Banderille n°335 : Bruire & Braire

Publié le 10 avril 2010 par Toreador

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Par Toréador | avril 10, 2010

L’Affaire du collier de la Reine

A part les ambitions, tout se rétrécit au fil de l’Histoire : les Nations, les hommes, et même les scandales. Sur la case hexagonale du journal des programmes internationaux, un nouvel épisode de notre telenovela préférée « Plus belle la Cour »,  en direct de Versailles-sur-Seine, avec l’affaire du complot de la Rumeur maudite.

Il y a de quoi y perdre son latin dans ce mauvais remake de l’affaire du collier de la Reine, où Rachida Dati jouerait le rôle de la Comtesse de la Motte et où chacun s’interroge pour savoir qui escroque qui.

Le Cardinal de Rohan, par qui le scandale arrive, est le JDD. Et il est vrai que les journalistes sont en train de ressembler de plus en plus aux prélats de l’Ancien Régime. Les gardiens officiels de la morale publique, éminences en robe constituant le seconde ordre après la vraie noblesse d’épée, étaient censés relever d’un pouvoir différent que le pouvoir royal. Mais totalement consanguins avec les hommes dont ils étaient les bergers, déconnectés de leurs camarades de campagne, ils ont fini par être emportés par la chute d’un Régime qui les avaient gangrénés.

L’homme de la pampa, quoique rude, sait rester courtois. Néanmoins, la vérité m’oblige à vous le dire : à force de relations incestueuses entre le Pouvoir et les contre-pouvoirs, c’est tout le système politico-médiatique qui se discrédite.

Mazarinades & Barbouzades

Coté médias, la première faute fut de croire que l’outing de la vie amoureuse de Nicolas Sarkozy constituât un principe de bon fonctionnement démocratique, soit qu’on se réjouisse d’affaiblir « le Tyran », soit qu’on considérât que la transparence absolue des élites est le gage d’une démocratie vigoureuse. Depuis les alcôves des cathédrales parisiennes, sans doute ne voient-ils pas que l’(é)lectorat est surtout tétanisé par les chiffres du chômage et de la crise.

La seconde a été de faire d’une rumeur de machine à café une information, que chacun a propagé en amplifiant sa crédibilité par rapport à la précédente institution. Que la noblesse de plume, écrite (Journal du Dimanche) ou audiovisuelle (France 24) se fasse le porte-voix des derniers ragots du trottoir la ravale au niveau des feuille de chou qui faisaient les délices du bas peuple au XVIIIème siècle. Qui n’a pas sa mazarinade ?

Coté pouvoir, la troisième  faute aura été de mener une contre-offensive foireuse au cours de laquelle Carla Bruni a désavoué le Conseiller en communication de son mari et la DCRI de Squarcini sur l’existence (ou pas) d’un complot médiatique contre le couple présidentiel. Que d’importance donnée à de la bêtise, que de bêtise confiée à la malveillance…

Au final, on n’arrive pas à savoir si les Sarkozy-Bruni ont utilisé cette affaire pour détourner le ramdam sur un sujet périphérique ou  s’ils sont vraiment victimes d’un acharnement, d’une machination ou d’une indélicatesse. Le climat de scepticisme généralisé est tel qu’on image un complot, un contre-complot, une stratégie à trois bandes. On n’arrive pas à comprendre l’enjeu, ni pourquoi la com’ de Charon fut aussi nulle. Et on s’énerve en se disant qu’il y a des sujets plus importants qui auraient mérité d’être traités. Les petites combines de cour semblent dérisoires à un peuple qui veut du pain.

La Nouvelle Starr

Celui qui a finalement raison c’est Jean-Luc Mélenchon qui s’est emporté après le ramdam causé sur internet pour une vidéo où on l’avait piégé. On n’a pas aboli les censeurs pour la voir renaître sous la forme d’auto-censure bien-disante.

Il a raison de pointer une forme de talibanisation médiatique, même si je reste attaché à ma métaphore de la Prélature de Cour, tonnant en chaire le Dimanche et péchant en chair les autres jours de la semaine.

Il a encore plus de raison de partir en croisade, de déclarer la vendetta (comme Michael) : c’est lui, ma nouvelle Starr (comme Kenneth). A ce train, cela ne sera pas seulement la classe politique qui sera qualifiée de « tous pourris », mais aussi la « classe médiatique ». L’ère de la suspicion généralisée est en marche, le mépris du citoyen pour son propre système alimentant la défiance généralisée et le repli.

Il est fini le temps des cathédrales…

Sujets: Banderille, Toréador critique la Droite, Toréador critique littéraire et médiatique | No Comments »

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