Avant toutes choses, je tiens à remercier les éditions Perrin qui, dans le cadre de l'opération Masse Critique de Babélio, ont mis gracieusement à disposition de certains lecteurs volontaires des exemplaires de cet ouvrage.
Alors bien sûr, Stavisky mort, "Le Canard Enchaîné" titrant, avec son incorrigible sens de l'à-propos, "Stavisky se suicide par une balle tirée à 3 mètres de distance : ce que c'est, que d'avoir le bras long !" et tous les partis, de l'extrême-gauche à l'extrême-droite, se donnant pour une fois la main afin de conspuer les parlementaires radicaux au pouvoir et de faire chuter une fois de plus le gouvernement de la IIIème République, il est un peu normal que l'on s'empresse de remonter à la source de tous les silences, de tous les non-dits et de toutes les complaisances qui avaient permis à "Monsieur Alexandre" de mener grand train et de duper tout son monde.
Sur le chemin, on se heurte - entre autres - au ministère de la Justice et à l'enquête menée par le procureur Pressard, lequel a la malchance d'être aussi le beau-frère du président du Conseil, Camille Chautemps. Cette parenté est à elle seule suffisante pour que les grands tribuns de la presse de l'époque sonnent l'hallali et réclament la tête de Chautemps et de ceux qu'il est censé avoir protégés ou commandés.
Dès que la nouvelle de la mort de Stavisky est connue, dans l'après-midi du 8 janvier 1934, le premier président de la Cour d'Appel convoque Albert Prince dans son bureau./b Il y tombe nez à nez avec le procureur de la République, Georges Pressard, son ancien supérieur hiérarchique. Et, en dépit de l'affabilité du président Dreyfus, Prince comprend qu'on cherche à lui imputer, à lui et à lui seul, les cafouillages de l'enquête de 1930. L'attitude agressive de Pressard met le comble à son indignation et à ses angoisses, dont il ne parlera cependant qu'à la sortie du bureau de Dreyfus.__
A partir de là, il semble que le conseiller Prince ait tout mis en oeuvre pour retrouver tout ce qui pouvait plaider à sa décharge - en d'autres termes, tout ce qui pouvait charger Pressard. Quelques jours avant le mystérieux coup de fil qui lui demande de venir assister sa mère, hospitalisée à Dijon pour une occlusion intestinale, il dira les avoir enfin en main, tout prêts pour le rapport qu'il doit remettre, le 21 février, à Lescouvé, le premier président de la Cour de Cassassion, chargé par le ministre de la Justice de l'époque de diligenter l'enquête. Il les aurait emportés dans le train le menant à Dijon.