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Le Droit à la formation est fondamental dans la société de la connaissance

Publié le 02 avril 2010 par Agirplus

Les parteLe Droit à la formation est fondamental dans la société de la connaissancenaires sociaux, le gouvernement et le législateur ont sans doute fait perdre deux années à nos concitoyens avec la décevante « Loi pour la formation tout au long de la vie » du 24 novembre 2009.
Si en 2003 et 2004 les accords interprofessionnels et la Loi  laissaient supposer une vraie révolution, la nouvelle réforme n’ajoute quasiment rien à ce qui avait été mis en place il y a 6 ans. Bien au contraire, tout en proclamant haut et fort le souci de simplifier et de développer  la formation, cette  nouvelle Loi ajoute de la complexité et de l’insécurité sociale et professionnelle.

Les acquis du nouveau texte de Loi sont plutôt minimes, il s’agit surtout d’affichage et de moulinets législatifs qui ne changeront guère la situation sur le terrain social. Rappelons tout de même les points essentiels du nouveau texte :

- Le Droit à la Formation est réaffirmé et le DIF remis en avant puisqu’il devient portable et acquis pour le salarié en cas de rupture professionnelle,

- Une partie des fonds de la formation sera réorientée vers les publics les moins qualifiés. La Loi évoque une somme de 900 millions d’euros en 2010 pour 500 000 travailleurs et 200 000 DE.

- La réorientation des fonds mutualisés par les OPCA vers les petites entreprises (moins de 50 salariés).

- Le bilan professionnel, les entretiens professionnels, le passeport formation.

Rien de nouveau encore dans ce domaine et on se demande s’il était vraiment nécessaire de négocier pendant deux ans pour réécrire une telle Loi.

En fait dans cette nouvelle économie du savoir, où nous entrons à reculons, il apparaît plus que jamais que le seul dispositif porteur de sens et capable de réformer la formation est le Droit Individuel à la Formation (DIF).
Le DIF est une invention des partenaires sociaux en 2003 mais il aura mis beaucoup d’années à s’imposer. Pourtant il tient en quelques points dont personne ne peut contester l’évidence :

1. La société cognitive : Notre société va devoir massivement investir dans l’intelligence (Livre blanc de 1995 de la communauté européenne). Dans cette société « ce seront les capacités d’apprendre et la maîtrise des savoirs fondamentaux qui situeront de plus en plus les individus les uns par rapport aux autres dans les rapports sociaux »

2. L’économie de la connaissance : Le sommet de Lisbonne en l’an 2000 fixait à l’Europe un nouvel horizon pour 2010 : « Devenir l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d’une croissance économique durable accompagnée d’une amélioration quantitative et qualitative de l’emploi et d’une plus grande cohésion sociale »

3. L’éducation devenue un trésor (Commission de l’UNESCO pilotée par J. Delors en 1996). Le savoir, véritable produit de grande consommation, se capitalise, s’exploite, se rentabilise et se privatise.

4. Les sociétés et les organisations deviennent apprenantes. Le savoir est devenu un atout stratégique pour les individus, les organisations, les nations. « De nos jours, le savoir sous toutes ses formes joue un rôle capital dans le fonctionnement de l’économie. Les nations qui exploitent et gèrent efficacement leur capital de connaissances sont celles qui affichent les meilleures performances. Les entreprises qui possèdent plus de connaissances obtiennent systématiquement de meilleurs résultats. Les personnes les plus instruites s’adjugent les emplois les mieux rémunérés »

5. Le travail du savoir. Nous sommes tous appelés à devenir des travailleurs du savoir , aussi bien « esclaves du savoir » dans les organisations néo-tayloriennes de l’information que pour des fonctions à haute valeur ajoutée intellectuelle.

6. L’apprentissage tout au long de la vie. les efforts des individus qui doivent assumer la responsabilité finale de leur propre apprentissage. Au sein des sociétés de la connaissance, le rôle principal revient aux individus eux-mêmes.

Le droit à la formation (DIF) est ce dispositif capital et aux multiples facettes et implications :

a) Un rôle d’implication et de responsabilisation : on ne se forme pas sans projet ni sans volonté de se former. Le DIF permet donc de rendre le salarié acteur (et responsable) de son projet professionnel et de formation.

b) Un rôle de répartition : Les apprentissages sont toujours inéquitablement répartis dans la plupart des organisations, le DIF généralise la formation

c) Un rôle de négociation : Le salarié n’est pas abandonné face au développement de ses compétences, l’entreprise a aussi sa propre responsabilité. Pour évoluer professionnellement il faut certes le vouloir mais il faut encore le pouvoir. Les entreprises doivent donc devenir apprenantes et bienveillantes face aux besoins en développement de leurs salariés.

d) Un rôle prospectif : Les organisations ne disposent plus d’une vision sur le long terme concernant leurs métiers, leur activité. Cette projection sur le long terme est désormais du ressort  du salarié qui doit valoriser sans cesse son capital intellectuel et construire tous les jours son projet professionnel.

e) Un facilitateur de reconversions : La crise est aussi une opportunité. La crise économique actuelle interpelle les salariés quant au développement de leurs compétences et de leur employabilité (selon un sondage récent 32 % des salariés ont un projet à court terme de reconversion). Alors que notre système de formation n’est pas calibré pour accompagner des millions de reconversion (35 000 CIF par an pour 15 millions de salariés du privé !) le seul dispositif massif, généralisé et utilisable par des millions de salariés en transition professionnelle est le DIF (120 heures de capital formation pour la majorité des salariés en CDI en mai prochain).

Le DIF est bien  donc cette « bonne à tout faire » de l’univers professionnel qui cannibalisera à terme tous les autres dispositifs de formation (le trentenaire plan de formation vit sans doute ses derniers instants). Tout comme Jules Ferry avait inventé l’école publique et obligatoire permettant aux petits paysans d’accéder à la ville et aux métiers ouvriers, les acteurs sociaux ont désormais la redoutable responsabilité d’amener toute la société à se projeter dans la société des savoirs et de la connaissance.

Didier Cozin Auteur de la seconde édition du reflex DIF à paraître en mai 2010

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