Or suite à l'article sur Eric Zemmour, Monsieur (Madame ?) Radnan R. m'a laissé ce commentaire sur le site du Monde :
"Votre texte m’a semblé l’oeuvre d’une personne saine d’esprit tout du long. Mais quand vous avez sottement affirmé que "la plupart des trafiquants sont A et B" revenait à dire que "la plupart des A et B sont des trafiquants", je me suis rendu compte que je lisais un idiot, et je me suis arrêté. C’est triste que notre école produise cela en grand nombre. L’autre solution serait que vous soyiez malhonnête.Les fonctionnalités du Monde ne m’ayant pas offert la possibilité de répondre à Monsieur (Madame ?) Adnan R., qui n’a par ailleurs pas jugé utile de me laisser ses coordonnées, je m’autorise à lui laisser un message ici.
Cher(e) Monsieur (Madame ?) Adnan R.
Outre le fait qu’il m’a toujours semblé possible d’exprimer un point de vue ou une critique sans forcément injurier celui à qui on l’adresse, votre charmant commentaire me laisse à penser que vous aimez les raccourcis sibyllins au moins autant que vous détestez les idiots. Car si toutes les bêtises débitées étaient systématiquement le fait d’idiots, je crains qu’il n’y eût que des abrutis en ce bas monde.
Bien que sans doute vous ne l’ayez pas fait exprès, vous ne manquez d’ailleurs pas d’un certain humour en me reprochant un « synallagmatisme » dont vous usez vous-même (pardon pour ce terme très juridique !). Autrement dit, si je ne crois pas que « la plupart de mes bêtises (ou supposées telles) fassent nécessairement de moi un idiot », je vous accorde volontiers en revanche qu’un idiot devrait avoir beaucoup plus de chances de ne dire que des idioties.
Pour tout vous avouer, je vous ai lu ce matin la larme joyeuse à l’œil et la mâchoire arrimée à l’oreille. Car votre gentille allusion à ma bêtise m’a fait penser à un proverbe Chinois que j’adore : « Quand le sage montre la lune, l’idiot regarde le doigt ». J'espère que vous apprécierez mes efforts pour exploiter les thèmes que vous plébiscitez.Je vous ai montré la lune. Mais je crains que vous n’ayez lorgné que mon doigt cher(e) Monsieur (Madame ?) Adnan R.J’explique.En théorie, vous avez parfaitement raison : les deux propositions ne sont évidemment pas équivalentes ; dire que "la plupart des trafiquants sont des noirs et des arabes" ne signifie pas que "la plupart des noirs et des arabes soient des trafiquants". Maintenant, si vous le voulez bien, cessez de loucher sur mon doigt et observons la lune ensemble.Eric Zemmour dit ceci :
« Mais pourquoi on est contrôlé 17 fois ? Parce que la plupart des trafiquants sont noirs et arabes ».Prenez maintenant la peine de me relire un peu plus attentivement et tentez de faire preuve d’un sens plus abouti de la nuance. J’écris ceci :
…le lien de causalité que suggère audacieusement le petit Eric va plus loin. Car il tend surtout à prouver, non pas que la plupart des trafiquants sont des noirs et des arabes, mais que la plupart des noirs et des arabes seraient des trafiquants. Et que c'est pour cette raison qu'un contrôle accru serait légitime et justifié. Le coupable désigné n'est plus alors seulement le trafiquant noir ou arabe, mais l'ensemble des noirs et des arabes, trafiquants potentiels qu'il convient de contrôler avec une ardeur renouvelée.Selon moi, justifier la systématisation et la multiplication des contrôles d’identité de tout ou grosse partie des noirs et des arabes par le fait que seulement « la plupart (d’entre eux) soient des trafiquants », revient de facto à présumer de la culpabilité de, sinon tous, en tout cas de la plupart des noirs et des arabes. Car dans les faits, ce que dit Zemmour, c’est qu’il est normal d’accroître les contrôles de l’ensemble de cette population, même si seulement une infime partie d’entre elle se révèle véritablement concernée. Ce qui est le cas puisque nous devrions au moins nous rejoindre sur le fait que la proportion de trafiquants parmi l’ensemble de la population (qu'elle soit noire et arabe ou pas) est elle aussi insignifiante.
Il convenait donc de comprendre mon assertion dans sa globalité, sans l’isoler de son contexte, et sans omettre que j’utilisais le conditionnel. Avez-vous entendu parler du conditionnel Monsieur (Madame ?) Adnan R. ?Votre lecture un peu rapide de ma démonstration vous aura sans doute conduit à présumer tout autant rapidement de ma stupidité. Rassurez-vous, cela ne fait pas de vous un idiot. Car peut-être n’ai-je pas été suffisamment clair.L’autre solution serait que la malhonnêteté ne soit pas du côté de celui auquel on pense.
Respectueuses salutations.
PS : je ne saurais vous dire si l’école produit des idiots en grand nombre (je n'y suis pas allé suffisamment longtemps), mais il semble qu’elle produise parfois des cancres : « L’autre solution serait que vous SOYEZ malhonnête ».
Par la même occasion, j’en profite pour inviter Monsieur (Madame ?) « Chedelabarre », à qui je n’ai pas pu répondre non plus, à se référer aux précisions qui précèdent.Monsieur (Madame ?) « Chedelabarre » m’a également laissé un commentaire ; celui-ci était comparable sur le fond à celui de Monsieur (Madame ?) Adnan R., mais ô combien plus drôle et délicat sur la forme, puisqu’il prenait la peine de me donner un cours de logique élémentaire au moyen de "patates".
"Vous parlez de causalité, mais vous ne semblez pas très à l'aise avec la logique. Aussi je vous propose d'utiliser des "patates" pour comprendre les propos de zemmour. Dessiner plein de points représentant la population. Dessiner une patate englobant des points représentant les "arabes et noires". Dessiner une autre patate représentant les "trafiquants". Ce qu'a dit zemmour, est que l'intersection entre les deux patates est plus grandes que la non intersection. Le reste est du procès d'intention."Je confesse avoir tenté de dessiner les patates en question pour m’assurer que je n’étais pas une poire. Sans succès. La démonstration a fini en purée dans mon cerveau…
Je vais devoir me résoudre à l’idée que je suis un idiot.