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Exit le fantôme de Philip Roth (Prix des libraires)

Par Ngiroux

Exit le fantôme de Philip Roth (Prix des libraires)Nathan Zuckerman, 71 ans, éternel alter ego de Roth, écrivain célèbre se rend à New York pour consulter un urologue.  Suite à l’intervention, je me voyais déjà faire des longueurs dans la piscine de l’université, vêtu d’un maillot de bain ordinaire ne laissant plus derrière moi un filet d’urine. Zuckerman avait passé ces onze dernières années seul dans une petite maison perdue en bordure d’un chemin de terre au fin fond de la campagne au nord de New York.  Un des plaisirs notoires de la vie en ville : des inconnus qui entretiennent la chimère de l’harmonie entre les humains en mangeant ensemble dans un bon petit restaurant. Une petite annonce retient son attention : jeune couple d’écrivains, la trentaine souhaite échanger leur appartement pour une retraite rurale tranquille, échange immédiat, dans l’idéal pour un an.  Il rencontre le jeune couple Billy et Jamie et c’est le coup de foudre. Zuckerman réapparaît, son insatiable penchant pour l’élément féminin.  Elle exerçait une puissante force d’attraction sur moi, une force gravitationnelle sur le fantôme de mon désir.  Cette femme était en moi avant même d’être apparue.

Zuckerman écrit une conversation imaginaire avec cette nouvelle passion Jamie : mon carnet de bord consignait, pour soutenir une mémoire défaillante, ce que j’avais fait et ce que j’étais censé faire. Apparait dans le paysage urbain Kliman, un jeune homme agressif, provocateur, dans la force de l’âge, écrit la biographie de Lonoff, écrivain fétiche de Zuckerman, ce biographe néophyte entend dévoiler un passé d’inceste avec la demi-sœur de Lonoff.  Mais notre narrateur ne l’entend pas ainsi. Les hommes âgés détestent les plus jeunes : lâchons la bride à l’intensité ! Lâchons la bride à l’humeur belliqueuse ! Voilà que l’esprit batailleur d’antan venait me redonner vie et me poussait à réendosser mon rôle d’antan.

Roth exploite ici avec brio le temps, l’irrésistible force du temps et son ravage autant physique que mental le génie de l’amnésie, le démon de l’oubli, au pouvoir de destruction duquel je ne pouvais opposer aucune riposte efficace.  Zuckerman a-t-il encore sa place dans ce New York, l’effroyable doute s’installe, ma carte d’adhérant est périmé, va-t-en !

Dans l’ensemble un excellent roman, un Roth tout autant singulier que ces précédents, sauf cette conversation fictive qui a fini par m’agacer, trop longue, trop de place dans ce récit. Et quelle fin étrange !

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