Une manifestation monstre s’est déroulée hier dans les rues de Québec. Si le mouvement des «cols rouges» parle d’environ 50 000 participants, les autres estimations vont de 10 à 15 000 personnes. Il est difficile d’avoir un chiffre précis pour le moment. Sinon, pourquoi cette manifestation est réactionnaire, comme le titre de cet article le suggère ? Ce n’est pas pour insulter monsieur et madame tout-le-monde qui ont pris la peine de sortir dans la rue, mais pour critiquer le groupe qui organisait cette grande marche de protestation. À prime abord, il est plutôt rare que la droite organise des manifestation. Cette manifestation était organisée par le mouvement des «cols rouges», un groupe de payeurs d’impôts qui disent en avoir assez de payer pour des dépenses et des programmes qu’ils jugent inutiles (alors que le vrai problème est ailleurs). D’où l’idée d’amener balais et vadrouilles à la manifestation de dimanche. Ils veulent faire le »grand ménage ». De plus, cette manifestation fut publicisée par les radio-poubelles de Québec et les autres médias de droite de la région (dont TVA). Cela ne vous rappelle pas des manifestations qui se sont déroulées il y a de ça quelques années sous l’instigation des radios conservatrices de Québec pour sauver les fesses à Jeff Fillion ? Plein de gens y sont allés avec de bonnes intentions, et nous ne le nions pas, mais les organisateurs étaient la droite populiste de Québec, dont les solutions à la crise des finances publiques datent d’un autre siècle. Dans la manif, nous pouvions y voir des pancartes de l’ADQ, des pancartes associant libéraux et communistes (!) de même que des drapeaux canadiens («les méchants barbus séparatistes dépensent notre argent») ! L’idée d’une grande manifestation était bonne, mais la cible était mauvaise. La cible ne devrait pas être la secrétaire d’Hydro-Québec ni l’agronome du ministère de l’agriculture, mais plutôt le privé. Le capital jouit ici au Québec de nombreux privilèges et avantages que nous, en tant que citoyens, n’avons pas. C’est pour cette raison que cette manifestation était réactionnaire. Elle ciblait non pas les riches entreprises privées et les PPP qui nous coûtent des milliards, mais les programmes sociaux qui ‘’coûtent trop cher’’ au goût d’une droite populiste qui espère voir le privé prendre la relève.
Les gens ont le droit d’être écoeurés, et au Reactionism Watch, nous le sommes aussi. Nous en avons marre de toujours payer pour les riches, qu’ils s’appellent Coutu, Desmarais, Laliberté. Malheureusement, le message des organisateurs de la manif d’hier était tout autre : faites des coupures ! Nous avons vus ce que ça donnait de couper drastiquement dans nos programmes sociaux, comme l’a fait le gouvernement anti-populaire de Lucien Bouchard lors de son déficit zéro. Nous nous en sommes toujours pas remis, et ils souhaitent qu’on fasse, ici au Québec, les mêmes erreurs qu’ils sont en train de commettre dans la plupart des pays européens, la Grèce en premier ? L’échec du système néo-libéral fut magistralement démontré par les conservateurs et républicains de tout acabit. Avec cette récente »crise » des finances publiques, nous (re)verrons l’impossibilité du système capitaliste à pouvoir survivre sans de féroces attaques contre les travailleurs et travailleuses. En 2008, nous avons été obligés de payer (avec l’argent de nos impôts) pour les erreurs de riches capitalistes irresponsables qui jouent au monopoly avec notre argent (pensons aux criminels à cravate de la caisse de dépôt). Maintenant que le gouvernement est dans le «trou» à cause de cette opération «sauvetage», ils nous disent que c’est à nous de payer, parce que nous vieillissons trop vite, nous faisons trop d’enfants, nous consommons trop de médicaments, nous étudions trop. Nous en avons assez du manque de respect des hauts fonctionnaires bourgeois et des capitalistes !
À la place, les manifestants auraient dû manifester contre le système capitaliste qui est à l’origine de la crise financière. Il y a plein de mesures possibles pour redresser nos finances publiques, sans que les pauvres et la «classe moyenne» aient à en souffrir.Voici quelques idées intéressantes qu’il serait bon d’envisager au lieu de faire payer les pauvres :
1. Rapatrier notre d’argent d’Ottawa, qui dort dans des coffres. Nous retirer de programmes fédéraux avec pleine compensation.
2. Lutter contre l’évasion fiscale et imposer davantage les entreprises privées (le Québec possède un des taux d’imposition sur le revenu des entreprises les plus bas au monde (29%, contre 32% en Ontario et 35% aux États-Unis).
3. Nationaliser sous contrôle des travailleurs les secteurs majeurs de l’économie (ressources naturelles, institutions financières, télécommunications)
4. Abolir les partenariats public-privé (PPP) immédiatement, qui nous coûtent des milliards.
5. Mettre une taxe sur l’eau embouteillée et faire payer les compagnies qui utilisent notre eau.
6. Revoir le financement de secteurs problématiques comme celui de la construction.
7. Créer de nouvelles entreprises d’État, qui travailleraient dans les intérêts du peuple. Médicaments, génie conseil, production cinématographique, extraction minière, toutes les possibilités sont là.
Ce n’est pas à nous de payer ! Nous ne voulons pas de nouvelles taxes qui pénalisent seulement les plus pauvres ! Faisons payer le privé !