Auteur : Karen Maitland
Titre original : Company of liars
Éditeur : Sonatine
1ère édition : 2008
Nb de pages : 193
Lu : Avril 2010
Ma note :
Résumé
1348. La peste s’abat sur l’Angleterre. Rites païens, sacrifices rituels et religieux : tous les moyens sont bons pour tenter de conjurer le sort. Dans le pays, en proie à la panique et à l’anarchie, un petit groupe de neuf parias réunis par le plus grand des hasards essaie de gagner le Nord, afin d’échapper à la contagion. Parmi eux, un vendeur de saintes reliques, un magicien, une jeune voyante, un conteur, une domestique, deux musiciens italiens, un peintre et sa femme enceinte. Neuf laissés-pour-compte qui fuient la peste mais aussi un passé trouble. Bientôt, l’un d’eux est retrouvé pendu, puis un autre démembré, un troisième poignardé… Seraient-ils la proie d’un tueur plus impitoyable encore que l’épidémie ? Et si celui-ci se trouvait parmi eux ? Toutes les apparences ne vont pas tarder à s’avérer trompeuses et, avec la mort qui rôde de toutes parts, les survivants devront faire preuve d’une incroyable sagacité, au milieu des secrets et des mensonges, pour trouver le mobile des meurtres et résoudre l’énigme avant qu’il ne soit trop tard. Avec cette formidable évocation du Moyen Age, d’un réalisme stupéfiant, saluée comme un événement majeur dans le monde entier, Karen Maitland nous offre un roman qui captive et ensorcelle le lecteur jusqu’à l’incroyable coup de théâtre final. Rarement authenticité historique et sens de l’intrigue auront été conjugués avec un tel talent. Indispensable !
Mon avis
Si vous êtes amoureux du Moyen-Âge vous ne pourrez pas passer à côté de ce bijou. Karen Maitland nous restitue une époque sombre et fascinante, avec une dextérité impressionnante. Pas de superflu ou de spectaculaire, les ambiances, les personnages, les mœurs nous sont dépeints avec un réalisme saisissant.
Le narrateur, un vieux camelot vendeur de fausses reliques, nous invite à suivre sa compagnie, formée de personnages hétéroclites et hauts en couleurs. Habitué à la solitude et la préférant à la compagnie des hommes, le camelot se verra contraint de voyager avec plusieurs individus d’origines diverses. Fuyant la peste qui commence à sévir en Angleterre, l’insolite compagnie va entamer un voyage à travers le pays, prenant soin d’éviter les villages atteint par l’épidémie.
Les relations entre les membres de la troupe sont complexes et pas toujours sereines. Les protagonistes ont tous quelque chose à cacher, un passé trouble ou une fausse identité. Menacés par la peste et obligés de fuir, ils devront faire avec leurs différences et leurs secrets.
Le lecteur est rapidement immergé dans le récit, les personnages sont tous très fouillés et réalistes. Les relations qu’ils développent entre eux ne sont pas toujours tendres, mais des amitiés se nouent, tandis que des animosités transparaissent.
L’atmosphère lourde d’un pays gagné par la pestilence transparait avec une étonnante efficacité. La part d’ombre des personnages ajoute à un aspect malsain (dans le bon sens du terme !) et on suit tout ce petit monde avec un intérêt grandissant jusqu’au premier cadavre.
Pour les impatients, sachez que la première victime n’apparait qu’au milieu du livre, ce qui peut paraitre un peu tardif, mais la « mise en situation » vaut le détour. Tout se joue sur la durée, au rythme d’un périple où le temps semble s’être arrêté, à une période bien sinistre du Moyen-Âge. La pestilence n’est pas le seul danger encouru. Les relations parfois conflictuelles entre certains personnages laissent présager quelques surprises.
Les secrets pourtant bien gardés sont habilement distillés, et l’on finit par les deviner, du moins en partie. L’un d’entre eux m’a paru un peu (beaucoup) gâché à la page 395, qui dévoile une sacrée bonne partie du dénouement. Grand dommage ! mais je suppose que sans cet indice gros comme une maison, la révélation finale aurait peut-être paru trop artificielle. Pourtant, lorsque l’on comprend, on repense à quelques aspects effectivement étonnants, qui peuvent surprendre vu le personnage, son époque et le contexte. Mais je n’en dis pas plus !
Le final n’est toutefois pas complètement gâché, il reste quelques rebondissements, même si dans l’ensemble, « on s’en doutait un peu« .
Une magnifique lecture, une reconstitution minutieuse d’une époque fascinante et trouble, superbement documentée.
Une belle découverte !