Après l’adoption difficile de la loi HADOPI, les débats s’enflamment autour du projet de loi de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI 2), adopté en première lecture par l’Assemblée Nationale le 16 février dernier. Première polémique déclenchée : l’opportunité du filtrage des sites pédopornographiques. Décryptage.
En effet, selon l’article 4 du projet de loi LOPPSI 2 :
«Lorsque les nécessités de la lutte contre la diffusion des images ou des représentations de mineurs relevant de l’article 227-23 du code pénal le justifient, l’autorité administrative notifie, après accord de l’autorité judiciaire, aux personnes mentionnées au 1 du présent I les adresses électroniques des services de communication au public en ligne contrevenant aux dispositions de cet article, auxquelles ces personnes doivent empêcher l’accès sans délai.»
Pour rappel, l’article 227-23 du Code Pénal affirme :
«Le fait, en vue de sa diffusion, de fixer, d’enregistrer ou de transmettre l’image ou la représentation d’un mineur lorsque cette image ou cette représentation présente un caractère pornographique est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 Euros d’amende.»
En pratique, le projet de loi vise donc directement les fournisseurs d’accès à Internet (FAI), qui auraient l’obligation de filtrer une liste de sites, dressée par une autorité administrative indépendante, après accord de l’autorité judiciaire.
A tort ou à raison, la toile s’est rebellée contre cet article 4, craignant que la lutte contre la pédopornographie, objectif louable et contre lequel personne ne peut s’opposer, ne serve de «cheval de Troie» à une censure de plus en plus étendue du Web.
C’est à présent au tour des fournisseurs d’accès à Internet, qui, dépassant ces craintes (paranoïaques?) font état d’un argument de poids : l’efficacité du filtrage.
En effet, dans un communiqué du 3 mars 2010, l’Association des Fournisseurs d’Accès (AFA), en ligne de mire de la disposition, liste les critiques qu’elle oppose à la disposition.
Ses arguments sont les suivants :
-le retrait à la source du site Web auprès de l’hébergeur serait plus efficace, dans la mesure où les mesures de filtrage sont contournables.
-le blocage d’un site pourrait contribuer à sa connaissance par le public, contrairement à l’objectif visé par le texte.
-les modèles de coopération européenne et internationale, ayant pour objectif le retrait à la source des sites pédopornographiques, comme celle développée par la Fédération internationale de services d’assistance en ligne en charge de la lutte contre les contenus de pornographie enfantine, seraient une meilleure alternative.
Ces éléments semblent cependant fragiles, car mesures de retrait, de coopération et mesures de blocage, ne sont pas incompatibles, ces dernières pouvant servir de filet de sécurité en cas d’échec des premières mesures, comme c’est déjà le cas au Danemark, en Grande-Bretagne, en Norvège, aux Pays-Bas et en Suède.
Reste que ces mesures n’éradiquent pas le mal à sa source : les auteurs de ces sites. A suivre.
Sources :
-Projet de loi LOPPSI 2 : -Voir le document
-Communiqué de l’AFA : -Voir le document