeur qui me semblait avoir une démarche différente, et tournée vers les ebooks.
Guy Boulianne, le PDG et fondateur, a bien voulu répondre à mes questions, sans langue de bois.
Prix des ebooks par rapport au papier, impression à la demande, comment être édité, l’importance de l’éditeur aujourd’hui, les nouveaux lecteurs et l’impact de l’iPad, les réseaux sociaux… vous saurez tout.
Pour plus de confort, vous pouvez aussi consulter ou télécharger la version PDF, et la relire dans un format plus adapté ou sur votre lecteur d’ebooks.
Bonjour, Guy. Vous êtes le Fondateur et le PDG des éditions Dédicaces, une maison d’édition qui a la particularité de s’investir réellement dans l’internet, les réseaux sociaux, mais aussi dans les ebooks. D’où vient cette modernité dans votre approche ?
Guy Boulianne : Personnellement, j’ai toujours cru en la force de l’internet. La vitesse de l’information est aujourd’hui décuplée grâce aux nouvelles technologies. Les entreprises doivent s’adapter sans faute à ce nouveau mode de fonctionnement qu’est l’utilisation de l’internet et des nouvelles plateformes de diffusion, sans quoi elles risquent de disparaître prématurément.
Les éditions Dédicaces utilisent avec force les différents réseaux sociaux comme LePost, YouTube, Twitter, Facebook et Frienfeed. Nous avons automatisé notre processus de diffusion, réduisant à son strict mimimum le travail à effectuer. Lorsque nous publions une actualité sur notre blogue officiel, un article sur LePost ou bien encore une vidéo, l’information est automatiquement reprise par Facebook, Friendfeed et Twitter (pour ne nommer que ces réseaux). De plus, grâce aux fils RSS, nos différentes actualités se retrouvent automatiquement chez Netvibes, CoZop, NeOOws et Paperblog. Nous rejoignons quotidiennement des milliers de gens sans aucun effort particulier.
Vous êtes une maison d’édition à taille humaine, et qui propose une vraie proximité avec les auteurs. Pensez-vous que l’avenir est à ce type de structure, à l’heure où l’image des grands éditeurs ne cesse de se dégrader ?
Guy Boulianne : Je crois que les gens en ont assez des grandes structures qui n’offrent pas un service vraiment personnalisé. Encore une fois, nous vivons à une époque où les gens ont besoin de rapprochement. Un auteur ne veut plus attendre 6 mois, voire un an ou plus pour savoir si son manuscrit sera publié ou non. Il souhaite obtenir une réponse assez rapide, tout en respectant le délai minimal imparti à l’éditeur pour prendre connaissance de l’ouvrage d’une façon adéquate et professionnelle.
Sans jouer le rôle d’un agent littéraire, la maison d’édition Dédicaces se fait un devoir de répondre rapidement aux différentes questions de ses auteurs.
Pourquoi d’après-vous les maisons d’édition sont elles si réticentes, surtout en France, à passer à l’ebook ? Quelles sont les véritables peurs des éditeurs ?
Guy Boulianne : Je ne comprends pas cette réticence des éditeurs face au livre électronique. En quoi le ebook peut-il nuire au livre en papier ? C’est la question que je me pose sérieusement. Le ebook n’est qu’un atout supplémentaire qui permet de promouvoir une oeuvre à une échelle beaucoup plus importante. Un éditeur qui travaille réellement pour le bénéfice de ses auteurs ne peut pas se permettre de négliger la mise en marché de leurs oeuvres au format électronique. Ce serait un non-sens.
Vous proposez les ebooks à 50 % du prix papier. C’est la demande exacte que fait le grand public en termes de prix. Pourquoi ne résistez-vous pas, vous aussi, à la baisse des prix ?
Guy Boulianne : Pourquoi résister ? Cette décision de vendre les livres au format électronique à 50 % du prix papier a été prise dès la création des éditions Dédicaces il y a un an. Pour nous, il serait illogique de vendre les deux formats à un prix égal, puisque l’effort et l’investissement requis pour la mise en marché du ebook sont quasiment nuls, contrairement au livre en papier qui exige beaucoup plus de dépenses et d’intermédiaires, que l’on songe à l’imprimeur ou encore au distributeur. Le ebook, quant à lui, est délivré au client sans aucun effort grâce au téléchargement en ligne.
Il est à noter que les éditions Dédicaces remettent une redevance plus importante aux auteurs sur la vente des ebooks. Celle-ci est de 20 % alors que le droit d’auteur pour le livre en papier est de 10 %. Cette baisse du prix de vente du ebook ne nous empêche donc pas d’avantager nos auteurs.
