Ah ! Cruelles cinq heures du soir.
Hunter S. Thompson sera mort une bonne centaine de fois avant que l'on ait compris comment il s'y était pris pour nous embobiner à ce point. Il est mort comme Hemingway, son modèle, & pratiquement pour les mêmes raisons. Seul le calibre était plus petit. Hunter Thompson était avant tout un gros con, un trou de balle fini habillé comme un clown psychotique & qui mettait beaucoup trop de glaçons dans ses verres. Un casse-couilles de première. Une voix unique aussi, un personnage attachant, doté d'une intelligence assez troublante... Dieu soit loué, les éditions Tristram, à qui l'on doit déjà la publication des articles de Lester Bangs ainsi qu'une belle troupe d'éditions/rééditions d'une rare qualité (Sterne, Schmidt, Ballard, Ríos...), nous offrent la biographie que tous les petits punks gonzophiles de notre Belle République attendaient en faisant semblant de faire les rebelles : ça s'appelle Hunter S. Thompson, journaliste & hors-la-loi & c'est écrit par un certain William McKeen, professeur en journalisme sur les rivages ensoleillés de Floride. Eh bien merci Willy. AH ! J'allais oublier, Tristram annonce l'intégrale des Gonzo Papers dans lesquels on devrait retrouver les meilleures perles de Thompson, celles-là même que 10/18 a lamentablement laissé pourrir dans les tréfonds d' un catalogue de plus en plus racoleur. Publier du Belfond ça a tellement plus de gueule. MaisBREF ! ça n'est pas le sujet de ce papier. Alors allons-y Alonzo.
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raccourci dans le texte">Illustration : Ralph Steadman
La vie de Hunter S. Thompson tout le monde, ou presque, la connaît. Du moins dans les grandes lignes. C'est pratiquement l'unique sujet de son œuvre. Ceci dit, le travail de McKeen apporte un flux de précisions plutôt piquantes notamment sur sa jeunesse, passée à Louisville, capitale mondiale du bourbon & résidence du Kentucky Derby qui valut à l'auteur de Las Vegas Parano son premier éclat visible en tant que journaliste &, au passage, la naissance du terme « gonzo ». C'est l'une des rares parties de la biographie (si l'on excepte les premier & dernier chapitres qui sont deux fraises tagada pleines d'amour & d'admiration sans retenue aucune... mais peut-on vraiment s'en offenser ?) où l'on sent que le biographe a du mal à regarder son sujet avec le recul exigé. Quelques pages fascinantes en forme d'absolution a posteriori, un portrait de l'artiste en Tom Sawyer décrit par un McKeen qui regarde avec bienveillance le futur Raoul Duke foutre le feu à son quartier, torturer ses camarades, organiser des bastons monumentales. C'était aussi, sans aucun doute possible, le meilleur joueur de baseball de toute sa génération... Raaaagh que voulez vous ? La légende était déjà en marche. Quelques pages plus loin il en fait presque un martyre lorsque après des années de vandalisme, d'agressions & de grand bordel suprême il se retrouve en prison pour racket & menace de viol. Bon. Fan un jour, fan toujours comme on dit. Hunter Thompson était un sacré chieur. Le genre de gars capable d'écrire une lettre de demande d'embauche en la truffant d'insultes & de menaces en tout genre. Le genre de gars capable de laisser sa femme venant de perdre son troisième enfant lors d'une fausse couche pour sillonner le pays & se mettre à l'envers. Rien de tout cela n'a semblé, à un moment, égratigner l'admiration que les gens qui l'ont connu avaient pour lui. Quand on en arrive a un tel degré de résilience c'est qu'on a faire à quelqu'un dont le charisme est grand comme l'océan Pacifique. C'était sans doute le cas de Thompson. Disons, qu'en plus de ça, il avait un certain style lorsqu'il s'agissait d'écrire ses articles. On sera toute fois reconnaissant à McKeen de nous montrer l'objet de son étude sous un jour un peu moins flamboyant que de coutume. Il donne ainsi une version de son fameux tabassage par les Hell's Angels moins héroïque que celle léguée par la légende thompsonienne. Les Hell's Angels aimaient bien Hunter qui était le seul journaliste ayant eu le courage de venir les rencontrer en personne & passer du temps avec eux pour écrire son livre. Presque un ans pour être précis. Néanmoins les différents témoignages recueillis dépeignent un Thompson grande gueule mais petit slip. Ralph « Sonny » Barger, le chef du gang, raconte qu'à plusieurs reprises, Hunter s'était caché dans le coffre de sa voiture alors qu'une bagarre venait d'éclater. Un autre jour, alors qu'un Hell's Angel se disputait avec sa petite amie & finit par lui mettre une beigne, Thompson s'approcha de lui & commença à le railler, à l'insulter devant toute la troupe. Terrible erreur. Je crois qu'il ne faut pas être extralucide pour savoir ce qui se passa. Thompson rentra chez lui, se pris en photo & offrit à son livre la meilleure publicité qu'il aurait pu espérer.
