La prochaine fois le feu

Publié le 11 avril 2010 par Www.streetblogger.fr

C’est le nom d’un essai de James Baldwin. Un essai puissant, violent qui essaye de dire la colère des captifs, la colère des exclus, la colère des frustrés. La colère de ceux dont on n’entend pas la colère, la colère de ceux qui n’ont que la colère comme recours, ceux qu’on ne voit qu’à travers les effets de leur colère.

Ceux qui sont invisibles, ceux qui accomplissent les tâches ingrates, ceux qui ne sont pas plus remarquables qu’une vaisselle propre et bien rangée ou un couloir au parquet lisse et sans poussière.

Toutes ces mains d’ordinaire consacrées à sortir les poubelles, passer la serpillière, changer les couches. Toutes ces mains du commun, ces mains anodines et peut être même inexistantes, il n’y a que lorsqu’elles se ferment, qu’elles deviennent un poing menaçant que soudainement elles existent.

Il n’y a que dans la menace, la peur, l’agression que soudainement elles apparaissent. Il n’y a que dans la violence qu’elles gagnent le droit à l’existence, il n’y a que dans la haine et le déferlement de rage qu’on se rend compte, tout à coup, que la poubelle ne se sort pas et ne se vide pas seule, que les sols ne sont pas autonettoyants et que pour que nos vies ressemblent à un paradis euro-aseptisé des millions de mains travaillent à l’ombre des projecteurs.

La question qui m’inquiète est alors flagrante, n’y a-t-il que dans la violence que se construit notre rapport à l’autre ?

N’y a-t-il que dans son rôle de menace potentielle que je daigne décerner à l’autre un semblant d’humanité ?

Est-ce ce que signifie la tolérance, tu restes à ta place et tout se passe bien, mais dès qu’il y a des remous je te rejette dans la barbarie et la sauvagerie à laquelle tu as toujours appartenu.

Dès qu’il y a des remous je parle du règne de l’insécurité, des banlieues à problèmes, des populations qui ont du mal à s’intégrer ?

Un chien s’intègre bien à la niche qu’on lui installe au fond du jardin parce que la niche n’est pas contraire à sa nature, peut on en dire autant d’un homme ?

Un homme qui vit trop longtemps comme une carpette sur laquelle on s’essuie quotidiennement un jour se relève et là n’entend rien d’autre que les images de feu de sang et de furie.

La prochaine fois le feu, c’est le titre d’un essai qui hélas me semble dépassé le monde me fait l’impression d’être un brasier.

Merci à Guillaume Laborde pour l'illustration

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