On nous en fait des tartines depuis Avatar. Cette 3D relief qui doit révolutionner le cinéma. Mais qu’en est-il aujourd’hui ? Véritable tournant ou grosse arnaque ?
Warner qui décide de passer tous ses blockbusters en 3D, Tintin de Spielberg et Jackson en 3D, tous ces films d’animation en 3D, les ressorties de Titanic ou du Seigneur des Anneaux en 3D …. Décidément, Hollywood, à défaut d’une grande originalité créative, pense a voir trouvé une nouvelle manière d’attirer le public dans les salles avec la 3D.
Pourtant, la technique n’est pas nouvelle. Déjà en 1954, la Créature du Lac noir attirait en masse le public dans les salles. Puis dans les années 80, avec à la montée des blockbusters, la 3D était utilisée pour relancer des franchise en perdition (les Dents de la mer ou Vendredi 13) et servait d’attraction chez Disney (Captain Eo avec Michael Jackson). La technique n’était pas encore vraiment au point et faisait assez mal aux yeux mais elle permettait de faire la farce et d’attirer les personnes dans les salles.
Ces derniers temps, face à la montée du piratage et avec les avancées technologiques, la 3D bénéficie d’un retour en grâce. Comme un nouveau moyen de rameuter le public dans les salles, d’offrir un nouveau spectacle inédit avec une promesse d’immersion inégalée et de remplir les tiroirs-caisse des exploitants et des producteurs.
Contrairement à ce qui se dit en ce moment, ce n’est pas Avatar qui a fait revenir la 3D sur le devant de la scène. Depuis quelque années, celle-ci avait déjà entamé son retour en fanfare. Spy Kids, Voyage au Centre de la Terre, Volt, les concerts de U2 et Hannah Montana ont connu le relief avant les Na’Vi. Et l’Âge de Glace 3, Là-Haut et Destination Finale 4 en a démontré également la rentabilité avant l’invasion de Pandora. Mais ce que l’on doit bien a James Cameron c’est une utilisation de la 3D qui ne soit pas tape à l’œil mais immersive. Grâce à Avatar, nous sommes entré de plein pied sur Pandora. Ce que Cameron a aussi apporté, c’est la technique. Il a utilisé sa propre caméra Fusion et avait une vision claire de ce qu’il voulait apporter avec la 3D. Deux autres films peuvent se targuer d’avoir une vraie vision de la 3D : Coraline et le Drôle Noël de Scrooge. Pour le premier, Henry Selick a véritable tourné dès le départ son film en 3D et ne fait qu’en renforcer la poésie. Pour le second, Zemeckis s’était déjà fait la main auparavant sur Beowulf et montre qu’il sait exactement comment utiliser la technique. Quand à Là-Haut de Pixar, on peut dire que sans faire évoluer le principe, celui-ci est bien utilisé et permet d’avoir de bonne perspectives et de se rapprocher des personnages (voir ici).
Mais face à ces visions de réalisateurs bien intentionnés et aux visions justes de ce qu’ils peuvent faire avec la 3D relief arrivent des producteurs qui ne voient que les bénéfices que peut rapporter ce chiffre et cette lettre sur une affiche de film. Depuis le succès incontestable d’Avatar les producteurs se disent d’un seul coup emballés par le relief et même certains exploitants alors frileux retournent leur veste (UGC en particulier). Car rappelons tout de même qu’Avatar a réalisé prêt des 3/4 de ses entrées en 3D, de même pour l’Âge de Glace 3. Et quand on sait que la location des lunettes permettent d’ajouter 2 à 3€ sur le prix du ticket, certains ne vont pas se priver.
Nous avions déjà tous les films d’animation visibles en 3D. Normal vu que sur ce type de produit, la technique ne coûte pas cher. Mais cela ne dérange pas plus que ça au niveau artistique puisqu’en général, les couleurs sont déjà boostées à la base pour ne pas être trop déçu du rendu et c’est plutôt bien exploité. Les films d’animation avec relief ont donc de beaux jours devant eux, d’autant plus que cela permet d’ajouter une dimension ludique supplémentaire auprès des enfants (sans oublier de faire débourser à leurs parents une fortune).
