Souvent on me parle des arabes, la presse parle de arabes, les méchants petits arabes « malingres et noirs » responsables de tous les maux de la terre, mais jamais on ne parle des Arabes, ceux qui sont formidables, ceux qui sont serviables, ceux qui ont le sens de l’amitié, un sens certainement plus développé que celui de nombre d’entre nous, dans nos contrées civilisées.
Les Arabes d’Arabie sont différents, ils sont sur le continent asiatique au centre d’influences culturelles diverses et variées, ils ne ressemblent pas aux Marocains, aux Tunisiens, aux Algériens, aux Égyptiens, c’est un autre groupe ethnique avec d’autres règles, d’autres comportements.
Je ne parle que de ce que je vois, que de ce que je vis, et j’ai vu en Arabie Saoudite, des personnes respectueuses, humaines, peu encline à la violence, des gens simples, avec dans le regard un émerveillement d’enfant face à la beauté, un respect admiratif de la chose belle, du travail bien fait, un amour de l’autre, bien sûr, lorsqu’il y a le meilleur, il y a le pire et le pire existe également, il y a des gens parfaitement idiots, comme chez nous, des imbéciles, des crétins, des gens peu éduqués et puis il y a la crème, c’est du lait, du miel, c’est le délice, de pouvoir rencontrer des êtres remarquables, intelligents, cultivés, serviables, des êtres qui vous adoptent et qui font de vous un ami de la famille.
Il y a des occidentaux qui vivent en Arabie Saoudites depuis de nombreuses années qui n’ont jamais été invité dans une famille saoudienne.
J’ai été invité dans une famille à manger dans la salle commune avec eux, un repas spécialement fait pour moi, qui ai quelques intolérances alimentaires, la traductrice qui m’avait été attribué me vouait une admiration et une amitié profonde, sa mère m’avait fait envoyer des dates comme je n’en ai jamais mangé, son frère m’avait adopté également car il voyait bien que je respectais sa sœur et que je la protégeais contre les saoudiens mal éduqués.
Lorsque nous nous sommes quitte, il a pleuré comme un enfant de me voir partir, il m’a profondément ému Abdallâh, sa sœur m’avait invité également dans leur maison, un grand honneur pour un étranger, le second qui m’avait été fait.
Alors, aujourd’hui, lorsque l’on me parle des arabes, je ne les mets pas tous dans le même sac, chez les arabes comme chez les juifs, les chrétiens, les africains, il y a des bons et des mauvais, et les généralités me fatiguent, ne devrions nous pas tout simplement dire, qu’il y a des humains formidables et des humains un peu moins ?
Il faut voyager et se noyer dans les populations pour comprendre l’essence même d’un peuple.
Une matinée, j’ai accompagné des artistes, deux jongleurs et deux musiciens qui avaient accepté de donner une représentation pour un centre d’autisme, j’ai proposé mes services en tant que photographe. Cette expérience a été pleine d’émotion et de beauté, de voir ces enfants se réjouir, se lever pour aller chercher la musique dans les accordéons, coller l’oreille à l’instrument, laisser glisser les doigts sur les touches et de voir ces visage s’illuminer face à la beauté des sons émis, c’était bouleversant, j’ai fait des photos, mais je me suis engagé à ne pas les divulguer car les parents souhaitent conserver une discrétion et ils ne veulent pas que leurs enfants soient vus comme des phénomènes de foire, j’ai offert mes photos au centre, pour que les parents voient que leurs enfants sont beaux, et qu’ils peuvent encore éprouver des sensations de joie malgré leur pathologie.
Cette manifestation avait été organisée par une personne formidable, Madame l’Ambassadrice et nous l’avons accompagné avec une grande confiance, nous étions tous décidés à apporter notre petite pierre à l’édifice. Figurez-vous que le lendemain, on nous apportait un certificat signé pour service rendu.
J’ai durant 10 ans fait du bénévolat pour les enfants et pour l’éducation nationale croyez-vous que l’on m’ait remercié ne serait-ce qu’une fois ? Jamais.
Alors, oui, en Arabie, les gens savent vivre, et ils respectent ce que vous faites. Bien sûr, tout n’est pas rose, mais ce n’est pas plus rose ici.
Ce voyage a été pour moi une découverte des autres mais également une découverte de moi-même, le désert n’est pas anodin, il est porteur d’un message, il révèle des choses qui sont enfouies en nous, j’imagine que vous allez rire, mais j’ai eu une belle expérience avec un chameau. On a également trop tendance à mépriser les animaux, et je suis personnellement végétalien, je ne mange aucun mammifère, ce sont mes amis, alors bien sûr, je peux paraître quelque peu idiot lorsque je parle à une chèvre, à un cheval, à un chameau, mais ils nous entendent et ils nous répondent à leur manière.
Lors d’une visite, Je marchais seul dans cette ferme aux chameaux située sur le bord de l’autoroute, et l’on nous avait bien prévenu :
- Attention, ne touchez pas aux chameaux, ils mordent…
Soit, je marchais donc tranquillement et puis je me suis retrouvé devant lui, il était grand, il était beau, il sentait bon le sable chaud, mon beau chameau. Je me suis arrêté devant lui et je lui ai dis comme je le trouvais beau, comme c’était un animal splendide habité d’une belle âme. Il s’est approché de moi et il a mis sa tête dans mes mains, j’ai ressenti une émotion très forte à cet instant, mes camarades m’ont photographié à mon insu et mon ami Fidi, un musicien Malgache, m’avait rejoint pour s’approcher et toucher ce bel animal.
Je ne sais comment dire, expliquer ce qui s’est passé entre cet animal et moi, un profond respect mutuel, une amitié soudaine, je l’ignore, mais la photo est la pour me souvenir de cet instant magique.
Oh je comprends comme cette histoire va en amuser bon nombre, mais qu’importe, cette communion m’a enrichi, et j’ai hâte d’y retourner, de renouer avec le sable, avec la nature, avec ces êtres extraordinaires.
Les gardiens étaient également d’une grande gentillesse et d’un accueil remarquable. Le groupe de chanteur basque qui nous accompagnait a même chanté en choral pour le bédouin l’homme a offert le thé, ce qu’il avait de plus précieux, son eau.
Chacun a eu sa part d’émotion, de petites émotions, des émotions qui ne peuvent se produire que si l’on est disponible et si l’on ne projette pas de regard méprisable face à des êtres que l’on considère à tors, comme inférieurs, ils sont différents de nous comme nous d’eux, rien de plus.
Souvent on m’a demandé ce que je pensais avant de l’Arabie Saoudite et toujours je répondais :
- Que voulez-vous que je pense d’un pays que je ne connais pas ?
Aujourd’hui, je le connais un peu mieux, c’est un pays de contraste, qui n’est pas facile mais qui n’est pas non plus si difficile pour un homme, et c’est encore différent pour une femme, mais c’est un pays peuplé par des gens formidables, ouverts, attentifs, disposés à vous le faire découvrir et qui sont fiers de ce désert, leur terre, leur mère.
Nous vivons une époque formidable…