Quelle est la part des ebooks aujourd’hui dans votre activité et dans votre stratégie ?
Guy Boulianne : Les livres électroniques prennent désormais une part presque aussi importante que le livre en papier dans la stratégie de notre entreprise. Évidemment, nous ne négligeons pas le livre en papier puisque celui-ci a une valeur très sentimentale, autant pour l’auteur que pour le lecteur. Par contre, nous croyons que le livre électronique deviendra le support préféré des lecteurs dans un avenir assez rapproché.
Les jeunes gens de la génération montante préféreront de beaucoup apporter leurs bibliothèques complètes dans leurs liseuses électroniques comme le Kindle ou le iPad, que d’apporter seulement quelques livres déjà très lourds. De plus, il faut le dire, le livre en papier devient quasiment désuet par son côté unidimensionnel. Au contraire, grâce à une liseuse comme l’enTourage eDGe, le lecteur pourra à la fois lire un livre, consulter les journaux, naviguer sur l’internet, prendre des notes, enregistrer la voix et écouter de la musique… et tout ceci sur un seul appareil très léger.
Nous souhaitons donc prendre de l’avance sur nos concurrents en investissant dans le futur. Nous vous rappelons que les éditions Dédicaces sont l’une des seules maisons d’édition francophones à offrir des livres en français pour la liseuse Kindle de Amazon, et bientôt pour la liseuse enTourage eDGe
Nous ne devons pas faire abstration de cette nouvelle technologie qu’est le ebook.
Les éditions Dédicaces ne proposent pas que des ebooks, bien entendu. Le choix de l’impression à la demande semble être un choix d’avenir, écologique autant que financier. Quels sont les avantages de l’impression à la demande pour les éditeurs aujourd’hui ?
Guy Boulianne : Évidemment, nous sommes principalement un éditeur de livres au format papier et nous utilisons l’impression à la demande pour réaliser nos travaux d’édition.
Tout comme le livre électronique, l’impression à la demande révolutionne le milieu de l’édition. Nous en obtenons plusieurs avantages. Tout d’abord, cela nous permet d’optimiser notre trésorerie en évitant de dépenser de grandes sommes d’argent pour un tirage de 1000, 2000, 5000 exemplaires. Cela évite aussi de grandes pertes financières puisque, la plupart du temps, un très fort pourcentage d’un tirage conduit le livre vers le pilon, c’est-à-dire à la destruction des invendus.
L’utilisation de l’impression à la demande est donc très avantageuse puisque nous imprimons le livre à l’unité (ou en quantité) lorsqu’il y a une vente seulement, évitant tout gaspillage tant au niveau financier qu’au niveau matériel, sans oublier bien sûr l’économie que nous réalisons au niveau environnemental.
Que pensez-vous de l’iPad pour la lecture d’ebooks, en tant qu’outil d’une part, et en tant qu’opportunité pour les éditeurs ? Les 600.000 téléchargements d’ebooks le premier jour sont-ils selon vous le signe d’une démocratisation de l’ebook ?
Guy Boulianne : Nous croyons que le iPad est l’une des liseuses les plus performantes sur le marché actuellement, tant du point de vue ergonomique que pour ses multiples fonctionnalités. Selon nous, son seul point faible est son écran rétroéclairé par LED qui n’offre pas un confort optimal pour la lecture d’un livre. Par contre, en tant qu’éditeur, nous avons été très heureux d’apprendre que Amazon avait enfin intégré son Kindle au iPad grâce à une application gratuite.
En effet, comme je l’ai mentionné plus haut, les éditions Dédicaces offrent déjà leurs livres pour le Kindle en téléchargement sur le site de Amazon. Le Kindle étant désormais intégré au iPad de Apple, cela nous ouvre les portes à un gigantesque marché international et nous permet désormais d’atteindre des dizaines de milliers d’utilisateurs supplémentaires, et donc des lecteurs potentiels.
Ceci dit, pour le moment, seule une partie de nos publications est disponible en téléchargement chez Amazon. Les livres seront bientôt tous ajoutés dans la boutique du géant et seront aussi accessibles sur cette page officielle : www.amazon.dedicaces.ca
Votre partenariat avec enTourage eDGe est désormais officiel. Voici un des lecteurs auxquels je crois le plus, parcequ’il n’est justement pas en compétition directe avec l’iPad, mais totalement différent. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce produit, ce partenariat et sur vos attentes ?
Guy Boulianne : Le 1er avril dernier, nous avons signé un contrat non-exclusif avec la société enTourage Systems Inc. aux États-Unis. Nos livres électroniques seront très bientôt mis en vente dans la boutique de l’entreprise pour une diffusion sur son dualbookenTourage eDGe. Encore une fois, les éditions Dédicaces deviennent la toute première entreprise francophone à diffuser des livres en français dans ce e-Reader révolutionnaire.
