Dans l’avion qui le ramène en France, il est partagé entre la nostalgie pudique d’une époque somme toute heureuse et le retour brutal à la réalité du temps présent et des corps différents. Il craint surtout la rencontre avec Marthe, son grand amour, qu’il a abandonnée lâchement. Il craint aussi le retour de certains souvenirs violents comme ce suicide à seize ans de Bouton d’or, enceinte de l’un d’eux mais nul ne sait de qui et tous se soupçonnent tour à tour.
Diane, la mondaine, domine la situation et fait le lien entre les différentes personnalités qui se retrouvent si longtemps après! Ils ont vécu tant de choses ensemble et bien des secrets vont se libérer au bar, à la fin du week end, quand les bonnes manières se relâchent et qu’avant de se séparer à jamais ils redeviennent tous de vieux ados vachards qui se lancent des vannes, en se disant leurs quatre vérités sur leurs épouses et le reste. Après ce bavardage éméché, ils se séparent à l’aube, conscients d’avoir remis en question toute leur vie en quelques heures.
Quelques exemples :
De Marthe, l’amour abandonné : «Je rêvais d’une autre vie avec elle, d’une vie de correspondance. Nous parlerions de tout, de rien et d’amour aussi, dans nos lettres régulières, sans jamais plus nous revoir et mon amour se fanerait avec sa vie. . Ça se terminerait ainsi : une réponse n’arriverait pas, une lettre ne serait pas lue. Cette perspective faisait ma joie. Elle était en harmonie avec mes espoirs d’aujourd’hui. Mon cœur était d’accord».
" En les revoyant donc de près, tous ces camarades, j’avais pu me rendre compte à quel point le passé était différent de ce que je croyais me rappeler… Je le voyais assez, on ne mûrit pas. On durcit à certains endroits, on pourrit à d’autres. On ne mûrit pas."
"On passe peut-être la première partie de son existence à aspirer au bonheur, la seconde dans l’appréhension du malheur."
« Le malheur ne me rendait pas plus malheureux que le reste. »
« Après vingt ans, c’est fou le peu de choses qu’on a à se dire, soupira-t-elle.
-On a fait tant de bêtises…On n’ose plus récapituler. C’est ça ! »
Joli livre et agréable lecture !
Theoma, au contraire, n’a pas aimé.
Le sérieux des nuages de Denis Baldwin-Beneich (Actes Sud, 264 p.)