Thomas Mery - Des Larmes Mélangées de Poussière
Publié le 03 avril 2010 par Hartzine
Un timide sourire trouble mon visage salement matinal. Bien sûr, j’ai perdu un fidèle compagnon de nuits sans sommeil. Mais Les Boutiques Sonores viennent de rendre à mon imaginaire d’éternel étourdi l’une des voix les plus poignantes de notre grand bug de l’an 2000. Thomas Mery - ancien membre du groupe parisien Purr dont le disque Whales Lead To The Deep Sea (Prohibited Records - 1997) constitue encore un Everest pour la scène indé rock française - sort Des Larmes Mélangées de Poussière, un EP enregistré par Miguel Constantino, que l’on retrouve le temps de quelques accords sur Sinal Fechado, tout comme Stéphane Bouvier et Jérôme Lorichon - anciens membres de Purr - à la clarinette, à la basse et à la batterie sur Aux Fenêtres Immenses. Après un premier album entièrement chanté en anglais, A Ship, Like a Ghost, Like a Cell (Dora Dorovitch / Shif-t - 2006) où l’épure instrumentale folk sublime l’expression d’une sensibilité à fleur de peau, Thomas Mery égraine dans Des Larmes Mélangées de Poussière trois morceaux polyglottes (français, anglais, portugais) à la beauté diaphane, où le dépassement de soi et des linéarités traditionnelles insinue une entièreté émotionnelle hors du commun. Remémorant la mue pop de Purr lors d’Open Transport (Prohibited Records - 2000), Aux Fenêtres Immenses offre, du long de ses onze minutes éthérées, une incartade poétique dans un imaginaire fragmenté, carénée d’une trame rythmique virtuose. Une luminosité évanescente s’en dégage, répercutée à nos oreilles tant par la richesse des textes - subtil collage comportant aussi bien des citations de carnets de Leonard De Vinci que du Miroir de Tarkovski - que par la subtilité d’une clarinette capitonnée d’un velours intimiste. Un brin déstabilisé par la nudité d’une âme ainsi exposée, l’intense contemplation qu’évoque Ça se pare d’un écrin mélodique d’une profondeur n’ayant d’égale que sa sobriété, quand Sinal fechado, reprise de l’auteur-compositeur brésilien Paulinho da Viola, clôture Des Larmes Mélangées de Poussière par la fragilité d’un chant suggérant le déchirement, la séparation. Si quelques ingénus qualifiaient naguère de ghost folk sa musique, cet EP - dont l’édition vinyle blanche concoctée par Ohayo Records et Les Boutiques Sonores Records est magnifique - indique qu’au contraire, Thomas Mery, aux confins des sensibles, préfère dévoiler sa générosité bouleversante au grand jour que drapé d’ombres acrimonieuses. On ne saura lui reprocher, en attendant impatiemment la suite.
Thomas Mery, Andromakers, The Two, Porco Rosso, Dantès, BS Party, 13 mars 2010, Les Trois Baudets
Invité à m’immerger dans le cadre intimiste des Trois Baudets, lors d’une soirée organisée le 13 mars dernier par Les Boutiques Sonores, c’est avec un plaisir non dissimulé que j’ai retrouvé Thomas Mery, accompagné pour l’occasion par ses anciens acolytes de Purr, Stéphane Bouvier à la clarinette et à la basse et Jérôme Lorichon à la batterie. Le concert donné par le trio d’un soir insuffla une intensité rare, celle où la musique se suffit à elle-même et n’a pas besoin de volume pour résonner fort et longtemps dans nos têtes. S’il est difficile de ne pas regretter la brièveté de cette éphémère reformation, la richesse de la programmation sut consoler les oreilles d’un public venu en nombre : de la pop mélodieuse et enjouée de The Two à l’électro texturé du duo féminin Andromakers - dont la pureté des voix et la vitalité du jeu de scène relèguent Telepathe loin, très loin… - de éclectisme jouissif de Dantès à la pop grand angle de Porco Rosso, chacun y puisa sa part de rêve gardant secrètement le souvenir d’une nuit délicieusement mémorable.
Thomas Mery - Ça
Tracklist
Thomas Mery - Des Larmes Mélangées de Poussière (Ohayo Records, BS Records, 2010)
1. Aux fenêtres immenses
2. Ça
3. Sinal fechado