Ces derniers temps, je lis plusieurs notes de blogues annonçant des ralentissements de publication, voire des fermetures temporaires et pas des moindres. Ce sont tour à tour Marc Vasseur, Intox2007, hypos, Luc Mandret pour en citer dont la notoriété, au moins dans la sphère politique, est reconnue. D'autres se sont posés la question (Toréador, Skeptikos) ou sont devenus très épisodiques (Unique et Commun, Nelly Margoton, le Crapaud du Marais). Ce phénomène avait connu une première salve avec la quasi-disparition des blogs de Quitterie Delmas et de Versac. Le phénomène est ample et touche très largement les blogues. Tout récemment, c'est celui de Life's Good qui annonçait un sommeil prolongé. Je ne vais pas faire un tour d'horizon, il serait bien long, mais le fait est que j'ai vu bien plus de fermetures que d'ouvertures de blogues ces trois dernières années.
Est-ce cette épidémie qui a amené Jean Véronis à écrire un billet sur la mort des blogues ? Il se réfère à un autre billet, celui de Pierre Chappaz, dont l'analyse est intéressante. Véronis observe un changement de sociologie des blogueurs, devenue désormais adulte d'où des modifications de comportements. Mais l'une des clefs réside à mon avis dans les remarques de Pierre Chappaz sur la teneur des informations transmises sur les blogs ; pendant longtemps, futile, utile et agréable se confondaient dans un même espace ; l'émergence des réseaux sociaux, facebook, twitter, a entraîné une absorption générale du bruit dans ces nouveaux canaux, d'où la disparition des fameux skyblogs que Véronis assimile à raison comme un essartz primitif de réseau social pour adolescents. L'information, elle est demeurée sur les blogues, twitter et facebook servant désormais de relais plutôt que de sources d'information.
Côté politique, certains blogueurs ont renoncé à bloguer, mais pas à communiquer : Marc Vasseur, Intox2007 continuent à s'exprimer largement sur twitter, Quitterie Delmas est active sur facebook, par exemple. Côté politique, j'ai lu aussi que certains blogueurs renonçaient par désespoir d'agir sur l'action politique de nos gouvernants. Ce désespoir-là est à mon avis une erreur : s'ils regrettent que nos blogues ne puissent revenir sur le résultats d'élections, je crois qu'ils se bercent d'illusions en espérant que le contraire soit possible. Les blogues peuvent avoir une action parce qu'ils sont suivis par plusieurs journalistes et par une petite partie de la classe politique ; en ce sens, ils s'apparentent davantage à des think thank. Sans pour autant que leur lectorat soit négligeable , ils ne feront pas l'opinion, c'est évident, mais ils peuvent y participer et mettre à jour des difficultés de la société française jusque là ignorées.
Il suffit parfois de quelques blogues qui se mettent en réseau, avec des propositions simples et pragmatiques, un thème clair et quelques relais pour qu'un écho se produise au sein de la société civile et de la classe politique. A la mi-2008, avec quelques blogueurs (nous devions être 6 ou 7 au total) nous avons relayé les inquiétudes grandissantes des scientifiques et des apiculteurs à propos du devenir des abeilles. A la suite de nos billets, la presse écrite d'abord, puis télévisée ensuite, a relayé ces inquiétudes, et un monsieur abeille a alors été nommé au mois de septembre qui a suivi. Nos bloques ont certainement contribué à populariser ces inquiétudes aux côtés des associations qui faisaient valoir leurs craintes depuis plusieurs années.
En revanche, s'il s'agit de demander la démission d'un président de la République et de faire de l'agit-prop, je crois les blogues assez peu efficaces, en effet...