Dimanche c’est le Tour des Flandres, « Le Ronde » comme disent les Flamands. C’est une course à nulle autre pareille. Elle a été crée en 1913 pour resserrer les liens entre les habitants de cette province belge. C’est une course dure, magnifique, destinée aux meilleurs, aux plus courageux.
Qu’un flamand l’emporte, il sera aussitôt considéré comme un héros dans sa province même s’il ne gagne pas autre chose dans l’année. Ce fut en particulier le cas avec Stijn Devolder, vainqueur des deux dernières éditions. Dans tous les estaminets de la région, entre deux pintes de bière et au milieu de l’alacrité de la fumée du cigare on ne cesse de vanter les mérites du vainqueur flamand.
Le Ronde, c’est la fête nationale par excellence ...
Le peuple flamand se retrouve dans son intégralité sur le parcours, oriflammes ( de couleur jaune avec le lion des Flandres en noir ) bien en vue. C’est l’événement de l’année. La télévision donne plus de quatre heures de direct sur la couse.
Le départ est donné maintenant à Bruges, surnommée « la petite Venise du Nord » en raison de la multitude de ses canaux, sur la Grand-Place, jadis plaque tournante du commerce européen.
De Bruges, la course file vers la Mer du Nord le plus souvent balayée par un vent mauvais. Puis elle longe la Côte jusqu’à Ostende et revient à l’intérieur du pays pour aborder et serpenter à partir d’Oudenaarde, au 100° kilomètre dans le vrai pays flamand. Une plaine hérissée de monticules le plus souvent pavés que l’on nomme ici « berg » autrement dit la montagne. La route alors, que dis-je la route, le chemin qui conduit alors à l’arrivée n’est qu’une succession de tortilles ou chaque coureur surtout s’il est flamand défend sa place avec fermeté. « Le plus dur, disait encore récemment Eric Van der Aerden, vainqueur par un temps exécrable, n’est pas la longueur de la couse ou le franchissement des zones pavées mais le fait qu’il faut toujours tirer sur le guidon, pousser, jurer, s’insulter, se donner à chaque coup de pédale corps et âme sans oublier l’élan nécessaire qu’il faut se donner pour passer les bergs avec les meilleurs ».
Bien souvent on a comparé le peloton du Ronde à une horde de bisons sauvages tant les coureurs donnent le meilleur d’eux-mêmes de façon désordonnée pour pouvoir être toujours aux premières loges.
A la différence de Paris-Roubaix, les pavés sont ici de conception hollandaise. Leur faîte est rond. On les nomme des « chapeaux de curés ». Ils sont souvent placés en haut des bergs là ou la pente est la plus forte. Le Vieux Kwarémont, au km 179 par exemple est long de 2200 m avec 1500 m de pavés sur une pente à 12%. Le Koppenberg, 600 m de longueur mais pavés avec une pente à 20%. La seule Rue du Cloître, interdite en temps normal à la circulation offre en haut du Mur de Grammont une longueur pavée de 475 m avec une pente à 20% ; J’y ai vu une année Eddy Merckx, alors au sommet de sa puissance, et bien d’autres y mettre pied à terre.
Je n’ai jamais vu un coureur sourire au départ du Ronde. Le peloton est bien trop concentré sur les difficultés à venir. Une année, alors qu’il pleuvait fort, une pluie froide, glaciale, celle qui vous trempe les os jusqu’à la moelle, j’ai vu Bernard Hinault signer la feuille de départ puis foncer tout droit vers sa voiture, mettre son vélo dans le coffre et sans même se changer prendre le volant pour regagner au plus vite sa Bretagne.
Dimanche, les favoris ont pour nom Cancellara, Boonen, Philippe Gilbert, Pozzato, Devolder, Ballan, Maaskant, Flecha sans oublier le talentueux Breschel. Cancellara a fait de cette course son objectif de début de saison. Il est craint de tous, presque autant que des pièges du parcours.
25 équipes sont au départ dont trois françaises AG 2R, Française Des Jeux et Bbox avec Chaînel et Turgot qui viennent de gagner chacun une étape à La Panne, prélude à au Ronde.
Une petite supposition au passage pour vous faire mesurer combien tout compte dans cette course. Vous êtes coureur du Ronde. Votre pneu arrière est crevé. Votre directeur sportif est en 25° position dans la file des voitures suiveuses. Le temps qu’il vienne vous dépanner vous pouvez dire adieu à la victoire.
Dimanche ; si vous ne pouvez vous déplacer en Flandre pour ce monument de la course cycliste, il vous reste la TV. Eurosport, c’est à partir de 13 heures, dès l’entrée dans la zone stratégique avec Patrick Chassé et l’ancien vainqueur du Ronde Jacky Durand._
LA VICTOIRE DE JACKY DURAND
Trois coureurs français ont gagné le Tour des Flandres. Louison Bobet en 1955, Jean Forestier en 1956 et Jacky Durand en 1992, il y a dix-huit ans.
Jacky, à l’époque court dans l’équipe Castorama de Cyrille Guimard.
Le peloton roule groupé jusqu’au km 43 ou quatre coureurs s’échappent. Les Belges Roelandt et Meyvish, le suisse Thomas Wegmuller et notre Jacky Durand. Au km 100, ils ont 22 d’avance sur un peloton qui engoncé dans ses luttes intestines ne réagit pas. A 60 km de l’arrivée, Museeuw, Capiot, Jalabert, Bontempi et Ballerini secouent le peloton mais l’avance des quatre échappés est toujours importante ( 5 minutes ). Au Mur de Grammont à 25 km de l’arrivée, les deux belges décrochent. Il ne reste plus que Wegmuller et Jacky en tête de la course. Dans le Bosberg, à 12 km de l’arrivée, Wegmuller fléchit. Il ne peut suivre Jacky qui file vers l’arrivée et triomphe donc en solitaire.
Classement :
1°. Jacky Durand
2° ? Wegmuller à 48 secondes
3°. Van Hooydonck à 1.44
4°. M.Fondriest m.t
5°. F.Maasen à 1 ?57
6°. J.Nijdam m.t
7°. M.Madiot m.t
Que du beau monde.
Jean-Paul