Les résultats lors des élections régionales ont été catastrophiques pour le MoDem. On peut mettre en cause l’abstention, c’est facile. Cela permet de s’illusionner en s’imaginant que ces abstentionnistes auraient voté pour les listes MoDem.
Seules les listes dans les régions Aquitaine et Basse Normandie ont eu des résultats respectables. Mais « respectable » est un grand mot…
Où que ce soit déroulée l’élection, « l’homme de la rue » indiquait son rejet de François Bayrou. Le « national » a fait perdre, ad minima, de 2 à 4 points dans les régions.
Le MoDem doit-il disparaître ou bien est-ce son identité démocrate qui n’est pas lisible ou intelligible ? Son ou ses leaders, militants, n’ont-ils pas aussi leur part de responsabilité, de manque de réalisme et de maturité ?
L’exemple de Rodolphe THOMAS en Basse Normandie illustre bien l’état du MoDem : électeurs qui exprimaient leur rejet du F. Bayrou, voire du MoDem, mais acceptant de voter pour R. Thomas du fait de son action politique. Son score fut fort là où il était connu (15,5 % à Caen, 40 % dans sa ville) et où existait à la fois une structure MoDem et quelques « personnalités ». Plus on s’éloignait de son ancrage géographique propre et d’équipes MoDem, plus le score s’affaiblissait. Ainsi, ce fut une dégringolade hors de son département.
Qu’est ce que cela démontre ?
- L’absence d’équipes et de personnalités MoDem ne permettent pas de faire échos à une action politique. Il s’agit du manque d’ancrage dans le tissu politique.
- L’image de François Bayrou est devenue au mieux brouillée, au pire négative. Le MoDem national a fait perdre des points à ses équipes régionales… quand celles-ci avaient un ancrage. L’intervention de Marielle de Sarnez sur France 2 dans « Mots croisés », avant le 1er tour des régionales, a rajouté ses difficultés : de suite les électeurs mettaient en cause l’identité, ou plutôt l’absence d’identité politique, en l’occurrence « démocrate », pour faire la cour au PS et endosser le costard de la « gauche caviar », costard que le PS rejette depuis 1993 et sa grande claque électorale…
Le Nouveau Centre et Jean Arthuis se précipitent pour créer une structure dite « centriste », pensant fonder sur le gisant. Les résultats électoraux désastreux du MoDem, s’ajoutant à tous ceux qui ont suivi la dernière présidentielle, nous incitent à nous poser la question : faut-il voir disparaître le MoDem ?
Je répondrai à cette question par une autre : comment se fait-il que le MoDem ait pu faire un bon score en Basse Normandie ?
Par son leader, sa liste et son programme ou plutôt son identité politique.
Sa personnalité : Rodolphe THOMAS, dans son espace géographique, est reconnu pour son œuvre politique, son dynamisme et sa stabilité.
Il a constitué sa liste en se basant sur des élus intégrés dans le tissu politique local.
Légitimité et compétence : bases de la démocratie…
Son programme – l’identité politique – était « démocrate » : politique économique forte se basant sur une vision partenariale de la collectivité publique (avec en sus l’Etat et l’Europe) et des entreprises privées, conscience aiguë des enjeux territoriaux avec une « agence régionale d’Intelligence Economique », politique de création d’emplois chiffrée et structurée, politique écologique ou « développement durable » comme moteur d’avenir par la « green industrie » et les formations nouvelles, investissement dans les transports en commun, etc.
Bref, si l’on reprend le triptyque « démocrate » national : social-libéral, écologique et européen, et qu’on l’incarne localement, l’attractivité se fait.
J’aurai pu prendre l’exemple aquitain, dont la liste est la seule à avoir pu se maintenir au 2d tour. Vous y retrouverez les mêmes ingrédients : ancrage dans le tissu politique local, dynamique de leaders locaux, structure MoDem locale active, programme « démocrate ».
Mais si j’ai pris l’exemple bas-normand, c’est surtout du fait de son échec : 12,5 % dans le Calvados, mais 5 % dans l’Orne et la Manche.
Pourquoi ? Structures MoDem locales « naissantes », fragiles, fragilisées notamment par des états d’âmes et ambitions individuelles déplacées et oniriques, malgré l’investissement de ses candidats.
