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Alice (is back) in Wonderland

Par Ashtraygirl

alice in wonderlandAttendue comme le messie (ou presque) par les burtonniens et une bonne partie du reste du monde cinéphilique, Alice (re)pointe enfin le bout de son charmant minois du côté de Wonderland... sans pour autant avoir le moindre souvenir d'y avoir un jour mis les pieds. Il faut dire que ça faisait un bail! 13 longues années. Et que, depuis, un certain Tim Burton est passé par là... Pour le meilleur? Pas sûr...

There is a place like no place on earth...

Tous les ingrédients (de qualité) étaient réunis pour faire de cette adaptation du conte de Lewis Caroll par Tim Burton une expérience unique. Moi qui n'ai qu'une vague connaissance du livre, et qui n'ai jamais apprécié le dessin-animé de Disney, j'étais persuadé que je tenais là, enfin, l'occasion de découvrir ce pays avec des merveilles dignes de ce nom. C'était également l'occasion de faire ressortir les aspects les plus sombres du conte qui, rappelons-le, était initialement destiné à un public... adulte. J'anticipais donc, en bonne burtonienne que je suis, un grain de folie douce, un univers édulcoré aux accents gothiques, un anti-conformisme assumé, un soupçon de noirceur, un peu d'hémoglobine peut-être, un brin de nostalgie et de l'humour (noir) toujours, une profonde ironie en premier plan et une critique acerbe en arrière-plan. Bref, j'attendais du (bon) Tim Burton.

Mia Wasikowska
Hélas! Trois fois hélas! Point de tout cela à l'horizon. Du moins, pas dans les dosages auxquels nous sommes habituellement piqués. L'univers édulcoré cède la place à un panorama numérique de première qualité - presque plus beau que la lointaine Pandora de Cameron - dans lequel les couleurs éclatent sans néanmoins que l'on retrouve la passion furieuse du technicolor déployée dans Charlie et la Chocolaterie, les accents gothiques d'un Sleepy Hollow ne se retrouvant fugitivement que dans les douves d'un château aux allures de carton pâte. L'anti-conformisme relayé dans Edward aux mains d'argent n'aborde pas, ici, les forêts enchantées, se bornant à la campagne londonienne du XIXème transformée, pour l'occasion, en miroir (aux alouettes) digne d'un ersatz austenien dans lequel se reflètent chacun des protagonistes clés de Wonderland. La noirceur se borne au personnage d'Isolovic Stayne qui rapelle, de loin en loin, le sinistre cavalier sans tête. L'hémoglobine a des allures de sang de dragon teint, pour l'occasion, en (ultra) violet, et se voit limitée à trois malheureuses gouttes. De l'ironie je n'en ai que peu - voir pas - perçue, et une critique acerbe encore moins. Le grain de folie, en revanche, est là, en partie, disséminé au travers des divers personnages et incarné, comme il sied, par le Chapelier Fou. La nostalgie elle aussi est bien présente, celle de l'enfance que l'on regarde doucement s'éloigner, irrémédiablement, et celle, plus présente, plus pressante au visionnage, des films merveilleux de ce cher Tim que l'on regardait avant qu'un réal' à la mode vienne nous gonfler avec un de ces produits affreusement formatés... Arf! Suis-je bête... C'est pourtant bel et bien lui qui a dirigé celui-ci. Où avais-je la tête?

alice in wonderland

En fin de compte, j'ai passé le film à attendre que quelque chose arrive. Quelque chose de merveilleux, de prodigieux, de surprenant, de détonnant. Mais rien ne détourne l'intrigue calibrée PG-6 de son cours confortable. Pourtant, j'y ai cru, jusqu'au bout. J'y ai cru quand le Chapelier se remémore les horreurs perpétrées par la Reine Rouge (dans le genre tyran, on a fait beaucoup mieux) qui a osé incendier la garden party de sa soeur chérie, ou quand on a un bref aperçu de ce que les "têtes" deviennent ou, encore quand un échiquier géant apparaît et que... J'y ai cru. Mais rien n'est venu. Rien qui soit vraiment de son fait en tous cas.

De bout en bout, j'ai eu la sensation familière d'un film grand public estampillé de deux grandes oreilles. Pas de violence ostentatoire, pas de phrases de travers, humour bon enfant, lectures sous-jacentes out, hémoglobine au placard, noirceur fardée de paillettes et timing impeccable: pas de doute, on est chez Mickey.

alice in wonderland

Some say to survive it, you need to be as mad as a hatter...