photo : Hunter S. Thompson
Hunter Thompson pensait souvent à la mort & parlait du suicide comme du « seul acte humain logique ». Il était persuadé qu'il mourrait avant la trentaine & considérait le reste comme du rabe. Malgré ça il était hors de question pour lui de disparaître n'importe comment. Si il devait crever il le ferait quand il l'aurait décidé. On peu parier sur le fait qu'il n'a pas du apprécier la fâcheuse situation qu'était la sienne lorsque Rolling Stones l'envoya à Saïgon pour couvrir la fin de la guerre du Vietnam. Une fois là-bas, il apprit son renvoi du magazine par fax ; la conséquence d'une lettre d'insultes qui fit suite à une énième embrouille avec Jan Wenner. Ce que personne ne savait à l'époque c'est que la groupie en chef de Rolling Stone avait contracté une énorme police d'assurance-vie sur son journaliste. Thompson se retrouva donc en plein conflit sans salaire... ni assurance. A son retour, Wenner plaida la mauvaise blague (plutôt ouais) & Thompson continua de travailler pour lui non sans l'avoir d'abord couvert d'insultes, toutes aussi fleuries les unes que les autres. Lorsqu'on regarde avec recul la carrière, disons, chaotique de Thompson on se rend vite à l'évidence : Rolling Stones fut le véritable journal dont il avait besoin pour s'exprimer & exister comme il l'entendait (personne ne le supporta, lui & ses frasques, autant que ne le fit Wenner & même si ce dernier n'était qu'un petit salopiaud d'affairiste de première – voir ce qu'en pensaient Grover Lewis & Lester Bangs – il y eu toujours une franche amitié entre les deux hommes). Scanlan's, pour qui il avait écrit son article/matrice sur le Kentucky Derby avec les fameuses illustrations de Ralph Steadman, ne vécu pas assez longtemps pour être cette maison là. Que dire du National Observer de ses débuts, extension dominicale du Wall Street Journal (rien que ça), du San Francisco Examiner des dernières années appartenant à la famille Hearst que Thompson raillait sans cesse, de la revue Running qui lui commanda un article sur le marathon d'Honolulu devenu une sorte de Las Vegas Parano hawaïen, de tous ces magazines très sérieux, bien comme il faut, qui firent appel à ses services avant de se rendre compte dans quelle merde ils venaient de se mettre. Il y a des passages vraiment hilarants, comme cette réunion dans un des bureaux du San Francisco Examiner. Un journaliste de la rédaction a été choisi pour servir de nounou à Thompson. Ce dernier est en train de discuter détails avec son rédacteur-en-chef lorsque soudain, c'est la panique : "A ce moment-là voilà que Hunter sort en fanfare d'un placard, me prépare un scotch allongé & me le fourre dans les mains, s'en prépare un autre & le boit d'un trait. Puis, pour je ne sais quelle raison, se met à faire une dizaine de pompes devant moi, se redresse & me serre la main". Un gamin d'une quarantaine d'années vient de passer. On a parfois de grands élans de pitié chrétienne face à la patience & la générosité de ses différents éditeurs qui pouvaient attendre des années (parfois en vain) à payer des avances dans le vent, des notes de frais astronomiques (Thompson fut mis à vie sur liste noire par American Express après ses excès dans les différents hôtels & bars de Las Vegas en compagnie d'Oscar Zeta Acosta dit Brown Buffalo dit Maître Gonzo qui le rejoignit à Aspen après une défaite éclatante de plus d'un million UN MILLION de voix d'écart à l'élection au poste de shérif du comté de Los Angeles. ) avant de recevoir une ribambelle d'inserts, de notes éparses qu'il fallait ensuite organiser, coller, éditer. Mais d'après ce que j'ai vu, ça en valait plutôt la peine.