Ce que je mets donc en cause, ce sont :
- le manque d’ancrage et d’engagement dans le tissu politique local d’équipes MoDem,
- la « démocrature » d’individus qui, comme avait écrit Voltaire : « sont pourris avant que d’être mûrs ». Il est particulièrement regrettable que des militants n’aient pas soutenu – voire fait part de critiques publiques – leurs têtes de liste et leaders indentifiés et reconnus comme on a pu le lire dans la presse concernant par exemple A. Begag, ou aux européennes J-L Benhamias. Ces politiques, de grande qualité et absolument nécessaires au développement du Mouvement Démocrate, sont gâchés par ces comportements de quelques individus.
- l’incapacité du MoDem à mettre en avant son identité politique démocrate : social-libéral, écologique et européen
- les errances du « national » en matière de communication, de stratégie, et pour reprendre le point d’avant, d’identité politique. Ou plutôt la lassitude de la population concernant un MoDem se limitant à n’être que François Bayrou, plutôt que naître Démocrate.
Les socialistes et UMP ont « beau jeu » de prétendre que « démocrate », tout le monde l’est : ce ne serait pas un terme politique identifiant. Mais alors c’est comme pour l’écologie, tout le monde peut s’en réclamer…
Sauf que l’écologie n’est qu’un aspect technique de la pratique politique.
Sauf que « démocrate » est une identité politique, historique puisque dépassant le « libéral » au 19è siècle (qui se limite au partage des pouvoir et la liberté de penser, créer et échanger), et contemporain puisqu’il participe de l’identité politique des « démocrates » américains, des sociaux-démocrates et chrétiens-démocrates en Europe… Pourquoi alors utiliser ce mot de « démocrate » dans leur terminologie politique si l’identité n’existe pas ?
Le problème n’est donc pas qu’il n’y a pas d’identité politique sous-jacente. Le problème est plutôt dans le fait que le MoDem n’en a jamais fait état, tout simplement… qu’il n’a jamais, en quelques mots, comme nous le faisons ici (social-libéral, écologique et européen), affirmé cette identité.
Alors, est-ce qu’un mouvement « démocrate » a-t-il une raison d’être en France ?
Je le répète : oui. Car dès que vous expliquez, explicitez, présentez une politique « démocrate », l’électeur est à l’écoute.
Ce qui mine le MoDem, c’est le « centrisme ».
Je me définie personnellement comme « barriste », et Raymond Barre se disait « centriste gaullien ». Ce que ne supportent plus les Français en général, et les « démocrates » en particulier, c’est justement l’aspect indéfinissable du centre, qui par trop fluctue et prête le flanc à la critique de ses adversaires : une moyenne ? Un mélange gauche / droite ? Une versatilité ? Une inconsistance ? La disparition de l’UDF et la superficialité du Nouveau Centre n’en sont-ils pas les témoignages ?
En remplaçant le centre par « démocrate », le citoyen comprend : équilibre entre public et privé (rôle régulateur de l’Etat), partenariat Etat et initiative privée (soit à une échelle macroéconomique de l’Intelligence Economique, que pratique ainsi la Chine, la Russie, le Brésil ,l’Inde et… les Etats-Unis), égalité des chances (donc rôle primordiale de l’Etat dans l’éducation, la santé et la justice sociale), et Etat impartial (justice, sécurité, impôt et ainsi comptes de la Nation). Il s’agit donc non d’un retour d’un Etat pour une économie administrative, mais de la force de l’Etat comme régulateur et partenaire, du partenariat entre l’Etat impartial et une société libre, complémentarité et équilibre.
En cela, le « démocrate » dépasse la notion étymologique de la Démocratie du suffrage universel et de l’intégration de toute la géographie de ses territoires et de tous les corps de son tissu social. Le Démocrate a pour moteur l’égalité des chances et l’épanouissement de tous les citoyens. Cette vision de l’intérêt général et de l’équilibre rend le Démocrate particulièrement « gaullien ».
Et cette vision gaullienne de l’Etat stratège, régulateur, et impartial, est la vision permanente et pérenne de l’identité « nationale » : c’est la République, et c’est le sens moderne de « social-libéral » : dynamique et créativité du privé, avec pour partenaire un Etat fort et stratège.
Ecologique, le Démocrate l’est de par les notions d’intérêt général, d’avenir partagé. Mais il s’agit d’un écologisme « durale » pour tous, et non d’une vision « décroissante » de Verts et autres tartuffes. La décroissance, c’est le chômage généralisé, c’est un ultra conservatisme régressif. Là encore, Etat et créativité du privé sont complémentaires pour donner des axes pour l’un, et créer des réponses pour l’autre.
