Nicolas Sarkozy a fixé en avril 2008 l’impératif d’un retour des hôpitaux publics à l’équilibre financier pour 2012, sans nouveaux financements possibles.
Pourtant, la droite a délibérément organisé la faillite financière des hôpitaux publics, en laissant filer leurs déficits pour cause de sous financement : 189 millions en 2006, 479 millions en 2007, environ 1 milliard en 2008, soit des déficits multipliés par 5 en 2 ans.
Conséquence logique, la dette des hôpitaux grimpe aussi en flèche : 201 milliards en 2008 contre à peine 8,2 milliards il y a 10 ans.
Pour combler son déficit, chaque hôpital a dès lors l’obligation d’appliquer un plan de restructuration. La masse salariale représentant 70 % de la dépense des hôpitaux publics, ces plans consistent principalement à supprimer des emplois, de non soignants comme de soignants. En application de ce plan, pour la première fois en 2009 les hôpitaux publics ont perdu 1 800 emplois en France. Et ce n’est qu’un début, puisque compte tenu des déficits structurels des hôpitaux publics (pour cause de sous financement), ce sont 20 000 emplois qui risquent d’être supprimés d’ici 2012 selon la Fédération
hospitalière de France.
Exemples de plans de restructuration 2012 :
- AP-HP : 4 000 suppressions prévues d’ici 2012
- Hôpitaux de Lyon : 800 postes supprimés d’ici 2013 (déjà 200 en 2009)
- Nancy : moins 650 postes prévus (soit près de 10 % de l’effectif)
- Le Havre : 387 suppressions prévues (150 emplois supprimés dès 2008)
- Caen : 208 suppressions prévues
La prime aux cliniques privées
Dans le même temps, la loi Bachelot a renforcé la place des cliniques privées qui devraient largement profiter de la saignée de l’hôpital public pour gagner encore des parts de marché Or la France a déjà le record d’Europe pour la part du privé lucratif dans l’activité hospitalière : 34 % contre 25 % en Allemagne et en Italie et même 0% en Belgique et aux Pays-Bas où le privé lucratif est interdit. D’ores et déjà dans 70 villes françaises, le secteur
privé est en situation de monopole sur certaines spécialités de chirurgie, ce qui oblige les patients à subir des dépassements d’honoraires non remboursés (66 % des dépassements pratiqués en cliniques ne sont pas couverts par les complémentaires santés).
Le taux de rentabilité des cliniques privées atteignait 16 % en 2005, permettant la distribution d’énormes dividendes à leurs actionnaires. La Générale de Santé a par exemple distribué en 2007 un dividende exceptionnel de 420 millions d’euros dans le cadre d’OPA réalisées sur d’autres cliniques. Le groupe privé avec ses 175 établissements continue de
voir son chiffre d’affaires progresser (+3,1 % en 2009).
Loi Bachelot : marchandisation et mise en concurrence de l’hôpital
La loi Bachelot (votée au printemps 2009) ouvre à aux établissements privés la possibilité de choisir à la carte les missions de service public qu’ils veulent exercer.
L’objectif est d’accroître la concurrence entre établissements (publics et privés), mais sans que les mêmes obligations soient imposées au privé.
Le privé lucratif sera ainsi libre d’exercer les missions les plus rentables en laissant au public les missions les plus complexes et les moins rentables notamment l’aide médicale d’urgence.
Par exemple, l’hôpital public fait face au débordement croissant des urgences avec 16 millions de passages par an dont plus de la moitié devrait relever de la permanence des soins (c'est-à-dire des médecins de garde qui disparaissent depuis que la droite a mis fin en 2003 à l’obligation pour les médecins de participer à la permanence des soins)
Organisation et tarification sur le modèle du privé
A travers la convergence tarifaire public privé et la systématisation de la tarification à l’activité prévues dans la loi de financement de la sécurité sociale (la loi Bachelot fait l’impasse sur le financement de l’hôpital public pourtant critique), le gouvernement accélère par ailleurs la mise aux normes de marché des hôpitaux publics. La tarification se fera désormais au volume d’actes, sans tenir compte de la qualité qui peut varier pour un même
type d’acte, ni des complications éventuelles liées à certains patients. Censé inciter à la productivité, ce système de tarification inspiré du privé conduit à un sous financement chronique des hôpitaux publics qui reçoivent les publics les plus difficiles (et notamment les multipathologies des personnes âgées et des SDF). Il conduit les hôpitaux à fermer massivement des lits pour maximiser les taux d’occupation, ce qui conduit à des pénuries périodiques de lits et à des risques de crise sanitaires dont les plus pauvres seront les
premières victimes.
Avec la loi Bachelot, la gouvernance de l’hôpital public sera désormais calquée sur le modèle privé avec un directoire et un conseil de surveillance, où les usagers, les personnels et les élus locaux sont marginalisés.
L’autonomie apparente des hôpitaux est renforcée avec la possibilité pour le directeur de moduler les rémunérations des personnels ce qui va conduire à l’instauration d’un véritable marché des personnels au détriment des hôpitaux déjà en difficultés. Elle va accélérer le pillage de certaines spécialités médicales par le secteur privé et l’impossibilité pour l’hopital public d’offrir à tous l’accès à certains actes (allongement des listes d’attente avec comme seule alternative le privé et ses gigantesques dépassements d’honoraires).
Cette convergence du système public vers les normes du privé se fait au détriment des missions de service public des hôpitaux, obligés de les rogner pour survivre financièrement.
Les établissements vont en effet chercher à sélectionner les malades et les pathologies, en se concentrant sur les plus rentables et les moins complexes.
Restructurations à la hache et liquidation des hôpitaux de proximité
Sous couvert de mutualisation et de mise en réseau des soins la droite va utiliser les nouvelles « communautés hospitalières » ainsi que les désormais toute puissantes « Agences régionales de santé » (ARS) pour accélérer le recul de l’offre de soins. Elle détourne ainsi les objectifs positifs de mutualisation et de décloisonnement qui sont pourtant urgents, compte tenu de la complexité et des inégalités du système de santé.
Le dévoiement voulu de ce système permettra notamment de dissimuler la poursuite de fait des fermetures d’établissements, en les vidant de la plupart de leurs services et en maintenan l’illusion de leur survie via une mise en réseau avec les plus gros hôpitaux et notamment les CHU.
100 000 lits d’hôpitaux supprimés depuis 10 ans
Diminution drastique du nombre de maternités :
1 379 maternités en 1975 / 694 en 2001 / 617 en 2007 / 584 début 2008
= un baisse de 60 % du nombre de maternités alors que la population française a augmenté de 18 % dans le même temps
D’ores et déjà certains départements se retrouvent avec une seule maternité comme le Gers ou la Lozère ce qui démultiplie les risques sanitaires liés à l’éloignement (de nombreuses localités se trouvent ainsi à plus de 45 minutes de l’hôpital, délai considéré comme critique en cas de complications de grossesse)