Malaisie : le nom d’Allah interdit aux chrétiens

Publié le 03 avril 2010 par Roman Bernard

1. Au nom d’Allah

Au mois de mai 2008, le «Haut conseil national de la fatwa» de Malaisie ordonnait que le nom «Allah» ne puisse être employé que par les musulmans et qu’en aucun cas les chrétiens ne pouvaient l’utiliser pour nommer Dieu au cours de leurs sermons ou dans leurs écrits. Mais le 31 décembre 2009, la justice malaisienne a cassé cette décision, en donnant l’autorisation au journal catholique Herald Weekly (14 000 exemplaires) d’utiliser le nom d’Allah dans ses colonnes pour désigner le Dieu des chrétiens dans ses éditions en malais (destinées aux fidèles catholiques de Bornéo). Sur ce, le père Lawrence Andrew, rédacteur en chef du Herald, s’était écrié, non sans candeur, que tous les citoyens de Malaisie, au-delà de leurs différences religieuses, pouvaient enfin se dire les citoyens d’une seule et même nation. Mais trois jours plus tard, le gouvernement malaisien, brandissant la décision du susmentionné «Haut conseil national de la fatwa», annonçait qu’il faisait appel. La Haute cour de Malaisie a aussitôt suspendu l’autorisation accordée au Herald Weekly d’user du nom d’Allah, alors même que ce nom est utilisé par les chrétiens de certains pays musulmans (Égypte, Syrie, Indonésie).

2. Réaction des islamistes

Quoiqu’il en soit, le vendredi 8 janvier, plusieurs manifestations de musulmans se sont déroulées devant les deux principales mosquées de Kuala Lumpur au cri de « Nous ne laisserons pas le mot Allah être inscrit dans vos églises », « L’hérésie prend naissance dans la mauvaise utilisation des mots » ou « Allah n’est que pour nous ». Le jour même, trois églises étaient la cible de bombes incendiaires et depuis, les attaques contre les lieux de culte chrétiens n’ont cessé de se multiplier. Durant la semaine du 18 janvier, l’église Sainte-Elizabeth, située dans la ville touristique de Kota Tinggi (État de Johor), a ainsi été vandalisée.

3. Risque de dérapage

Le risque de dérapage est réel dans un pays qui, sur 28 millions d’habitants, compte 60 % de musulmans, 19 % de bouddhistes, 9 % de chrétiens, le reste se répartissant entre plusieurs autres confessions et traditions, notamment hindouiste. Ethniquement, la population de Malaisie se répartit, pour l’essentiel, entre 61,4 % de Malais, 23,7 % de Chinois, 7,1 % d’Indiens.

4. Islamisation rampante de la Malaisie?

Longtemps considérée comme un pays musulman majoritairement modéré, la Malaisie serait aujourd’hui en proie à un processus sournois d’islamisation, dont l’affaire du nom d’Allah, que nous venons d’évoquer, ne serait qu’un des multiples symptômes. Avoir des rapports sexuels dans une voiture est désormais passible de la flagellation et de trois ans de prison. Un musulman surpris à consommer de l’alcool par la police religieuse, qui désormais sévit partout, est passible de six coups de fouet et d’un an de prison. Tout citoyen malais reçoit, dès l’âge de douze ans, une carte d’identité nommée MyKad; cette carte mentionne la race et la religion du titulaire, ce qui n’empêche pas que tous les Malais sont d’autorité considérés comme musulmans. Et il est pratiquement interdit aux musulmans d’apostasier, cela va sans dire. Et les tribunaux civils n’ont plus, depuis 1988, aucune compétence sur «n’importe quelle matière» relevant de la juridiction des tribunaux islamiques. Dans la majeure partie des 13 États de la fédération malaise, ceux qui tentent de persuader un musulman de se détourner de sa religion sont passibles d'une amende de 10 000 ringits (2 653 $) ou d’une peine d’un an de prison. Le PAS (islamiste), détient actuellement le pouvoir dans deux États de la fédération sur treize mais il vise clairement le pouvoir fédéral et a, d’ores et déjà, rédigé un projet d’État islamique pour la Malaisie.

Éric Timmermans

Sources :

« Utilisation du mot "Allah" par les chrétiens : trois églises incendiées en Malaisie », AP, 7h44

« Un débat autour du mot "Allah" dégénère en Malaisie », F.G. (LeFigaro.fr) avec AFP, 08/01/2010,13h05

« En Malaisie, pas de droit de citer pour "Allah" », Arnaud Vaulerin, Liberationfr, 12/01/2010, 00h00

« La Malaisie se déchire au nom d’Allah », Florence Compain, LeFigaro.fr, 29/01/2010, 19:29

« Islamisation sournoise en Malaisie: même l’amour est interdit à Kuala Lumpur », Ftouh Souail (Tunis), drzz.info, mardi 6 octobre 2009