Le Salon du Livre de Paris a fermé ses portes mercredi soir. Ses dirigeants se disent satisfaits de ce cru 2010. Pourtant les professionnels de la BD ont un goût amer de cette édition.
Pour le 30e anniversaire de ce salon, les chiffres n’ont pas été à la fête. La fréquentation a baissé et les ventes ont eu du mal à égaler le niveau de 2009. Et les journalistes BD ont boudé la manifestation. Explications.L’annonce de retrait massif du groupe Hachette, non seulement géant de l’édition mais aussi groupe de presse puissant, était le signe annonciateur de la crise que traverse le Salon du Livre.
Le grand hall de la Porte de Versailles paraissait bien vide pendant ces six jours d’ouverture au public. La plupart des éditeurs de BD habituels avaient renouvelé leur participation. Les éditions 12 bis tenaient même pour la première fois un stand dans un salon.
Pour le neuvième art, l’intérêt d’un tel salon est clair. Dans un vaste hall mélangeant tous les genres littéraires, il offre une
belle vitrine commerciale aux éditeurs de bandes dessinées. Leur présence permet de rencontrer directement un large public, des amateurs du livre en général aux fans de BD en passant par les scolaires déboulés en masse le mercredi.
Tandis que les lecteurs peuvent découvrir tout le catalogue des éditeurs regroupés par groupe (Flammarion, Média Participations notamment), ceux-ci organisent quelques séances de
dédicaces particulièrement chronométrées. Les collectionneurs habituels de dédicace affluent pour décrocher un dessin personnalisé de la centaine d’auteurs qui se succède sur l’ensemble des stands.
Ce rendez-vous parisien est encore une rencontre entre les éditeurs et les auteurs qu’ils soient en quête d’une première édition grâce aux fameux « speed dating », les rendez-vous rapides de présentation de projet ou qu’ils aient un nouveau projet à proposer.
Ce grand marché du livre est évidemment une énorme librairie. Chaque exposant tente de vendre en direct le maximum d’albums, pour compenser un peu le coût de la manifestation. Mais le chiffre d’affaires dépend de la fréquentation. Et dans les couloirs, la plupart des éditeurs se plaignait de sa baisse. Les organisateurs ont estimé à 7% le nombre d’entrées en moins par rapport à l’an passé. Autrement dit l’effort tarifaire sur les jeunes et les étudiants n’a pas permis de maintenir le niveau atteint l’an passé. Du coup, les ventes souffraient de la baisse du pouvoir d’achat des ménages. Au mieux elles étaient maintenues par rapport à l’an passé en raison de l’augmentation des tarifs…
Le Salon du Livre a déçu l’Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée (ACBD). Ce rendez-vous parisien était en effet depuis 2004 l’occasion de son assemblée générale. Traditionnellement, celle-ci était suivie d’une rencontre entre les attachés de presse et les adhérents de l’ACBD. Ensuite, le Grand Prix de la Critique était remis au lauréat en présence du récipiendaire précédent qui offre traditionnellement un cadeau au nouvel élu. Or, les organisateurs du salon n’ont pas su
trouver d’espace pour accueillir ces rencontres. L’ACBD a donc tenu sa réunion annuelle à
Radio France et remis son prix à Marc-Antoine Mathieu récompensé pour
Dieu en personne publié chez Delcourt dans un restaurant près de Montparnasse…L’auteur a reçu un dessin original humoristique de Posy Simmonds. Peu de journalistes BD ont fait l’effort de se rendre à la Porte de Versailles. Deux autres prix BD ont néanmoins étaient remis sur le Salon, le Prix spécial des lecteurs du
Parisien et
Aujourd'hui en France attribué au T.3 d'
Il était une fois en France de Fabien Nury et Sylvain Vallée publié chez Glénat et le Prix France Info de la Bande Dessinée d'actualité et de reportage 2010 attribué à Denis Robert, Yan Lindingre et Laurent Astier pour leurs albums
L'Affaire des Affaires édité par Dargaud
Pourtant, le salon du livre reste la manifestation incontournable du genre en France. Il a également développé un
espace notable sur le numérique. La partie de conférences sur ce thème a rassemblé un vrai engouement témoignant par là l’intérêt croissant de tous les acteurs de cette évolution inéluctable.
De part et d’autre du salon étaient en démonstrations des solutions permettant de lire des albums sur tablettes
Ipad (la grande nouveauté qui arrive en avril en France), sur smartphones ou sur écrans d’ordinateur. Sur le stand Ave comics ! les animateurs se réjouissaient de l’agrandissement de leur catalogue qui vient d’accueillir Glénat en exclusivité. Le diffuseur a aussi dévoilé une nouvelle BD numérique multimédia (incluant son et séquences de films entre des suites de cases) à sortir en avril.
Après avoir – faussement - hésité sur le lieu de la prochaine édition,
le 31e Salon du Livre de Paris se tiendra à nouveau à la Porte de Versailles du 18 au 23 mars 2011. Il accueillera en particuliers les lettres nordiques (Danemark, Finlande, Islande, Norvège et Suède). Gageons que les organisateurs trouveront d’ici là à se réconcilier avec l’ensemble des éditeurs et notamment les principaux ainsi qu’avec les dirigeants de l’ACBD.
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Photos © Manuel F. Picaud / auracan.com
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