![Le Pouvoir Esthétique, Baldine Saint Girons Lepouvoiresthetique](https://media.paperblog.fr/i/305/3051584/pouvoir-esthetique-baldine-saint-girons-L-bnJr7W.jpeg)
On parle du pouvoir de la raison, du pouvoir politique, du pouvoir de la
science, du pouvoir des armes, du pouvoir économique, du pouvoir de
l’argent, de celui des corps, du sexe qui sont les enjeux d’une course
infinie, mais il est un autre pouvoir, moins «médiatique», plus secret
mais néanmoins d’une vigueur insoupçonnée: le Pouvoir Esthétique. C’est
de celui-ci dont le livre de Baldine Saint Girons s’essaie à dénouer les
fils, à mettre à jour les efficaces, les magies et les sortilèges.
Le
Pouvoir Esthétique est le pouvoir premier, naturel et indépendant (non
auxiliaire ou instrumental comme la richesse ou la réputation) propre au
sensible: capacité d’avoir des impressions, capacité d’en produire,
recevoir et générer. En amont et en aval de l’Art. Mais, et c’est ce que
montre Baldine Saint Girons, il ne se réduit pas aux beaux-arts,
n’embrasse pas que le domaine du beau. Il concerne aussi toutes les
activités humaines et les instruit, car, nous le savons, rien n’apparaît
en dehors de la sensation: la parole est audible, les corps sont
visibles, les parfums nous enivrent, le vent, le soleil embrasent notre
peau. Bref, pas de monde sans sensation. Et c’est du monde
essentiellement dont il est ici question. Et du monde le plus
contemporain qui soit, celui du Spectacle tautologique, omniprésent,
universel. Après avoir fait une généalogie savante de la
thématisation du Pouvoir Esthétique [Beau/Sublime/Grâce;
Plaire/Inspirer/ Charmer] dans la Tradition: Aristote, Hobbes, Burke,
Baumgarten, Kant, Hegel, Winckelman, etc., l’auteur ne manque pas de
répondre à la provocation de l’Image moderne-essentiellement visuelle,
plastique, immédiatement mobilisable, manipulable, analphabète, telle un
argument de type nouveau, étalée dans le visible et assénée par lui.
Car
l’Image, loin d’être l’outil des autres pouvoirs, possède son
autonomie, son propre génie, son propre vertige. Et règne aujourd’hui
sur la circulation des jeux de plaisirs et de domination, en maître
insoupçonné et inflexible de nos vies. Mille exemples en témoignent:
l’écran télévisuel autophage, l’infinie mise en scène politique, la
planétarisation des icônes Michaël Jackson, Lady Di, ou Obama, la
«fashion victimisation» consentie et voulue, etc. «le problème n'est pas de juger la manipulation esthétique: on ne
saurait la condamner ou la légitimer a priori, comme si elle était un
mal ou un bien en soi. Il est d’en reconnaître l’efficacité, d’en isoler
et d’en démonter les mécanismes. Une manipulation esthétique en
remplace toujours une autre, car nous sommes des êtres sensibles et
impressionnables, toujours piégés et dupés; mais il appartient de
repérer comment procède le piège, la nature de ses lacs et les moyens de
nous en préserver».
http://isabelle-bonzom.org/fr/baldine_pierre_blanc.html