A la fin de sa vie, star d'une jeunesse néo-hippie un peu ridicule sur les bords, mais surtout enfin reconnu par ses pairs, il était devenu un véritable homme de lettres & ses principaux textes furent réédités dans la prestigieuse Modern Library, sorte de Pléiade beaucoup moins chichi-panpan. McKeen décrit alors Owl Farm comme un salon littéraire où accourraient tout un tas de fans, d'acteurs, de journalistes, d'hommes politiques, d'étudiants défoncés à la kétamine pour écouter la parole du Dr Thompson.
Je ne vais pas plus insister sur les péripéties biographiques. Le livre de McKeen, à bien des égards, se lit comme un roman un peu dingue. Hunter Thompson fait partie de ces écrivains qui eurent une vie aussi remplie que ne le sont leurs œuvres & dans son cas elles étaient de toute façon inséparables. Voilà pour la légende. Mais il y a un aspect que le travail de McKeen met en lumière & que l'on a souvent eu tendance a oublier, surtout de ce côté-ci de l'Atlantique : Hunter Thompson était un véritable animal politique qui marqua son temps... & fit grand peur à quelques uns de ses concitoyens.
photo : Al Satterwhite
L'expression « fear and loathing » (peur & dégoût) apparaît pour la première fois après l'assassinat d'un Kennedy (je ne sais plus lequel... je crois qu'il s'agit de Robert Kennedy, qui était le favori de Thompson pour les élections de 69). Qu'il l'ait réutilisé à l'occasion de nombreux articles ou livres n'est sans doute pas innocent – c'était une balise pour son lectorat qui produisait une décharge dans le cœur même de la chimère que Thompson s'est trimballé toute sa vie : la mort du rêve américain, le grand serpent de mer de tout un tas d'esprits libres & libertaires qui se souvinrent qu'en 1956, déjà, Ginsberg ouvrait son fabuleux Howl ainsi : "J'ai vu les plus grands esprit de ma génération détruits par la folie, affamés hystériques nus/se traînant à l'aube dans les rues nègres à la recherche d'une furieuse piqûre". Peu de gens prennent Las Vegas Parano (Fear and loathing in Las Vegas) pour ce qu'il est vraiment : un cri rageur, travesti & désespéré vomi sur un american way trahi au cœur des néons multicolores de Vegas. Le fait est qu'on a tous plus ou moins vu le film avant lire le livre (c'est en tout cas ce qui s'est passé pour moi), & qu'on l'a fait à plusieurs reprises comme une excuse imbécile pour se défoncer un peu plus... Sainte Merde ! Étions nous déjà, de façon inconsciente, en train de faire un parallèle fatal entre l'histoire hypocrite de notre propre pays & le Mal qu'incarnait la capitale du Nevada ? Étions nous en train de pleureur la fin du Rêve Républicain Français à notre manière ? Eh bien, disons surtout que nous n'étions qu'une bande de morveux pompettes qui pouvaient enfin porter des chaussettes blanches mi-montantes avec nos baskets, entre amis, sans avoir honte. Aujourd'hui encore, lorsque je lis Las Vegas Parano, je ris beaucoup sans vouloir me rendre compte de quoi il s'agit . Le message incrusté dans les replis psychédéliques du livre est vraiment bien caché, mais il est là, sous les multiples couches de camouflage. Thompson fabrique ses textes pratiquement tous de la même manière. Il déblatère à n'en plus finir sur la difficulté d'écrire son papier, les deadlines & les bisexuels qui finiront par avoir sa peau & où est cette foutue bouteille de whisky ?!? Mais regardez juste d'un peu plus près, mettez de côté tout le folklore gonzo & vous verrez alors de quoi il veut vraiment vous parler.
