Ce mois-ci, pour la première fois dans l’histoire de la Premier League, un club, Portsmouth, a officiellement fait faillite et s’est vu placer en redressement judiciaire. Pour rester compétitif, «Pompey» avait creusé une dette de près de 90 millions d’euros. Passé entre les mains de quatre propriétaires différents en une saison, il a finalement perdu le soutien des banques. Et sonné le glas de ses ambitions.
«Contrairement à la France, il n’existe pas au Royaume-Uni de législation particulière pour les sociétés de sports professionnels qui sont ici traitées comme des entreprises commerciales lambda et se lancent donc parfois dans des schémas commerciaux compliqués», explique Rory Miller, professeur en business international, spécialisé dans le football à l’université de Liverpool. «Et entre les clubs, la compétition est féroce pour embaucher joueurs et entraîneurs étrangers à coups de millions d’euros.»
Selon un récent rapport de l’UEFA, l’endettement global des 18 clubs de la Premier League s’élevait en 2008 à la somme phénoménale de 4 milliards d’euros, plus que celui de l’ensemble des 714 autres clubs européens étudiés ! A eux seuls, Manchester United et Liverpool, dont les propriétaires sont américains (la famille Glazer pour Man U, Tom Hicks et George Gillett pour Liverpool), combinent 1,1 milliard d’euros de dette.
Dans le même temps, ces clubs anglais génèrent également des revenus largement supérieurs à leurs voisins européens, notamment grâce aux droits télés colossaux - plus de 1,130 milliard d’euros par an versés pour une large part par Sky TV, au merchandising et aux billets les plus chers du monde (jusqu’à 1 000 euros l’abonnement à Manchester).
Pour sa proposition, le gouvernement s’est clairement inspiré de l’initiative d’un groupe de riches financiers et supporteurs de Manchester United, baptisés les Red Knights (les «chevaliers rouges»), qui souhaitent racheter le club aux frères Glazer, propriétaires depuis 2005. Ces financiers, pour certains fans des Red Devils depuis leur enfance, sont furieux de ce qu’ils considèrent comme une dérive de l’endettement du club. En janvier, les frères Glazer ont émis des obligations pour 600 millions d’euros pour leur permettre de rembourser les intérêts liés à la dette contractée pour acheter le club.
Selon leur plan, encore en cours d’élaboration, les Red Knights rachèteraient 74,9% du club. Mais les supporteurs disposeraient de 25,1%, ce qui leur donnerait une minorité de blocage au conseil d’administration et donc une influence dans la gestion du club.
Le seul hic, c’est que, pour le moment, les Glazer assurent que le club n’est pas à vendre. Et ils ne semblent pas particulièrement émus par le fait que plus de 140 000 supporteurs ont rejoint un groupe de soutien à l’initiative des Red Knights et qu’à chaque match à Old Trafford une immense banderole clamant «On aime Man U, on hait les Glazer» soit déroulée dans les tribunes. Pour Rory Muller, pourtant, «il y aura toujours un prix auquel les Glazer seront prêts à vendre le club. La question est de savoir si les Red Knights sont prêts à payer cette somme». [Via]