Chapitre 3 :
Lendemain de fêtes et premières expériences inédites
Visite de la National Gallery
Marie ou la Californie à tout prix
Lendemain matin. 22 juin 2007, le soleil cogne à ma tête comme une concierge à ma porte un soir de festivités rock at home. J’émergeais péniblement de ma torpeur post-apocacloolyptique, la bouteille de mon rêve, ou de ce que croyais être un rêve, était posée sur la table de mon salon et ô miracle, ma petite amie ne l’avait pas jetée à la poubelle dans l’un de ces gestes furieux qui voient passer aux oubliettes mille et un objets que j’aimais à collectionner, fanzines, articles, comics, catalogues de vinyles, enfin toutes ces choses qui avaient patiemment construit l’édifice glorieux de mon quotidien. Bref, je vois la bouteille et pris d’un doute, une dernière bulle d’alcool ayant j’imagine explosée dans mon esprit en un Hiroshima dionysiaque, je me précipite sur elle frottant névrotiquement la surface graisseuse, pleine des empreintes criminelles de la veille. Ni une ni deux, Sandoz revint à moi avec ce sourire manifeste du génie qui commence sa journée de souhaits à réaliser. Je calmais tout de suite les ardeurs du vieux génie, mais alors qu’il n’avait encore prononcé aucune formule, une idée me vint, sans doute l’explosion de la deuxième bulle. J’avais reçu, il y a quelque temps de cela une invitation de la National Gallery, vénérable institution londonienne qui proposait une très impressionnante rétrospective Paul Klee. Une douche, un petit-déjeuner et un billet de train plus tard, je me retrouvais confortablement installé dans un wagon de première classe, ma précieuse bouteille en poche. J’avais pris soin de ne pas prendre mon pardessus Ian Anderson, du nom du fameux chanteur flûtiste de Jethro Tull, afin de ne pas être pris pour un clochard céleste, le goulot dépassant d’un demi centimètre seulement. Étant assez pointilleux, je ne voulais pas que l’expérience échoue si près du but. Train à grande vitesse démarrant comme une flèche, voix ferrée repliée par le temps, j’arrive à Victoria Station. Un cab qui me dépose comme un plis urgent devant la National Gallery. Je franchis ensuite le cordon rouge de l’exposition avec une forme de désinvolture qui fit admirablement diversion auprès du personnel de sécurité. Puis, je me faufilais vers les toilettes et en ressortis avec Sandoz, aussi fidèle que mon ombre. Je lui fis signe d’improviser un vœu, quelque chose d’incroyable qui puisse définitivement valider la thèse de la nuit dernière. Une étrange musique se faufila d’une salle à l’autre, quelque chose comme un hymne pop baroque à trois voix portée par un vent d’automne vaporeux et dans un nuage de fumée lysergique les œuvres d’art s’animèrent les unes après les autres. Sous une fine couche de peinture craquelée, brèche ouverte pour la fantaisie, je vis une Diane chasseresse s’en échapper, ses tresses se dénouant des arbres. Puis se fut le tour d’une compagnie de saltimbanques hippies qui enchaînèrent alors les thèmes les plus précieux avec une virtuosité déconcertante. L’exposition s’était rapidement transformée en happening psychédélique aux orgues persans et aux guitares sinueuses.
À suivre…