Une contribution au problème des retraites ou comment éviter un conflit entre générations
Le problème du financement des retraites n’a été que provisoirement résolu, on le sait, par les diverses dispositions adoptées par les gouvernements précédents.
Différentes pistes, qu’il faudra explorer sans en écarter aucune, ont été évoquées sauf, pour l’instant, celle de la diminution des retraites. Il sera pourtant nécessaire de l’envisager un jour, sous une forme ou sous une autre. Car, avec le vieillissement de la population et l’arrivée de quelques dix millions de nouveaux retraités, le poids des engagements public au titre des retraites va vite devenir littéralement écrasant ( près de neuf fois le PNB en Grèce , mais aussi plus de cinq fois en France)*. Cependant, avant d’en venir là, outre l’allongement de l’âge légal de la retraite (que l’Espagne envisage de porter à 67 ans ! mais jusqu’où peut-on aller ?) il y en a une autre, moins douloureuse et plus juste, qui mériterait examen.
L’idée est simple, presque banale. Puisque les progrès de la médecine se traduisent par 15 à 20 années supplémentaires de vie en bonne santé, et donc de la capacité de travailler, pourquoi ne pas en tirer les conséquences pour le financement des retraites ? Pourquoi ne pas inciter les « seniors », ceux qui ont bénéficié d’une « aubaine » conjoncturelle exceptionnelle, la possibilité de partir très tôt à la retraite, de revenir sur le marché du travail, tant qu’ils en ont la capacité physique et, bien entendu, s’ils en ont le désir ?
Ces derniers ont, en effet, bénéficié dans le passé de dispositions généreuses adoptées dans un climat d’euphorie économique et démographique tout différent de celui d’aujourd’hui. Ainsi, au moment de la retraite, seul un tiers des salariés sont encore en activité. Le taux d’emploi des seniors de plus de 60 ans, soit 38 %, est un des plus faibles d’Europe (45 % en moyenne). Il serait maintenant légitime, au nom de la solidarité nationale, de suggérer à ces jeunes retraités de reprendre une activité professionnelle, sous une forme ou sous une autre, et avec des modalités bien entendu adaptées, de façon à contribuer à financer eux-mêmes, ne serait-ce que partiellement, leur propre retraite.
Au demeurant, n’est-il pas un peu choquant de voir des personnes bénéficier d’une retraite pendant 20 ou 25 ans, soit une période d’une durée qui se rapproche de celle de leur vie active(encore davantage pour les agents de la SNCF, d’EDF et de l’Armée). Par ailleurs, il faut bien constater qu’à côté de nombre de retraités qui apprécient de rester inoccupés à un âge encore tendre, beaucoup de seniors, au contraire, ne savent pas quoi faire pour combattre l’ennui du désœuvrement. Le bénévolat à lui seul ne suffit pas.
Les dispositions déjà existantes dans le domaine fiscal devraient donc être précisées, complétées et renforcées de façon à encourager un nombre croissant de « seniors » déjà partis à la retraite à revenir sur le marché du travail. Le volume de la population active, et celui du PIB, s’en trouverait ainsi fortement augmenté et les charges du financement des retraites allégées d’autant.
Il ne faut pas écraser les juniors sous le poids des « seniors ».
Yves-Marie LAULAN
Président de l’Institut de Géopolitique des Populations,
ancien professeur à l’université de Paris II
ancien haut fonctionnaire international
*Source, le Cato Institute, cité par le Herald Tribune du 12 mars 2010