« L’immortel » de Richard Berry
Vu au cinéma
Quelques mouvements de caméra superflus ( le syndrome de la gâchette à ressort) et une pointe de sentimentalisme appuyé sur le final gâchent un tantinet le plaisir que j’ai eu à voir ce film .
Un « policier » dans la tradition bien française, comme les écrivait autrefois José Giovanni , sauf que Richard Berry use des ingrédients du jour, pour donner à sa réalisation une couleur très contemporaine. La technique évolue (cascades, courses poursuite, effets spéciaux …), Berry l’adopte , et l’adapte à un scénario parfaitement construit.
Pour écrire « L’Immortel » le comédien-cinéaste s’est inspiré du roman éponyme de Franz-Olivier Giesbert qui relate la guerre des gangs à la fin des années 70 à Marseille « J’ai rencontré discrètement beaucoup de gens, et de fil en aiguille, j’ai obtenu des renseignements qui ont nourri l’adaptation ou permis de construire certains personnages. »
Cette approche sur le terrain rend assez crédible cette vie phocéenne interlope dans laquelle Richard Berry nous entraîne tambour battant . Peu de répits à cette histoire de vengeance et d’honneur incarnée par un Jean Reno des grands jours .Parrain retiré des affaires, mais rattrapé par 21 balles dans le corps , le comédien a la bonne stature, et l’épaisseur paradoxalement fragile du personnage , qui une fois sorti du coma doit bien malgré lui reprendre le chemin de la guerre.
Pour défier celui qu’il pensait être son ami, et pourtant Kad Merad dans la peau du sale type mérite la légion d’honneur. Un contre emploi, difficilement assumé par l’acteur qui nage entre deux eaux . Quand il en ressort c’est pour ménager la chèvre et le chou dans une cérémonie de mariage qui cette fois lui va bien . Le côté piquant du scénario qui déglingue politiques et flics véreux, les truands passant alors pour de respectables bandits d’honneur.
Des truands qui savent aussi bien vivre
Mais très chatouilleux quand même , comme le constate Marina Foïs, dont les enquêtes sur les meurtres dans le milieu buttent toujours sur des absences de preuve, des commissions rogatoires qui traînent des pieds ou des policiers en sous-effectif… L’actrice est très juste dans son rôle de femme-flic, qui se débat avec un passé douloureux et une vie privée déglinguée.
Richard Berry insiste beaucoup sur l’ aspect familial des protagonistes, si cher il est vrai au cœur des mafieux , qu’il ne faut plutôt pas toucher. Pour avoir transgresser la règle, certains vont devoir payer le prix fort, sur les accents d’une musique d’opéra . Le décorum à la fois grandiose et sordide résonne encore des bruits de mitraillettes et des cris des traîtres que l’on découpe à la hachette. Pas de pitié pour les braves .