Le dualbook enTourage eDGe est un hybride entre le Kindle de Amazon et le iPad de Apple. À la manière d’un livre ouvert, le dualbook enTourage eDGe se présente sous la forme d’un ordinateur pliable à double écran qui dispose, quand l’appareil est fermé, d’une largeur de 203,4 mm, d’une longeur de 254 mm pour une épaisseur de 25,4 mm. L’appareil est muni d’un écran E-ink de 9,7 pouces d’une résolution de 1200 x 825 pixels qui permet de lire confortablement les ebooks. Il est équipé également d’un écran tactile LCD de 10,1 pouces d’une résolution de 1024 x 600 pixels qui tourne quant à lui sous le système d’exploitation Android. Ce deuxième écran est idéal pour surfer sur le net, ou consulter et écrire des emails grâce au clavier virtuel disponible sur l’appareil.
Notre présence sur le dualbook enTourage eDGe nous ouvre les portes à un important marché. Le Vice-Président des Partenariats stratégiques, Corey Podolsky, m’écrivait il y a quelques jours: « Pour le moment, nous n’avons pas l’intention de créer une section française dans notre boutique, mais cela est certainement une possibilité dans l’avenir. En outre, nous allons commencer à distribuer notre e-Reader à travers l’Europe au cours des 12 prochains mois, la création d’une boutique de langue française est donc une possibilité très réelle. »
Nos livres seront donc bientôt disponibles en téléchargement dans la boutique en ligne de enTourage Systems et ils seront donc vendus sur le vaste marché américain, pour ensuite s’étendre au marché européen. C’est donc une évolution très importante pour le développement de notre entreprise. Je précise que nos ebooks y seront vendus sans DRM.
Comment voyez-vous l’avenir pour les ebooks ? La prise en charge du multimédia fera-t-il partie intégrante du métier d’éditeur à l’avenir ? Y aura-t-il d’un côté les ebooks « texte », et de l’autre les ebooks dits « augmentés » ?
Guy Boulianne : Le livre électronique fait partie de l’évolution naturelle de l’écriture, de la lecture et de l’impression. Tout ceci débute à la préhistoire alors que les hommes gravaient leur imaginaire sur la pierre, pour ensuite évoluer vers le hiéroglyphe, le papyrus, le codex et le papier. Il ne faut pas oublier que lors de son invention, la presse de Gutenberg fut démonisée par ses contemporains. Or, nul n’a jamais pu arrêter l’évolution du livre depuis ce jour. Nous en sommes donc arrivés aujourd’hui à la presse numérique comme l’Espresso Book Machine de On Demand Books LLC (ODB) qui révolutionne totalement le monde de l’édition.
Le ebook fait partie de cette même évolution. On ne peut pas faire sans le livre électronique puisqu’il fera partie intégrante du nouveau mode de lecture dans un avenir rapproché. Pour cette raison, il serait très dommageable pour un éditeur de faire abstraction de celui-ci. En tant qu’entreprise, il est primordial de suivre la tendance du marché et c’est ce que les éditions Dédicaces font sans relâche.
Le ebook a donc un très bel avenir devant lui puisqu’il dépassera toutes nos attentes. Nous n’avons encore rien vu !
Que manque-t-il selon vous pour que les ventes d’ebooks décollent vraiment ?
Guy Boulianne : Pour que les ventes décollent réellement, il faudrait cesser les faux débats autour du ebook. Selon moi, il est ridicule de vouloir imposer un prix unique ou encore une plateforme unique pour celui-ci. Le prix unique tue le libre marché. Il faut laisser libre cours à notre imagination et inventer de nouvelles stratégies de marketing, au lieu de nous enfermer dans des conceptions erronées.
Pour que les ventes décollent réellement, il faudrait aussi réduire le prix des liseuses qui est encore beaucoup trop élevé pour la plupart des citoyens. Il en va ainsi pour le prix des ebooks eux-mêmes. Le prix du livre électronique doit être bien inférieur à celui du livre en papier, sinon le client ne trouvera aucun avantage à s’en procurer. Nous devons faciliter la vente en rendant le ebook accessible au plus grand nombre.
Votre maison d’édition est Québecoise. Comment voyez-vous la situation Française actuelle par rapport à l’ebook ? Y a-t-il une vraie différence culturelle selon vous entre nos deux pays concernant l’ebook ?
