À lire, l’éditorial de Bernard Zimmern sur le site de l’Ifrap :
Le Premier ministre, François Fillon, a décidé d’aborder la justification des niches fiscales ; c’est beaucoup de courage et il faut le soutenir, en demandant aux politiques et hauts fonctionnaires d’en avoir autant. Car le plafonnement global est simplement un aveu d’impuissance, un refus d’arbitrage entre des niches qui sont utiles et d’autres qui le sont beaucoup moins.
Demandez à des chômeurs ce qu’ils préfèrent : des emplois, ou bien voir disparaître les « riches ». La réponse est claire : des emplois et des riches, le plus de riches possible. Caril n’y a pas d’emplois sans riches.
Mais à la condition que ces riches investissent dans des entreprises qui créent des emplois. Pas à travers ces cache-sexes que sont les mesures d’incitation fiscale qui, en France, depuis 30 ans, font le bonheur des intermédiaires ; où l’on invite des dizaines de milliers de petits épargnants à investir quelques sous dans des projets qu’ils ne connaîtront jamais, sinon que cela leur fait économiser quelques milliers d’euros d’impôt, rapidement reperdus dans les circuits bancaires.
Cependant, encourager les vrais riches (et nous en avons encore presqu’autant que les autres nations) à mettre leur argent dans la création d’entreprises, massivement, pas question. Cela ferait élitiste. Mais comprend-on simplement qu’il faut encourager à créer des entreprises ?
Ne dit-on pas que le niveau de la première incitation fiscale en ce sens, l’Avantage Madelin, en 1994, avait été décidé par deux inspecteurs des finances au même niveau de détaxation que celui dont bénéficiaient les toilettes dans un logement neuf ?
Avec un plafond de 20.000 francs détaxés à 25% pour un célibataire, soit près de 5.000 francs (environ 1.000 euros) à déduire, cela donne la mesure de l’intérêt qu’y portaient les pouvoirs publics. La même année, en 1994, les Anglais avec le dispositif équivalent l’EIS ont débuté avec un plafond de 100.000 £, un niveau que nous n’osons pas encore franchir aujourd’hui, alors que la Grande-Bretagne est, depuis, déjà passée au million de livres.
L’irresponsabilité de nos politiques et des hauts fonctionnaires qui les inspirent se mesure à leur incapacité à faire la police dans les niches fiscales. S’ils étaient responsables, nous n’aurions pas encoreune dépense fiscale de 1,2 milliard d’euros pour les niches DOM-TOM ou de 2,4 milliards d’euros pour la niche « chaudière » alors qu’au même moment, la dépense fiscale pour la création d’entreprises est inférieure à 200 millions d’euros(lire notredossier sur les niches fiscales).
Le plus gros de l’Avantage Madelin et de l’ISF-TEPA s’enfuit en effet vers les grosses PME, pas vers les créations ; les grosses PME ont depuis longtemps trouvé les fonds pour exister même s’il leur manque toujours des fonds propres car l’Etat leur en prend deux fois plus sur leurs bénéfices qu’en Allemagne ou en Grande-Bretagne. Il se disperse aussi dans les réseaux de collecte et les fonds de capitaux à risque qui, s’ils sont bien gérés, évitent d’investir dans les créations d’entreprises, beaucoup trop risquées.
Depuis 40 ans, nos politiques et notre haute administration font semblant de voler au secours de nos PME mais en fait ils les tuent.La bonne mesure de leur efficacité est le nombre d’entreprises qui se créent en débutant avec au moins un salarié, gage que le créateur a une autre ambition que de s’employer lui-même. Depuis 10 ans, ce chiffre est absolument stable autour de 40.000 créations par an contre 120.000 en Allemagne, 180.000 en Grande-Bretagne et 600.000 aux USA.
Il est temps de changer de politique ou, sinon, de politiciens.