C'est au cours de son voyage en Amérique du sud pour le compte du National Observer que Thompson va poser les bases de ce qui allait devenir le style « gonzo ». Intégration du processus de recherche du sujet dans l'article jusqu'à en faire le sujet lui-même, un subjectivité à faire pâlir le nombrilisme franchouillard le plus dur, interaction constante entre l'auteur & le lecteur, une bouteille de Wild Turckey à portée de main & Bob Dylan comme carburant. Hunter se balade alors avec un bon gros Hemingway sur le dos & ne le lâchera pas jusqu'au moment de se tirer une balle dans la bouche. A cette même période, les prémices de se qu'on appellera bientôt le Nouveau Journalisme émergent du côté de New York sous la plume de Plimpton, Talese, Didion & surtout Tom Wolfe. Thompson y fut associé sans trop être au courant &, à ce point de mes élucubrations, j'ai envie de faire une petite parenthèse en forme de clin d'œil polisson... du moins je pourrais juste attendre que quelqu'un vienne me faire remarquer que Hunter S. Thompson (si c'est son vrai nom, ce dont je doute) n'a jamais fait partie du Nouveau Journalisme ni même qu'il fut « gonzo » & que de toute façon « gonzo » ça ne veut rien dire ce à quoi je répondrais par un gros « Merde ! » avant d'ajouter que Thompson était autant gonzo que Sorrentino était PoMo que Burroughs était beat & que le Nouveau Journalisme n'était qu'une invention perverse de Wolfe qui savait déjà, à l'époque, qu'il aurait du mal à survivre aux années 90 ! Bref... Là où je voulais en venir c'est que c'est pendant cette période, où il traversa le continent sud américain, qu'on voit poindre ses premières réflexions politiques teintées d'humanisme & d'une réelle empathie. Mais c'est vraiment au lendemain des émeutes de Chicago de 1968 que sa conscience politique va se radicaliser. Hunter Thompson malgré ses éternels désirs de Grand Roman reste un observateur de la société américaine assez remarquable, un scrutateur enragé mais lucide, un putain de bon journaliste qui a complètement chamboulé la façon d'appréhender la politique & surtout la manière d'écrire dessus (Fear and loathing : on the campaign trail '72 ou comment révolutionner la couverture médiatique d'une élection présidentielle) & de ce point de vue son énorme fixette sur la mort du Rêve Américain est touchante tant elle a façonné ses écrits, bien entendu, mais surtout sa conscience politique. L'édition 10/18 étant épuisée, je farfouille dans mon affreux paperback Picador à la couverture jaune pisse de The Great Shark Hunt (sans un seul dessin de Steadman... ce qui me semble totalement absurde s'agissant de publier les textes de Thompson... croisons les doigts pour que Tristram en ait au moins un ou deux sous le coude pour les futures parutions) &, étrangement, il ressort de tout ce merdier que Hunter Thompson était un grand moraliste. Délirant & tout ce que l'on voudra... en parlant de délirant : lors du cambriolage du Watergate qui devait mener Nixon à la démission, Thompson était présent. Il buvait du whisky & fumait des joints dans la piscine de l'hôtel... scène qui devait se répéter quelques années plus tard lors du combat du siècle entre Ali & Forman à Kinshasa... Bref ! … délirant & tout ce que l'on voudra donc, mais droit dans ses Converses, incapable de supporter la moindre traîtrise intellectuelle, le plus petit fléchissement des valeurs démocratiques qui étaient sensées diriger le pays qu'il aimait par dessus tout. Hunter Thompson fut un citoyen engagé, un homme de son temps & d'une rare clairvoyance mais desservi par la lourdeur fantaisiste d'un personnage qu'il avait lui-même participé à créer & qui lui échappa assez vite. Ainsi, est ce peut être à cause de cela que ses rares incursions en tant qu'acteur du monde politique se soldèrent par des échecs. J'ai découvert, & à l'avance toutes mes excuses à ceux d'entre vous qui avez voté pour lui, qu'il s'était présenté à l'élection pour le poste de shérif de son comté, déchaînant une vague de panique monstre à l'idée qu'un tel personnage puisse patrouiller en chemises hawaïennes dans les rues pépères d'Aspen. Ses partisans étaient de jeunes freaks fumeurs de dope, quelques hippies & pas mal d'amis. Des passages entiers de Breakfast With Hunter Thompson, le film que Wayne Ewing lui a consacré & qui reste une référence (on va y revenir), le montrent, perruque sur le crâne, comme une sorte de mascotte ridicule, entouré d'une bande d'ados débiles hurlant des « yeah ! » à chacune de ses virgules. Il perdit les élections de peu & personne n'ose imaginer ce que serait devenu le comté de Pitkin avec Hunter S. Thompson comme shérif. Sur ce, arrive la grande désillusion de la fin des années 70. Nixon, la principale source de ses éructations, s'en va. Sa première femme aussi. Le pays plonge dans une sorte d'apathie culturelle & politique... les années Reagan finirent sans doute par l'achever. Du moins en partie.
