Je n’ai pas aimé Un Tramway. Je n’ai pas « détesté », juste « pas aimé », je me suis ennuyée. Ça m’a rendue triste car je serais plutôt fan de Warlikowski, surtout les opéras finalement. Entre autres, Parsifal avec ce moment assez gonflé où le metteur en scène arrête net l’opéra pour 10 mn de projection d’« Allemagne année zéro » dans un silence de mort (vite rompu par les cris de quelques spectateurs outragés : on veut la musique ! on n’est pas là pour voir du théâtre… – j’adore l’opéra pour ça !) ; et Iphigénie en Tauride, la sublime Affaire Makropoulos, et Angels in America, Krum (mais je l’ai raté), Apollonia pour le théâtre. Toujours exagéré, boursouflé diront certains, un décor hyper présent, des lavabos (un vieux monsieur de mes amis, passionné d’opéras, m’a dit en se tapant la tête du poing « ah non, encore des lavabos ») et puis ça passe, malgré les tics de mise en scène qu’on serait presque heureux de retrouver, la petite « musique triste » est bien là. Du moins « était » là car je ne l’ai pas retrouvée. Isabelle Huppert, sèche comme un coup de trique, phagocyte le plateau, toute occupée qu’elle est à nous démontrer son talent : regardez comme je fais bien la névrosée ! comme je me gratte bien les bras jusqu’au sang etc. Pas beaucoup d’espace pour les autres comédiens, même si Kowalski fait du mieux qu’il peut ; quand aux autres… Le texte de Williams est passé à la trappe, la chanteuse de rock est plombante et les insertions de citations de tout poil paraissent aussi scolaires que les références dans une dissertation de philo de terminale. Je passe sur tous les trucs horripilants qui ont déjà été dits par d’autres meilleurs chroniqueurs que moi (le sac Dior et le tailleur Saint-Laurent étant le comble du ridicule : cette pauvre Blanche n’était quand même qu’enseignante, même amoureuse des fringues ça paraît, soit peu crédible, soit un gros clin d’œil appuyé à l’attention des benêts que nous sommes – regardez comme la société de consommation « des marques » rend les gens malheureux). Bref, aussitôt vu, aussitôt oublié, malgré le concert de louanges France Cultureuses et des amoureux transis de la grande Isabelle. Donc, soit celle-ci a piqué le projet au petit K. sans le laisser en placer une, soit le metteur en scène, souvent plus inspiré, a baissé les bras devant le travail à accomplir.
Je préfère garder cette image : Krzysztof Warlikowski, à l’Opéra Bastille le soir de la générale de Parsifal, saluant crânement avec tous les chanteurs sous les huées et les sifflets, la tête rentrée dans les épaules et un sourire entre provocation, satisfaction masochiste et effarement. À l’Odéon il n’est pas monté sur scène pour le salut final et j’ai préféré qu’il n’y soit pas. Ça m’aurait gênée…
Adeline W