Si l'on met de côté sa déception de ne pas retrouver dans ce Alice la patte si reconnaissable du magicien Burton, il nous reste un film divertissant, dépaysant, et somme toute relativement inventif, qui vaut d'avantage pour sa galerie de personnages stéréotypés que pour ses paysages stylisés.

alice in wonderland
Johnny Depp, evidemment, explose littéralement sous les traits du cintré Chapelier Fou, livrant sa composition habituelle, sans faute, du doux-dingue de service, avec une aisance certaine qui ne lui est pas étrangère. Il déride l'assemblée, fait éclater les moments de tension, apporte une touche de l'univers burtonnien comme si, à travers lui, le réalisateur se permettait une incursion plus personnelle dans cet univers qu'il ne "possède" guère. A tel point que l'on regrette de ne pas le voir d'avantage encore, ou que le film ne s'intitule plutôt "Le Chapelier Fou contre-attaque".

Anne Hathaway, hilarante, se prête à un exercice de style décalé en incarnant la Reine Blanche, planant à 5000 pieds, visiblement adeptes de narcoleptiques ou ayant confondu fard et poudreuse... Complètement barrée, à la fois éthérée et niaise, elle créée la surprise en s'imposant peut-être comme la plus excentrique de tous.

Helena Bonham Carter prête sa tête à la Reine Rouge, et livre une prestation honorable. Celle que l'on nomme la Maudite Grosse Tête passe d'avantage pour une emmerdeuse que pour un tyran, et le fait qu'elle commande tant de décapitations qui ne sont jamais entr'aperçues provoque d'avantage la lassitude que l'effroi. Capricieuse, infantile, elle passe pour une enfant ayant trop vite grandit. Et dans ce cas, c'est réussi.

Tweedledee et Tweedledum, doublés par Matt Lucas, sont un peu les Tic et Tac de la bande. Histoire de rappeler, au cas où ça n'était pas suffisamment clair, que tout ça n'est qu'un conte bon enfant. Tels deux airbags en cas de frayeur passagère (bah oui, y'a un gros méchant chien avec de longues dents), ils ne sont, finalement, que deux ressorts comiques de plus. Bien poilants quand même.

Crispin Glover
Le papa de Marty McFly, euh... Crispin Glover, trop rare, incarne ici l'un des personnages les plus interressants et les plus dérangeants à travers Isolovic Stayne, le valet de sa majesté. Sombre et calculateur, mais doté d'un côté bêta, il représente le danger véritable, un peu comme la figure du Mal(e) au bras armé. Mais inoffensif, bien entendu.

On a également droit à la chenille bleue qui fume le cigare en se prenant pour le sphynx (doublée par Alan Rickman, la classe), au lapin blanc toujours en retard (Michael Sheen) ou hyperactif (Paul Whitehouse) et au divin chat de Chester (Stephen Fry) qui, lui, marquera les esprits à coups sûr.

Demeure Alice, incarnée par la très jolie Mia Wasikowska, qui brille d'avantage par sa présence que par la pertinence de son personnage. En effet, si Alice semble très fidèle à elle-même dans le monde réel, une fois au pays des merveilles, la demoiselle agace un peu (beaucoup). Il y a de quoi être stupéfait de voir une jeune fille se pincer en se persuadant qu'elle se trouve dans un rêve, convaincue du fait, prenant même de sacrées initiatives à maintes reprise, tergiverser ensuite sans fin pour se mesurer à une vilaine grosse bête... Et si tout cela était réel? Pfffffff....

Anne Hathaway
Stop that (Tim)

Je n'avais jamais su déceler, du premier coup d'oeil, un film dit "de commande". Aujourd'hui, c'est chose faite, et le constat s'avère un peu amer. En définitive, je n'ai pas détesté ce film, j'ai juste détesté qu'un réalisateur à l'imaginaire aussi foisonnant que Burton le dirige. A mon sens, c'est un peu comme mettre du foie gras sur une tranche de pain de mie non toastée. C'est dommage. Et c'est la raison pour laquelle je pourrais vous énumérer nombre de défauts à son encontre (oh que oui!), et peiner à lui faire ne serait-ce qu'une éloge. Pourtant, si l'on écarte Burton de la distribution une minute, ce Alice in Wonderland est un sympathique divertissement dans la pure tradition Disney... ce qui n'est jamais foncièrement mauvais.

Plaisant donc, mais décevant.


*Indice de satisfaction:

2_etoiles.jpeg

*1h49 - américain - by Tim Burton - 2009

*Cast: Mia Wasikowska, Helena Bonham Carter, Johnny Depp, Anne Hathaway, Crispin Glover, Matt Lucas...

*Genre: Travaille du chapeau...

*Les + : Des personnages détonnants, bien que stéréotypés. Un univers très léché, de l'action à foison, de l'humour et de la magie. Bon divertissement.

*Les - : Mais que fait Burton?

*Liens: Fiche film Allocine

   Official website

*Crédits photo: © Walt Disney Studios Motion Pictures


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