Européen : parce qu’aujourd’hui, c’est le manque d’Europe qui affaiblit dangereusement tous les Etats européens. Cessons de perdre notre temps avec les eurosceptiques : ce sont la puissance, la structure étatique, et l’unité de commandement qui font la force des Etats-Unis, de la Chine, de l’Inde, du Brésil et de la Russie. La dilution des Etats européens, recroquevillés sur leurs intérêts particuliers, en font des faibles, des proies pour les Etats que je viens de nommer. Le « vieux continent » ne l’est vraiment que parce que ses Etats européens sont séniles : peureux, égoïstes, et retraités du « pré carré » façon Pétain. L’Europe a une monnaie qui l’a protégée des aléas des prix des énergies fossiles et amorti les conséquences de la crise financière mondiale. Mais elle doit impérativement avoir une politique stratégique économique avec une structuration partenariale Europe/Etats européens et régions (énergies, espace, transports aérien et ferroviaire, nouveaux matériaux, robotique, armement), et une politique de défense commune (projection et arme de pacification).
Social-libéral, écologique et européen : à partir de ces critères le Démocrate s’identifie et argumente. Il est alors une alternative crédible, et le ton « barriste » (où est passé J. Peyrelevade ?) doit être à nouveau initié car les Français l’attendent, complété des F. Bayrou, A. Begag, J-L Benhamias, Y. Werhling ou encore R. Thomas.
Croyez-vous que les Français désirent vraiment le retour de la gauche avec l’alliance communiste-socialiste-Verts ? Croyez-vous qu’ils aient confiance dans ce mélange archaïque et irresponsable de ceux qui veulent unir une vision administrée de l’économie, et ceux qui veulent la « décroissance écologique» !
Et les Français sont désespérés par l’UMP et son mélange sarkozien des « néolibéraux » et « néoconservateurs ». Ce mélange est un échec partout dans le monde, et l’est aussi en France, même si la crise mondiale a empêché tous ses méfaits. Dérégulation, affaiblissement de l’Etat, inégalités comme moteur, apparence sécuritaire, en y ajoutant les épices strictement sarkoziennes de « bling-bling » et du mépris des convenances républicaines (le fils Jean Sarkozy dans l’Epad aura été, je pense, la goutte de trop qui fit déborder la vase).
Il ne s’agit plus de « rupture ». Il y a effectivement à présent une fracture, non plus sociale, mais française.
L’arrivée au gouvernement de chiraquiens et villepinisés n’y changera rien. L’ouverture au sein de la droite française butte sur le manque d’alternative réelle. Les présidences Chirac incarnaient l’immobilisme, dans la continuité du 2d mandat mitterrandien (après les « folies socialistes »).
Le conservatisme de la droite française s’était cherché une apparence de mobilité avec la « rupture » sarkozienne, comme le conservatisme de la gauche en générale et du PS en particulier fait de même avec la « rupture » écologiste des Verts. Les résultats sont toujours aussi traumatisants pour les Français et dramatiques pour la France.
Les Démocrates doivent donc, plus que jamais au regard des limites de l’UMP et du danger du mariage PS-Verts, assumer leurs responsabilités.
Comment ?
En mettant en avant son identité et ses personnalités, en se structurant à l’intérieur du tissu politique local (associations, conseillers municipaux, mise en avant d’élusdes territoires tels que les maires et conseillers généraux), pour répondre à la double question du citoyen : compétence et légitimité.
Mais il faudra aussi admettre les limites actuelles du MoDem : dépasser l’ « univocité Bayrou » et lancer un appel aux démocrates, pour constituer un forum des Démocrates avec les sociaux-démocrates au sein du PS, les écologistes « durables » au sein des Verts/Europe Ecologie, Alliance des Ecologistes Indépendants (MEI et Génération Ecologie), des Radicaux de gauche et Valoisiens, des « gaulliens » de la droite et, pourquoi pas, des réalistes pas forcément carriéristes au sein de NC.
Ce « forum des Démocrates » pourrait permettre une complémentarité dans le maillage géographique et des personnalités. Mais il aurait pour obligation de présenter, systématiquement, des candidats « démocrates » à chaque élection pour apporter l’alternative aux citoyens.
La vassalité auprès de l’UMP ou du PS n’a qu’un seul destin : l’inutilité et la disparition. Inutilité pour la France et les Français, disparition d’une alternative politique.
Aux Démocrates d’assumer.