& puis il y a cette histoire de suicide.
Quelques remarques formelles & certainement agaçantes pour finir. Il y a, comme dans les chansons de Dylan qui durent parfois beaucoup trop longtemps à mon goût, des refrains parcourant le livre de McKeen, des phrases que l'on retrouvent assez souvent & qui pourraient laissé penser qu'il ne s'est pas trop foulé pour l'écrire. C'est bien sûr de mauvaise foi mais cette curieuse impression persiste lors que l'on prend le temps de visionner les deux films dont Hunter fut l'objet ("Gonzo" d'Alex Gibney & "Breakfast With Hunter Thompson" , déjà cité) : il s'agit là de la principale (à certains moments la seule ?) source de McKeen concernant la deuxième partie de son livre, celle où Thompson devient célèbre. Ceci dit, ça n'enlève en rien l'intérêt de l'ouvrage d'autant plus que, à ma connaissance, ces deux films n'existent pas en français, pas même sous-titrés. Sinon, on passera joyeusement sur l'inutile introduction de Philippe « Nouvelle Star » Manœuvre qui n'a d'autre intérêt que d'être un mauvais résumé du livre & qui finit son texte par un malheureux « This Is It ». Manœuvre étant le premier éditeur de Thompson en France voilà donc la caution « rock'n'roll » canal historique dont les éditions Tristram auraient pu se passer. Sans doute faut-il leur être reconnaissants ne pas avoir aussi fait appel à Eudeline... Un détail, rien de plus. Le livre de McKeen à pour lui d'offrir au public français un premier , complet & véritable travail biographique sur Thompson.
J'ai une grande fascination pour des types comme lui ou Lester Bangs parce que leur style sauvage est, à mon sens, une grande rédemption libératrice, j'aime la façon qu'ils ont de se cacher derrière une frivolité feinte pour faire passer un message bien plus chargé. Je crois aussi que j'aime ces auteurs parce qu'ils représentent un certain âge d'or du journalisme, d'une conscience toujours sur le qui-vive, d'un amour des mots absolu. Aujourd'hui, où tout ce que l'on peut dire ou écrire glisse en une fraction de seconde aux oubliettes, il m'est impossible de ne pas ressentir une intense mélancolie pour une période que je n'ai même pas connue & qui faisait qu'un gars essayant de dire la complexité, la perversité du monde derrière sa machine à écrire, un gars essayant de faire de la magie en alignant les mots les uns derrières les autres pouvait encore marquer son temps, les consciences & changer deux trois trucs au passage. Cette conclusion en fanfare & trompettes idéalistes toute chromée mise à part, il me semble que la lecture de Hunter S. Thompson, journaliste & hors-la-loi est aussi indispensable que stimulante. Ce qui devrait largement suffire.
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Ce papier a été écrit en écoutant "Magic Moments" de Perry Como (le Sinatra du pauvre) en boucle, en boucle, en boucle...