Auxeméry répond ici à une question de Poezibao, sur l’usage qu’il fait du signe typographique &.
Que dire, que faire ?
Sinon, suivre le fil dans le labyrinthe.
Filer, donc. Mais en crabe. En fumiste. Mais technicien.
En exégète tors, ou retors.
Faisons, pour commencer, une manière de description.
L’& a la forme de l’ombilic, un ombilic assez élégant, presque satisfait.
Presque.
En italiques, elle devient même ceci : & – une sorte de
métaphore de soi, une invite, ou une très élégante échappatoire, on ne sait. Un
ombilic fébrile, et affairé, et pressé peut-être d’en finir…Mais avec
quoi ?
Ou rien de tout cela, d’abord.
Car il s’agit simplement d’un instrument d’écriture, d’un mot-signe, d’un
glyphe, et de haute naissance, d’ancienneté certaine. Et instrument d’utilité
assurée, comme les copieurs des abbayes en inventèrent des dizaines, à fin
d’efficacité. L’&, cependant, a cette particularité d’avoir duré au-delà
des nécessités de son emploi par les travailleurs attelés à la tâche de la
transmission des textes vénérables avant que le caractère mobile et
renouvelable par la machinerie de l’impression ne vienne sceller le sort de
cette fantaisie de gribouillage précis, & fastidieux.
On écrit donc toujours l’& – l’icône est sur le clavier –, on
l’inscrit : clé posée en tête du segment syntaxique, indication sur la
portée ; la portée en prend un air de définitif ; le segment
syntaxique s’en trouve enrichi, ou achevé, accompli de soi-même, en quelque
sorte. De soi-même : « de », disant l’instrumental autant que le
génitif.
Ce signe complète, et il s’affirme ; il termine ce qui est dit par sa voie
propre, et sans autre fioriture que soi. Il annonce qu’il accorde et qu’il
accouple impérativement ce qui doit l’être. La boucle de l’& connecte
l’antécédent au suivant, la matrice au rejeton, le pair au pair. Bref, elle
fait ficelle ou lacet : il y a en elle de l’artifice certes, mais sans
apprêt autre que sa forme, qui recherche l’efficace en stylisant le et
latin. C’est enfin la rapide intrusion qui scelle, ou induit, ou apparie.
Toutefois, toutefois…
Y aurait-il, tout de même, sous ces offres de service, l’amorce d’un
forfait ? C’est ce que je soupçonne, c’est la question que je me pose
moi-même depuis longtemps, et certes, selon des modes de signification qui sont
apparus, avec le métier, dirais-je. Avec la constitution de la trame de
l’œuvre, puisqu’il faut bien se dire qu’avec le temps, justement, on a bâti
cette chose particulière qui s’appelle une œuvre, et dont on ignore le destin,
alors que s’il est une autre chose dont on sait le destin, c’est précisément le
corps écrivant. Qui, lui, ne se relie à rien qu’à sa fin.
Que cache-t-elle, par conséquent, notre &, – laisse ou cordelière, nombril
ou nœud coulant ?
Examinons.
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