Par contre la nouvelle mode de tout convertir en 3D a de quoi donner les mêmes maux de crâne que l’on avait à l’époque avec les lunettes rouge et bleues. Deux films en particulier son symptomatiques des méfaits de cette mode. Alice au Pays des Merveilles de Tim Burton et Disney en premier. En effet, le réalisateur d’ordinaire si doué a déçu avec une utilisation de la 3D sur finalement seulement 20% du film et un univers coloré qui ne ressort pas face à l’opacité des lunettes. Une déception artistique pour le réalisateur qui a mal géré ce nouvel outil mais surtout l’illustration d’un obstacle pour entrer dans un univers. Mal gérée, la technique ne sert à rien, le réalisateur doit composer avec et non se la voir imposée par le studio pour faire plus d’effets.
L’autre film représentatif de la tendance qui pointe le bout de son nez est le Choc des Titans de Louis Leterrier distribué par Warner. Le film a été tourné de la manière la plus traditionnelle qui soit et, face au succès d’Avatar, Warner a eu l’idée de porter le remake mythologique en 3D à la dernière minute grâce à la nouvelle technique de Prime Focus. Juste avant la sortie du film, Leterrier vantait les avantages de la technique et le rendu incroyable des images. Mais le résultat sur grand écran est spectaculairement … plat. En effet, rien ne ressort, pas de perspective, de sentiment de grands espaces, de rapprochement des personnages, de spectaculaire. Au contraire, les effets spéciaux en sortent encore plus fouillis et on ne voit plus que les défauts. On ressort du film en se disant que s’était sans doute mieux en 2D. Une nouvelle déception pour un blockbuster après Alice.
Dès lors, on est clairement en droit de douter du bien fondé de la technique. Surtout quand on sait que Warner va appliquer la même technique que le Choc des Titans pour tous ses blockbusters parmi lesquels Harry Potter et la Légende des Gardiens de Zack Snyder. Mais aussi quand on sait que ce sont des films de seconde zone, sans véritable vision artistique qui vont l’exploiter pour faire exploser leur tiroir caisse comme Resident Evil Afterlife (qui se targue d’utiliser la caméra de James Cameron) ou Sexy Dance 3D. Mais imaginez qu’un producteur veuille faire plus de chiffres avec du Woody Allen … croyez-vous vraiment qu’y ajouter de la 3D pour remplir le tiroir-caisse sera utile au film ? Certainement pas. Et imaginez que Michael Bay bascule ses Transformers en 3D … emmenez des dolipranes et rendez-vous chez l’ophtalmo directement après le visionnage du film !
Du coup, on ne place pas beaucoup d’espoir en Shrek 4 (qui s’annonce encore moins bon que le décevant 3e opus) ou Piranha 3D (de notre frenchie Alexandre Aja qui peut toutefois nous offrir une bonne surprise mais tape à l’œil). Hors films d’animation (puisqu’on peut tout de même parier que Toy Story 3 sera une réussite dans l’exploitation de la technique et une réussite artistique digne de tout Pixar), il ne nous reste donc plus queTron l’héritage pour se persuader de l’utilité de la 3D dans un film et se dire que certains réalisateur on vraiment compris qu’elle peut servir à raconter une histoire avant la fin de l’année. Un seul film pour que les blogueurs retrouvent un intérêt à la 3D dans un film.
Car oui, les avis sont quasi unanimes sur la blogosphère ciné sur ce ras-le-bol de la 3D qui ne sert pas à grand chose dans les films. Autant la technique a convaincu sur les films d’animation, mais pour les films plus traditionnels, qui ont pourtant un vrai potentiel pour faire la démonstration de la technique, la partie n’est pas gagnée. Ce n’est pas parce qu’Avatar était un exemple financièrement très rentable et artistiquement au top que les producteurs doivent se dire qu’en mettant 3D sur les affiches, cela nous plaira. Ce que nous recherchons, ce sont des réalisateurs qui sauront quoi faire avec ce nouvel outil qui est mis à leur disposition pour immerger les spectateurs dans les film et leur faire ressentir toujours plus d’émotions face à leur images. Il faudrait que ce soit les artistes qui décident avec quels outils (qu’ils maitrisent) ils veulent travailler. Imaginez un peu si une maison de disque avait demandé à Jimi Hendrix de travailler avec un accordéon parce que ce serait la mode et que ça vendrait plus. Impensable. Et bien c’est pareil au cinéma. Avatar a ouvert la voie d’une bien belle manière, mais il y encore beaucoup de chemin à faire pour que la 3D relief soit exploitée judicieusement.