Larguer les amarres

Alors, je hisserai les voiles.

A l'heure où Morphée vous tiendra en ses bras,

Je larguerai les amarres de mes mots.

Ils se glisseront entre les paupières closes des étoiles.

Mon navire prendra le large avec sa cargaison de rêve.

De port en port, il ouvrira des pupilles de bonheur,

Chargera, derrière le syeux ouverts une nuée d'horizons,

De vents, de vagues, d'embruns et de fragilité.

C'est juste un temps pour goûter, loin de l'agitation des ondes,

Aux délices de se laisser porter par la houle discrète du temps.

C'est juste une parenthèse de silence,

Pour permettre à vos yeux de passage de revenir sur leurs pas,

Lire et relire les pages un instant délaissées,

Galaxies de mots lâchés, en nuées d'oiseaux migratoires.

*

Ce n'est qu'un mouvement provisoire.

Une musique ne brille que par les silences qu'elle sait ouvrir.

La mienne a besoin, après quatre années d'errance sans repos,

De se brancher sur les dunes,

De regarder le phare s'allumer dans sa nuit de solitude.

*

Je reviendrai.

Mes mots chargés d'une marée d'équinoxe,

Trouveront peut-être de nouvelles voies à explorer.

Ne croyez pas à l'abandon :

Je confie ce lieu d'exil poétique

A la sagacité de votre vigilance.

Je sais que vous en prendrez soin,

Tandis que mes doigts s'agiteront,

Plantés au coeur d'une île balayée par les vents,

Tissant les perles de beauté

Offertes dans le baillement des huîtres.

*

C'est juste un temps de vacance,

Un temps de latence,

Une pause,

Un soupir,

Ma dernière mesure est une demi-cadence:

Elle laisse la respiration en suspend,

En attendant la suite.

*

A très bientôt.

.

Manosque, 1er avril 2010 (sans que ce soit un poisson)