Guy Boulianne : N’étant pas Français, je ne souhaite pas trop m’immiscer dans la politique commerciale de l’hexagone. Par contre, comme je le disais plus haut, je suis tout à fait contre le prix unique, autant pour le livre au format papier, que pour le livre au format électronique.
Il y a une très grande différence culturelle entre nos deux pays puisqu’au Québec, le ebook ne fait pas encore partie des grands enjeux dans le monde de l’édition. Nous accusons souvent des retards importants vis-à-vis les États-Unis et la France. Les éditions Dédicaces se veulent l’exception à la règle [rires].
Les éditeurs n’ont pas très bonne presse en France. De plus, l’auto-édition semble prendre de l’ampleur. Comment défendriez-vous l’image des éditeurs auprès de ceux qui pensent qu’ils ne servent plus à rien dans le monde numérique qui arrive ?
Guy Boulianne : Un auteur auto-édité restera toujours un auteur auto-édité. Le fait de publier son oeuvre sur un format électronique ou sur un format papier, sans passer par un éditeur, n’apporte absolument aucun prestige à un auteur. Pour qu’un auteur puisse grandir en tant que créateur, il doit indéniablement passer par l’entremise d’un éditeur officiel, peu importe son importance.
Attention, je ne dénigre pas l’auto-édition comme tel puisque moi-même, il y a 25 ans, j’ai auto-édité mes deux premiers recueils de poésie. Par contre, je dis simplement qu’un auteur ne peut grandir en tant qu’artiste qu’en étant publié par un éditeur officiel. Il se sentira alors reconnu pour le travail qu’il fait, lui apportant un prestige nouveau, ce qui l’emmènera à toujours vouloir faire avancer son travail et à l’améliorer.
L’ère numérique ne change rien à cela.
Où les auteurs édités par Dédicaces sont-ils distribués à ce jour (en numérique et en papier)? Et avez-vous d’autres partenariats en préparation?
Guy Boulianne : À l’heure actuelle, nos livres papier sont mis en vente dans les boutiques en ligne Authorsbookshop, Abebooks, Biblio, Alibris, PriceMinister, Caplivres et eBay. Nos livres électroniques sont mis en vente chez Smashwords, Payloadz et Amazon. Un contrat vient d’être signé avec I-Kiosque, en France et enTourage Systems Inc., aux États-Unis. Ils seront donc bientôt disponibles dans ces deux boutiques.
Nos ouvrages peuvent aussi être consultés en partie ou intégralement sur les sites internet Docstoc, Scribd et Calaméo.
Au niveau des libraires, nous travaillons en partenariat avec la librairie Books Inn au Nouveau Brunswick (Canada). Possédant l’Espresso Book Machine, l’équipe de Books Inn imprime nos ouvrages à la demande et les met à la disposition de sa clientèle. Non seulement nos ouvrages sont mis en vente à la librairie, notre partenaire se propose aussi de les imprimer et de les distribuer dans les librairies francophones des deux provinces canadiennes : le Nouveau Brunswick et la Nouvelle Écosse. De plus, il existe 110 écoles francophones au Nouveau Brunswick. Or, notre partenaire communiquera notre catalogue à ces différents établissements scolaires. Chaque publication approuvée pourra alors être achetée par les professeurs dans le cadre de leur budget annuel.
Nous sommes aussi en train de développer un partenariat avec la Librairie ambulante Chez Jeanne, en France. Sa fondatrice, Maud Favret, se promème dans les communes du Haut-Jura pour présenter aux habitants différents livres qu’elle met en vente. Nous serions donc très heureux de travailler en partenariat avec celle-ci.
Je pense que beaucoup d’auteurs hésitent à pousser la porte d’un éditeur. Que conseilleriez-vous à un auteur qui hésite ? Quels sont les critères à satisfaire avant de présenter sa création ?
Guy Boulianne : Si l’auteur se sent prêt à être publié, je l’encourage sans hésitation à contacter un éditeur, dont les éditions Dédicaces. Pour nous, il est important que le travail soit léché et nous refusons systématiquement les manuscrits bâclés et comportant trop de fautes d’ortographe. Aux éditions Dédicaces, l’auteur est responsable de la correction de son oeuvre. C’est la moindre des choses que nous lui demandons.
Quels sont vos prochains projets pour les éditions dédicaces ?
Guy Boulianne : Un de nos projets en gestation est justement de rendre nos livres électroniques accessibles à une vaste clientèle en passant par un chemin différent que celui de Internet. Par contre, vous comprendrez que l’on ne peut pas en dire plus pour le moment. Nous vous tiendrons au courant.
Pour en savoir plus sur les éditions Dédicaces :
Editions Dédicaces Inc.
www.dedicaces.ca | www.dedicaces.info