9 Avril 2010
Un universitaire américain de l’université de Pennsylvanie donne les chiffres réels du phénomène « pédophile » dans l’Église catholique : « Un petit nombre de prêtres concentre l'essentiel des accusations » dit-il, et c’est dans Le Monde du 8 avril. Le professeur Philip Jenkins est spécialiste de l'histoire des religions, il est l’auteur de Pedophiles and Priests. Anatomy of a Contemporary Crisis (Oxford University Press, 2001).
L’examen précis et rigoureux de la réalité des chiffres permet d’éviter les approximations insensées, comme
celle de la chroniqueuse féministe Caroline Fourest, qui, également dans Le Monde (9 avril) — mais la dame n’avait sans doute pas lu Jenkins — écrit : « La politique du silence est allée
bien plus loin, comme le révèle le nombre de victimes de prêtres pédophiles signalées dans le monde entier. Dix mille victimes ne serait-ce qu'aux États-Unis, selon un rapport officiel de
l'Eglise. Cent mille, selon les associations des victimes. »
Les sources de Mme Fourest sont étranges, mais il est vrai qu’elles ne sont pas citées. À la question : « Dispose-t-on de statistiques sur la prévalence de
la pédophilie au sein du clergé catholique », Jenkins répond :
« La meilleure étude sur le sujet est probablement celle du John Jay College of Criminal
Justice de New York, publiée en 2004, qui examine toutes les plaintes pour abus sexuel déposées contre le clergé américain entre 1950 et 2002. Elle montre qu'environ 4,5 % de tous les prêtres
américains (environ 100 000 hommes sont en activité sur cette période) ont été accusés d'au moins un acte sexuel répréhensible perpétré contre un mineur (en dessous de 18 ans).
Cela dit, ce chiffre surestime probablement la réalité. Même si certains cas n'ont jamais été portés à la connaissance des autorités judiciaires, ce total englobe un grand nombre de cas basés sur
des accusations faibles. Pour une grande partie de ceux-ci, les charges ont été abandonnées. En outre, sur les 4 392 prêtres accusés, près de 56 % ne l'ont été que pour un seul acte.
»
Et pourquoi le nombre de plaintes est si important si le nombre de prêtres pédophiles est si limité, demande
le journal français :
« Si l'on se penche sur l'étude, on constate qu'un tout petit nombre de prêtres
concentre l'essentiel des accusations. Ces "agresseurs compulsifs" sont parfois à l'origine de plusieurs centaines de plaintes chacun. Un groupe réduit de 149 prêtres rassemble à lui seul un
quart des accusations sur un demi-siècle. Le comportement de ces "super-prédateurs" explique un autre résultat remarquable de cette étude : la surreprésentation des très jeunes enfants au sein de
la cohorte des victimes.
Nous arrivons donc à un total de 200 enfants agressés par an, sur toute la période de l'étude, avec une Eglise qui compte entre 45 et 55 millions de membres, et environ 50 000 prêtres en activité
par an.
Quant à savoir si ce chiffre est bas ou élevé, nous n'en avons aucune idée. Aucune étude portant sur un autre groupe religieux, ou sur d'autres institutions en relation avec des enfants n'ayant
été menée avec la même ampleur et le même niveau de détail. Je sais juste que certaines études montrent un taux d'abus supérieur dans les écoles laïques, mais les preuves scientifiques ne sont
pas assez consistantes. »
Pour Philip Jenkins, le drame de la pédophilie dans l’Eglise « s’inscrit dans le contexte législatif, politique et moral de l’époque, et évolue en fonction entre 1950 et aujourd’hui
».
Pour en savoir plus :
L’interview de Philip Jenkins
(Le Monde, 8 avril)
L'étude du John Jay College of Criminal Justice de New York
Cette étude est citée par le sociologue italien Massimo Introvigne dont Liberté politique a traduit un article paru dans l’Osservatore romano : Attaques contre le pape : le décryptage du sociologue (26
mars).
(liberte-politique.com)
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